I. Publicité et dépendances
– Puissance de tir (e-lire). Oyez ! Avis favorable de la Commission européenne qui ne voit aucune « entrave » concurrentielle et autorise donc l’américain Grey Global Group à acquérir le britannique WPP Group pour 1,3 milliard de dollars. Un ensemble de bienfaiteurs qui donnerait alors naissance au numéro un mondial de l’industrie publicitaire avec Grey, J. Walter Thompson, Ogilvy & Mather et Young & Rubicam.
– Publicité audiovisuelle / Des chiffres (1). Les investissements publicitaires plurimédia sont en hausse de +10, 2 % sur l’ensemble de l’année 2004 (La Correspondance de la Publicité, 28 janvier 2005)... Les annonceurs ont investi 5,175 milliards d’euros l’an passé sur les télévisions hertziennes : une progression de 6,4 % par rapport à 2003, 548 822 spots diffusés pour un temps d’antenne de 3 017 heures et l’équivalent de 21 jours ininterrompus de publicité sur TF1 ou France 3. La radio affiche de meilleures performances avec une hausse globale à +9, 9 %. Notons qu’Internet explose les scores (+78, 1 %). Mais, on assiste à une baisse de ces investissements dans la période allant de septembre à décembre : la radio se ramasse de 15, 3 % à + 5, 2 % sur la deuxième moitié de l’année ; la télévision nationale, chute à + 2, 1 % de revenus publicitaires bruts contre +6, 7 % de janvier à août 2004.
– Publicité en TV / Des chiffres (2). Ces chaînes, comme les thématiques, peuvent d’ailleurs remercier la possibilité d’ouverture de leur espace aux secteurs interdits. Selon leur syndicat - le SNPTV - la TV a bénéficié en 2004 de 92 M€ bruts de nouvelles recettes au cours de la première année d’application de cette réglementation modifiée pour les secteurs interdits. Les distributeurs et éditeurs littéraires - qui trépignent avant d’aller sur le hertzien - ont, quant à eux, investi 16,3 M€ sur les chaînes thématiques et les espaces régionaux.
– Pagination publicitaire Presse écrite / Des chiffres (3). En presse écrite, moins d’agapes... Si la presse enregistre +8, 4 % de gains sur le cumul annuel 2004 (La Correspondance de la publicité, 28 janvier 2005), son activité publicitaire en volume ne progresse que de 3 % et diminue même de 1 % sur les quotidiens nationaux. TNS Media Intelligence a de fait comptabilisé la pagination publicitaire de la presse quotidienne : elle recule de 3 % entraînée notamment par Les Echos et par France Soir (-18% chacun). De son côté, la presse magazine cède 3% à numéros constants, les plus fortes baisses en pourcentage revenant à la presse masculine (-8%) et à la presse économique (-7%). La baisse de la pagination publicitaire des magazines s’ajoute à celle de 2003, qui s’établissait à -4% (Stratégies Newsletter, 20 janvier 2005).
– Part d’audience TV 2004 / chiffres (4). Du côté hertzien, c’est le nirvana pour TF1 selon le « Médiamat Annuel » de Médiamétrie : sa part d’audience 2004 est en hausse à 31,8% (+0,3 point). France 3 aperçoit l’enfer : baisse à 15,2% (-0,9 point) ; France 2 et M6 restent stables (20,5% et 12,5%) : purgatoire ?
– Mesure du temps de cerveau disponible. TF1 Publicité vient de lancer un nouvel indicateur de médiaplanning basé sur le taux d’assiduité des téléspectateurs face aux écrans publicitaires, qui correspond à la proportion moyenne de l’écran vu par un individu. Selon la régie, « 70% d’un écran est vu par ses téléspectateurs, le niveau variant selon les cibles, le niveau d’audience, la durée de l’écran » (Newsletter de CB News, 6 janvier 2005).
– Les français aiment la pub ? Un sondage Ipsos-SNPTV effectué du 17 au 25 septembre 2004 repris par Le Parisien conclut que « Les Français aiment la réclame , en dépit (sic) de leur esprit critique » Soit 80 % des 1 004 individus de 15 ans et plus ‘’représentatifs’’ de la France. Commentaire joyeux « Avec l’avalanche de spots, les demandeurs sont servis ! ».
