À quoi ressemble la vie de la rédaction d’un quotidien d’information ? Quels sont les pratiques et usages des journalistes ? Comment s’élabore une ligne éditoriale ? Qu’en est-il des rapports hiérarchiques et des effets produits à la fois par le régime de direction et de propriété d’un journal ? Comment se passe une conférence de rédaction ? Comment se pose la question de l’indépendance vis-à-vis du pouvoir, qu’il soit économique ou politique ? De quelle manière le numérique, la baisse des recettes publicitaires et l’apparition d’organisations comme WikiLeaks transforment le journalisme et la presse ?...

Se glisser à l’intérieur de la rédaction de quotidiens permettrait d’obtenir des éléments de réponse à toutes ces questions qui intéressent l’observation comme la critique des médias. Mais la porte de ces lieux où s’élabore la presse est généralement close et on ne peut regarder discrètement par le trou de la serrure... Alors, pour satisfaire cette légitime curiosité, Acrimed vous mène à La Clef ! C’est en effet dans cette salle de cinéma du 5e arrondissement à Paris (34, rue Daubenton) qu’aura lieu le cycle de projections-débats que nous proposons sur le thème « À l’intérieur des rédactions » (voir le site Internet du cinéma pour toutes les informations pratiques).

Voici une brève présentation des quatre documentaires au programme :

En 1977, Claude Perdriel, directeur du Nouvel Observateur, décide de lancer un grand quotidien d’information se voulant de gauche : Le Matin de Paris (le journal cessera de paraître en 1988). Pendant une dizaine de jours, le cinéaste Raymond Depardon filme au cœur d’une rédaction en ébullition. Celle-ci, nouvellement constituée, s’affaire aux essais – les numéros zéro – avant la parution de la première édition officielle du journal. Ainsi nous assistons aux discussions sur l’orientation éditoriale du journal, le lectorat visé, le style, le choix des sujets ou de la maquette, etc. C’est toute l’élaboration d’un quotidien d’information (doté ici de moyens financiers conséquents) que nous pouvons observer.

Soucieux depuis longtemps de l’indépendance de la presse en Algérie, le documentariste Malek Bensmaïl s’est immergé dans la rédaction du quotidien (en langue française) El Watan au moment de la campagne présidentielle de 2014, qui vit l’élection d’Abdelaziz Bouteflika pour un quatrième mandat. El Watan est un journal à la fois de référence et d’opposition. Nous assistons aux conférences de rédaction, aux prises de décision, aux oppositions au sein de l’équipe, aux doutes... Réflexion sur le travail et la pensée journalistiques, le film nous montre les difficultés et les enthousiasmes d’une rédaction s’efforçant de rester libre et indépendante. Comment être un véritable contre-pouvoir au quotidien ?

Aux États-Unis, en 2010, alors que les titres de presse font faillite en série, notamment à cause de la baisse des achats d’espaces publicitaires, le réalisateur Andrew Rossi se demande quel est l’impact d’Internet (YouTube, Twitter, WikiLeaks, blogging...) et de la culture de la gratuité sur le journalisme en général et sur le New York Times en particulier. Filmé en grande partie dans les locaux du célèbre quotidien (dont un dixième de la rédaction doit être licencié), À la Une du New York Times cherche à comprendre comment l’un des plus anciens et des plus respectés titres de presse résiste aux bouleversements majeurs introduits par les nouvelles technologies [1].

Alors que le quotidien Le Monde s’apprête à fêter ses soixante-dix ans, son service politique s’agite – la campagne électorale pour l’élection présidentielle de 2012 bat en effet son plein. Les journalistes débattent des sujets à traiter en conférence de rédaction, et s’affrontent parfois sur certains choix éditoriaux loin de faire l’unanimité, à l’heure où les réseaux sociaux et leurs usages viennent bouleverser les schémas traditionnels. En posant sa caméra (bienveillante) dans les locaux du Monde, Yves Jeuland offre aussi une vision des méthodes et de l’ « habitus » de la chefferie éditoriale du vaisseau amiral de la presse française.

Les projections auront lieu un mardi par mois et seront suivies d’un débat en présence de deux membres d’Acrimed. L’occasion de découvrir l’envers du décor et de faire la lumière sur certaines pratiques journalistiques. L’occasion aussi de s’interroger sur le rapport des cinéastes à l’objet filmé et de comprendre en quoi le documentaire est l’expression de la singularité d’un regard.

Calendrier des projections (une séance = 6,50 euros, deux séances = 10 euros [2])

– mardi 4 octobre 2016 à 20h : Numéros zéro
– mardi 15 novembre 2016 à 20h : Contre-pouvoirs
– mardi 13 décembre 2016 à 20h : À la Une du New York Times
– mardi 10 janvier 2017 à 20h : Les Gens du Monde

Rendez-vous donc le 4 octobre pour le premier Mardi Cinéma d’Acrimed !

Acrimed