– Os à ronger. Après le Davos de Monaco [1], les pouvoirs en place surfent sur les marottes. Le Président Chirac - lors de ses vœux à cette presse qu’il « n’aime pas » - apporte ainsi sa contribution opportuniste, à la critique, tiède, des médias : « Chirac veut une ‘’ commission de réflexion’’ sur les concentrations » (Les Echos, 10 janvier 2005). Et Raffarin - également lors de ses vœux à la presse qui ne « l’aime pas » « a indiqué que la commission lui remettrait un diagnostic et des propositions d’action avant l’été ». A sa tête Alain Lancelot. Selon Le Figaro : « Entre l’exigence de liberté, la défense du pluralisme et la réalité économique, la marge de manoeuvre de la commission sera étroite. Si son pouvoir de décision paraît fort, nul ne sait aujourd’hui si elle se contentera de simples recommandations ou proposera la rédaction d’une nouvelle loi sur la communication » (11 janvier 2005) [2].
– Vive les marques (du service public). Jérôme Clément (fier) « Arte est devenue une marque » (Ecran Total, 27 janvier 2005). Communiqué de Radio France (27 janvier 2005) « La marque est devenue un repère incontournable dans notre société et donc un enjeu stratégique pour les entreprises. Forts de ce constat, Radio France, HighCo et BEC-Institute organisent pour la troisième année le Forum des Marques. »
II. Audiovisuel
– Radio France condamnée à... négocier. Le tribunal de grande instance de Paris a condamné Radio France à négocier avec les syndicats « dans un délai de huit jours » et « sous astreinte définitive de 2 000 euros par jour de retard pendant le délai d’un mois » (AFP, 25 janvier 2005). 2000 euros, c’est déjà une belle prime mais Jean-Paul Cluzel, président de Radio France, préfère reculer en appel (26 janvier). Malgré la matière et la manière, pas de grève annoncée à Radio France. « « Non, assure le délégué FO. C’est vraiment trop dur à vivre, pour nous comme pour l’Audimat (sic)... Simplement, nous poursuivons l’action judiciaire et surtout nous fonctionnerons autrement. Plus question de travailler pour les sites Internet sans accord préalable ! » Une sorte de grève du zèle en attendant la reprise des négociations (Libération du 31 janvier).
– Les affaires se refilent entre amis
- Rumeurs sur TV5. La succession du défunt Serge Adda à la présidence de TV 5 pourrait faire « le bonheur » (sic) de l’ancien ministre de la Culture (et de la Communication...) Jean-Jacques Aillagon, selon un " Indiscret " (4 janvier 2005) de L’Express (qui, c’est vrai, se trompe souvent). Explications : « Jacques Chirac est intervenu pour que l’ancien ministre de la Culture hérite (re-sic) de ce poste ». Figure aussi sur la liste des possibles " héritiers " l’ancien ministre de l’Education Luc Ferry (Le Figaro, 6 janvier 2005). Une information pour les plomber ?
- Nominations arrangeantes au CSA [3]. « Des nominations surprises au CSA » [4], saluées par Les Echos (24 janvier 2005), « à droite toute » pour Libération (22 janvier 2005). L’un dans l’autre, c’est une mise sous tutelle. Deux sécurités valent mieux qu’une et en ces temps de lobbying intense d’intérêts divergents sur des problèmes complexes et techniques, il est en effet plus « sage » de faire appel à des incompétents en la matière. Car, l’autre version est que ces nominations officielles masquent un abaissement du pouvoir effectif de régulation : « Des spécialistes des contenus ont donc été nommés là où le milieu de l’audiovisuel s’attendait à voir des professionnels de la technologie. En effet, le CSA est actuellement confronté à des dossiers éminemment techniques comme le lancement de la TNT avec différentes normes de compression (MPEG-2 et MPEG-4), l’intrusion de la haute définition dans la TNT et à la future apparition de la télévision sur les mobiles. » (Les Echos, 24 janvier 2005).
– Entente sur les JO. Ils les veulent, et montrent qu’ils savent s’entendre dès qu’il s’agit d’enjeux financiers colossaux. Mais vendent-ils la peau de l’ours ? « France Télévisions et TF 1 débourseront 72 millions de dollars en priant pour que Paris soit désigné » (L’Equipe, 20 janvier 2005). Prions...
– Radio, audience et Indépendants [5].
- Une bonne nouvelle. Dans les résultats de l’enquête 75 000+ sur l’audience de la radio (novembre-décembre 2004), RTL reste la première station de France en part d’audience, avec un score de 12,2%, mais le grand vainqueur de cette vague est le groupement d’intérêt économique Les Indépendants (rassemblant cent cinq stations), qui atteint pour la première fois les 10% de part d’audience. Ce n’est peut-être pas le fait du hasard (voir ci-après) (La Correspondance de la Presse, 17 janvier 2005).
- Un mauvais point. Au Midem, l’Upfi (Union des producteurs phonographiques français indépendants) a reproché aux Indépendants de calquer leurs « programmations sur celles des réseaux nationaux et cela pose un problème car, comme ces dernières, elles augmentent les rotations des titres et réduisent aussi les playlists » (Newsletter Stratégies, 26 janvier 2005).
– Radios et télés en quête et en cours de diversification.
- RMC se serait intéressé au rachat de La Vie financière (Groupe Express-Expansion, Socpresse-Dassault, voir plus loin) (Newsletter Stratégies, 12 janvier 2005). Une annonce sans suite mais pas anodine dans ce contexte de frénésie d’investissements dans les médias.
- NRJ s’apprête à devenir un opérateur de téléphonie mobile et court après Orange, Bouygues ou SFR, avec pour lièvre, le succès que connaît Universal Mobile, la marque distribuée par Bouygues Télécom. NRJ entend « mettre à profit le poids de sa marque auprès des jeunes pour conquérir une part du marché de la téléphonie mobile. Sur le même créneau de la téléphonie mobile et de la musique » (La Tribune, 25 janvier 2005). Par ailleurs, NRJ Group apporte ses aumônes au lancement d’un nouveau magazine adolescent, Kotchup (300 000 exemplaires)
- La convergence... Si la radio - comme la télévision (lire ci-après) - vient au portable, le portable aussi va à la radio. La Tribune (26 janvier 2005) annonce ainsi que le constructeur de téléphones mobiles Nokia a présenté à l’occasion du Midem de Cannes un téléphone aux fonctionnalités avancées et un partenariat avec 12 radios pour faire voter les auditeurs via le mobile, et notamment les faire répondre à des quiz .
- Télé sur mobile. Par la magie de l’Umts, concomitamment à la musique en téléchargement (lire plus haut), la télévision sur mobile est l’autre produit d’appel. Ainsi rappelle Le Figaro du 21 janvier 2005 : « France Télécom avait participé, en décembre dernier, à l’appel d’offres de la Ligue 1 témoignant de son intérêt pour le ballon rond. [... Mais] il s’agissait moins de remporter la mise que de rentrer progressivement dans le jeu. »
- Même les TV locales s’y mettent : « La chaîne de télévision locale TV7 Bordeaux va intégrer en février le portail du principal opérateur de téléphonie français Orange (France Télécom), pour la diffusion sept jours sur sept d’un journal d’information locale d’une minute trente sur les mobiles à la norme UMTS. Le directeur de TV7, Alain Perez, et le directeur régional de France Télécom, Jean-Luc Vuillemin, ont signé mardi le premier partenariat national d’intégration d’une télévision locale au portail Orange. »
– Du foot et du cinéma sur les bouquets en fêtes. L’information a été martelée : « Pour la première fois depuis quatre ans, la chaîne premium Canal+ a gagné 50.000 abonnés nets. Le bouquet CanalSatellite en a recruté 230.000 et son concurrent TPS a augmenté de 74 % ses recrutements nets » (Les Echos, 4 janvier 2005) « Le football rapporte 100 000 abonnés à Canal + » (Libération, 3 janvier 2005). Et aussi Guy Lafarge (Pdg) : « CanalSatellite a atteint trois millions d’abonnés » (Le Figaro ,19 janvier 2005). Cela dit, Vivendi Universal (maison mère de Canal + qui fait le fier sur ses abonnements en sus), tend par ailleurs « la main aux opérateurs » pour alléger sa facture de 600 millions d’euros pour les droits du foot (Le Figaro, 21 janvier 2005).
Pas en reste devant la danse du paon de son concurrent, TPS a également bétonné sa communication. Pour preuve, il est l’annonceur qui a le plus investi en décembre 2004 en publicité pour se montrer (14,5 millions d’euros bruts) selon TNS. Côté contenu, le bouquet de Bouygues s’apprête cependant à lancer une chaîne spécialisée dans le football pour la rentrée 2005 et « espère faire patienter ses abonnés fans de football qui envisageraient de résilier leur abonnement pour aller sur Canal + » (Le Figaro, 13 janvier 2005). Mais son gros morceau reste le cinéma : « son autre produit », comme le dit si benoîtement Stratégies (20 janvier 2005). TPS (groupe TF1) est en effet devenu « premium » par la grâce d’un décret du 30 décembre : soit un statut qui lui permet de diffuser un film le samedi soir.
– Télévisions locales. 11 janvier 2005 : « La Voix du Nord (Dassault) et NEP TV (sa filiale à 37,98%) rachètent la chaîne locale lilloise C9 TV » [6]. 19 janvier 2005 : le Conseil supérieur de l’audiovisuel a présélectionné les candidats à des fréquences de télévision locale hertzienne.
- Des retenus : à Tours, le projet Touraine Télévision, ayant pour principaux actionnaires La Nouvelle République du Centre-Ouest et la Caisse d’épargne. A Orléans : O TV (principaux actionnaires : Urbi TV, la société Start-GIE Les Indépendants, en radio, et Centre France). Au Mans, Canal 8 Le Mans, porté par la société Le Mans TV.
- Des désignés : à Angers, Angers 7 (Le Courrier de l’Ouest, Ouest France et le Crédit agricole). A Grenoble, le CSA a retenu TéléGrenoble, ayant pour principal actionnaire Antennes locales, filiale du groupe France Antilles (Comareg).
Voir notre dossier (enrichi au fur et à mesure) « Les télévisions locales ».
– Télévisions numérique terrestre (TNT) : le cactus des décodeurs [7]. Le compte à rebours est lancé pour la TNT gratuite (mars 2005), et le téléspectateur doit le savoir... De fait, signe qui ne trompe pas, Le Parisien jusqu’à présent très discret augmente sa surveillance technique sur la TNT (et même l’inaugure), à en croire ses articles : le 17 janvier 2005 « C’est (presque) parti pour la TNT », le 18 « La TNT est branchée », et enfin le 24 « Télévision numérique terrestre : la bataille des décodeurs ».
Ce dernier point est important, c’est un autre sac de nœuds... Car « une belle bataille commerciale se profile », note Le Parisien du 18 janvier 2005 : « La cible : le marché des adaptateurs ou décodeurs ». Le business table sur l’acquisition de 700 000 boîtiers, et Thomson, Sagem, STMicroelectronics (entre autres) se tirent déjà la bourre pour prendre des parts de marché. Mais sur quelle norme ? Ainsi que l’explique Le Figaro « la plupart des opérateurs redoutent désormais les conséquences commerciales d’une double mise en service à quelques mois d’intervalle. Pour eux, le message de lancement de cette nouvelle technologie risque d’être brouillé autant pour les clients que pour les distributeurs. Les chaînes gratuites dont le lancement est prévu en avril prochain dans la norme mpeg2 pourraient faire les frais d’une attente des consommateurs pour des équipements réputés plus performants » (4 janvier 2005). C’est ainsi : la TVHD (télévision numérique Haute définition) ou la norme MPEG- 4 arriveront sur la TNT, après le câble et l’Internet et d’ici dix ans, « de 5 à 12 millions de foyers devraient être équipés selon les scénarios retenus ».
Résultat : le « soutien actif du ministère de l’Industrie à la haute définition provient du fait que les industriels français sont bien placés dans les semiconducteurs, les encodeurs et les décodeurs de télévision numérique » (Les Echos, 17 janvier 2005) [8].
– TNT : passage en force de TF1. Les jeux se font par les puissances privées sur l’échiquier qu’elles ont préempté... TF1 est revenu à la charge en rouvrant le front. Il a « fait connaître au Conseil supérieur de l’audiovisuel son souhait de lancer dès le mois de mai 2005 - au lieu de septembre - son offre de télévision payante en numérique terrestre et ce, en norme MPEG 4 », via TPS, qui veut être sur la TNT payante. Elle sera donc « "la première chaîne au monde à diffuser ses programmes en TNT sous la norme MPEG4". Les terminaux numériques de TPS, conçus avec Thomson, Sagem et ST MicroElectronics, permettront également la réception des autres chaînes payantes en MPEG 4 et des chaînes gratuites en MPEG 2 » (Libération, 12 janvier 2005).
– TNT : sollicitation et prêche. BFM [9] (qui possède aussi RMC), a annoncé qu’elle était candidate à une fréquence en gratuit sur le numérique terrestre suite au nouvel appel d’offres lancé par le CSA. Baptisé BFM TV, ce projet est celui d’une chaîne dédiée à l’information économique, à l’instar du positionnement de la radio (Les Echos, 13 janvier 2005). Pendant ce temps, le secteur public européen prêche (dans le désert ?) : « Les dirigeants des plus grandes télévisions publiques européennes [...] ont plaidé pour un secteur audiovisuel public « fort » en Europe et ont revendiqué un rôle de locomotive dans l’implantation de la télévision numérique terrestre (TNT) » (Les Echos, 25 janvier 2005).
III. Presse écrite
– Ils nous ont quittés. (Entre autres ...) Le magazine NetLive (groupe Tests) ; le mensuel masculin Jules (Buzzer Press). Enfin, le magazine mensuel Esprit femme qui voulait « simplifier la vie quotidienne des femmes » a plutôt causé du souci à ses créateurs : liquidation de la société éditrice, mort du titre.
– Risque de chauffe sociale à L’AFP. Alerte de L’intersyndicale de l’AFP, motion de défiance et appelle à une assemblée générale du personnel, « afin de protester contre la décision du président de l’agence, Bertrand Eveno, de séparer la gestion des salaires ordinaires de celle des salaires de la direction ». Le retour des bonus iniques après l’épisode du crédit-bail (pour mémoire, lire : « AFP : « Halte à la casse ! » - Sud-AFP ») ?
– Presse économique. La situation devient urgente pour La Vie Financière (Groupe Express-Expansion, Socpresse), que le groupe Dassault peine à revendre (lire plus haut). Il a demandé une « prolongation de six mois du délai imparti pour la vente à la Commission européenne, qui n’en a accordé que trois » (Les Echos, 25 janvier 2005). « L’administrateur indépendant Philippe Mauduit, nommé à ce poste à la demande de la Commission européenne, qui a exigé la vente de La Vie financière pour approuver la cession de la Socpresse au groupe Dassault, aurait déposé un dossier de reprise via sa société Mediaxes Consulting. Par ailleurs, Nasser Ouzegdouh, actuel directeur de la rédaction de La Vie financière, serait également sur les rangs. »
– Presse turfiste. A droite, on vend... Le fonds d’investissements Montagu est sur le point de reprendre Paris Turf et Week-end à la Socpresse pour 40 millions d’euros avec le devoir contractuel d’utiliser les imprimeries de la Socpresse durant huit ans. Ce qui soulève cette question : pourquoi la Socpresse se sépare-t- elle d’un créneau porteur ? En effet, « le PMU a été modernisé, a lancé de nouveaux jeux et facilité la possibilité de parier. Maintenant, on peut jouer toute la journée, pendant la réunion hippique, jusqu’au départ de chaque course. On compte 500 000 nouveaux parieurs depuis trois ans. Il y a 6,5 millions de personnes qui jouent au moins une fois par an » (Bertrand Bélinguier, PDG du PMU, Le Parisien, 20 janvier 2005). Résultat, le lancement d’un nouveau quotidien hippique, 1... 2... 3... Pariez (0,90 euros édité par Catalyst Media et commercialisé par la régie du groupe Sporever), qui « balayera les paris du jour » à la différence de ses concurrents, mais aussi (il faut rester prudent) l’ensemble des paris sportifs existants.
– Presse spécialisée. Le titre vaut constat (sans appel à réagir, bien sûr) : « Les fonds d’investissement se partagent la presse spécialisée » (Les Echos, 25 janvier 2005). Car cela va vite et c’est tourbillonnant. Le 26 janvier 2005, Les Echos nous apprennent que le groupe France Agricole, qui édite La Vigne, L’Eleveur laitier ou Agro distribution, est cédé pour 75 millions d’euros au fonds Pragma Capital [10] qui signe là son premier investissement dans la presse : le fonds Pragma prêt à monter en puissance salut et avertit La Tribune (27 janvier 2005) qui lui souhaite la bienvenue. Autre nouvelle du 26 janvier : VNU et IDG ont regroupé leurs journaux en France : Le Monde informatique, Réseaux et Télécoms ... (pour IDG France) et Sciences et Vie micro, SVM Mac, PC Direct ... (pour VNU Publications France). Un mariage « 50-50 » qui sent évidement l’abandon : « "Il y aura très probablement une chasse aux doublons et des recherches de synergies, au niveau des services généraux par exemple", commente un salarié de VNU. » (Les Echos, 26 janvier 2005). Enfin, le groupe Gisi (L’Usine nouvelle et LSA), se restructure : 90 postes (sur un effectif total de 389 salariés) vont être supprimés, selon l’intersyndicale (Libération du 29 janvier 2005).
– Presse quotidienne nationale (PQN) : encore en baisse [11]. Les chiffres NMPP confirment les baisses de vente en 2004 : France Soir (- 13,2%), Le Monde (- 10,1%), Libération (- 6,3%), Le Figaro (- 4,2%) , La Tribune et L’Humanité (- 3,5%) et Les Echos (- 2,3%). Et pendant ce temps-là, L’Equipe progresse de 8,7%, La Croix de 4,4% et Aujourd’hui en France de 2,3%.
– PQN : le temps des camelots et des publicitaires. Le Monde ferme Aden car, comme le fait remarquer Charlie Hebdo (27 janvier 2005), Lagardère qui renfloue le quotidien possède Hachette qui possède Pariscope et ... Zurban. Ledit Zurban qui est en grande difficulté financière et licencie mais place son argent, pour se relancer, dans la publicité [12] déclinée en affichage et en radio. (Stratégies, 7 janvier 2005). D’un autre côté, Le Monde possède Télérama qui lui aussi fait un supplément. Les jeux sont faits, la synergie agissante...
24 janvier 2005 : Le Figaro Entreprises, qui paraît chaque lundi en supplément du quotidien, annonce comme « hypothèse » la suppression de la partie rédactionnelle qui accompagne ses offres d’emploi [13].
Les schémas des quotidiens semblent simple : suppression des suppléments et du personnel qui va avec, au profit de la publicité et de l’attrape-nigaud. Depuis le 1er janvier 2005, Le Monde réitère son opération DVD dans son numéro du week-end. Comme Le Figaro d’ailleurs, qui se lance en surenchère dans la vente d’encyclopédies (800 pages) chaque mardi. Et La Tribune d’y voir une « petite révolution » (22 janvier 2005) quand CB News (17 janvier 2005) constate que « les quotidiens de qualité (sic) se dopent aux cadeaux culturels ». Les concurrents sans qualité apprécieront ou suivront ...
Stratégies (28 janvier 2005) évoque 3 pistes de développement : baisser le prix à un euro (comme Le Figaro) ; le « magazine du week-end » (comme Le Monde et Le Figaro) et, enfin, « les offensives de promotion et de publicité indispensables (sic) à la relance » (comme tous). Et France-Soir refait le coup du format et se "tabloïde" : « Plus moderne et dynamique. Passant de 32 à 36 pages, pour un prix inchangé (0,90€) », et approfondissement du fond : « une vraie entrée sports et foot, par la fin ».
– La PQN et régies publicitaires. Quelques histoires d’amour...
- Dassault aime Dassault. Il a nommé, le 13 janvier 2005, le publicitaire Pierre Conte (ex-groupe Omnicom) président de la régie du Figaro. Celui-ci prend également la direction générale adjointe du groupe Express-Expansion pour piloter sa régie publicitaire. Les deux groupes feront régie commune. Ce qui donnera naissance à la deuxième régie de presse française avec plus de 400 collaborateurs, 22 millions de lecteurs "dédupliqués" et 2,2 millions de lecteurs cadres et un chiffre d’affaires publicitaire cumulé de 720 millions (Stratégies, « l’autre grande régie », 13 janvier 2005) .
- Publicis aime Libération et Le Monde . On ne rappellera jamais assez que le ver de la publicité est dans le fruit de la presse. Publicis d’un côté vient de prêter de l’ordre de 3 millions d’euros à Libération (lire le pathétique papier de Serge July : « "Libération" se donne les moyens du futur » - lien périmé.) Et de l’autre Publicis s’apprête à participer « activement » à la recapitalisation du Monde en apportant 25 millions d’euros en liquidités et les 10% qu’il détient dans Les Journaux du Midi (valorisés à 10 millions d’euros) - Midi libre, etc. -, ce qui lui permettrait de détenir 15% du capital du Monde SA (La Tribune, 28 janvier 2005), ce qui n’est pas simple, à cause de Lagardère (que re-voilà)...
- Lagardère aime Le Monde . La Tribune (7 janvier 2005) évoque la jambe droite du dispositif de soutien de Lagardère au Monde : « L’opération devrait s’effectuer par l’apport de la participation de 10 % détenue par Lagardère dans Les Journaux du Midi, évaluée à près de 15 millions d’euros plus l’injection de cash pour 15 autres millions d’euros. Au total Lagardère investirait près de 30 millions d’euros. ». Et L’Express (10 janvier 2005), s’occupant de la jambe gauche, précise : « Le Monde et Lagardère s’acheminent vers un accord : le groupe d’Arnaud Lagardère, qui va prendre 15% du capital du quotidien, se verra confier sa régie publicitaire à compter de 2006 à travers deux de ses filiales, HFM et Hachette. Publicis, qui en était jusqu’ici l’opérateur, conservera les rênes jusqu’à la fin de l’année. »
CB News (11 janvier 2005) semblait ainsi trouver naturel que Lagardère prenne ces 15 % en échange du contrôle des régies du groupe... « pour garder son indépendance » [14]. Constance Benqué qui « gèrera » le dispositif voyait « une vraie logique et une vraie puissance à rapprocher Le Monde et Europe 1 ». En effet, ces deux médias « touchent des cibles proches en termes d’influence ». Sauf que La Tribune (28 janvier 2005) apprenait que « l’accord financier entre Lagardère et Le Monde SA serait suspendu à un accord avec Publicis sur la régie publicitaire ». Motif ? Lagardère souhaite un rapprochement entre Le Monde Publicité et Régie 1 (régie d’Europe 1, radio du groupe Lagardère). Or Régie 1 est détenu à 50/50 par Lagardère et Publicis... Lagardère reprendrait volontiers une participation dans la régie du quotidien pour associer une de ses régies à celle des magazines des ex-Publications de la Vie Catholique (passées sous la coupe du Monde) mais se sent gêné par Publicis qui, lui, possède des intérêts dans la régie du Monde. Le problème à résoudre est : comment faire pour dénouer Publicis du Monde Publicité...
Moralité : le pouvoir de la publicité sur les médias est bien encombrant, et l’on voit que ces enjeux peuvent freiner même les stratégies financières (d’autant que Publicis détient des obligations remboursables par le journal)...
– Libération et Rothschild. Le 18 janvier 2005, le conseil de surveillance de Libération approuvait l’offre d’Edouard de Rothschild. Le 20 janvier 2005, le vote du personnel est finalement favorable et approuvé par la SCPL (Société civile des personnels de Libération) ... à 37 %, et sans promettre de toucher ou pas au contenu [15]. Alors que le vote des salariés de Libération sur l’entrée de Rothschild au capital du quotidien n’avait pas encore eu lieu, Les Echos (14 janvier 2005) semblait le mettre au pied du mur : « Quitte ou double pour Libération », « Un journal moins original », tout en charriant la rédaction : « Un homme de droite, comme tout bon capitaliste », « Cependant, Edouard de Rothschild est surtout proche de Nicolas Sarkozy. Au point de partir en vacances avec lui. Pas vraiment la tasse de thé de Libé »... Libération s’est donné les moyens du futur avec des méthodes du passé et les recettes du présent (lire : « Libération tombe sous le charme d’Edouard de Rothschild »).
IV. Et pour finir...
– Le 24 janvier 2005 les diffuseurs de presse ont décidé de s’augmenter eux mêmes de 5%, « faute d’avoir obtenu satisfaction auprès des groupes de distribution de presse » (NMPP, Lagardère). Comme l’annonçait dès le 20 janvier 2005 l’AFP.