Le 14 décembre 2011, la cour d’appel de Versailles a validé la demande faite par le comité d’entreprise de Wolters Kluwer France, d’une expertise judiciaire sur l’opération de fusion des entreprises Groupe Liaisons et Éditions Lamy, notamment, qui a eu lieu en juillet 2007. L’expert désigné par le tribunal de commerce de Nanterre en décembre 2010 a ainsi été confirmé dans ses missions, son rapport ayant été remis le 25 octobre 2011. Parallèlement, le CE a également déposé plainte auprès du procureur de la République de Nanterre en juin 2010 pour un délit d’entrave à son encontre lors de cette opération. Une plainte qui a débouché sur une enquête de l’inspection du travail et de la brigade de la délinquance financière. En juin dernier, nos syndicats ont assigné la direction au TGI de Nanterre, pour que les salariés récupèrent leur participation.
Si le CE et les syndicats mènent cette bataille judiciaire, c’est que cette fusion a été réalisée par une opération financière extrêmement compliquée, mais dont le résultat est simple :
- une remontée de 555 millions d’euros de dividendes à la maison mère et aux actionnaires néerlandais ;
- un endettement de 445 millions de la filiale française vis-à-vis de la maison mère, souscrit à un taux d’intérêt particulièrement élevé, qui plombent les comptes de l’entreprise ;
- une disparition de la participation aux bénéfices des salariés (5,1 millions en 2006) ;
- un plan de licenciements collectifs en 2010 et le non-remplacement de beaucoup de départs ultérieurs (démissions, ruptures conventionnelles, etc.) ;
- une entrave à l’investissement ;
- une économie en termes d’impôt sur les sociétés d’environ 25 millions d’euros de juillet 2007 à fin 2010.
Un manque à gagner donc pour les salariés comme pour les comptes publics, dans une entreprise qui est loin d’être déficitaire ou malade puisqu’elle dégage encore et toujours des millions de résultat d’exploitation, malgré l’impact de la crise sur les ressources publicitaires ou les abonnements. Une entreprise dont l’activité n’est pas délocalisable et sur laquelle la pression des autorités fiscales, sociales (Urssaf) ou judiciaires ne pourra avoir qu’un effet bénéfique pour tous, salariés ou caisses publiques.
Dans un contexte où tout un chacun dénonce les dérives de la finance ou en appelle à la « moralisation du capitalisme » et où le débat fait rage quant aux mesures à prendre sur le sujet de la « dette publique », nos organisations syndicales ont décidé d’interpeller journalistes et responsables politiques sur le cas concret de notre entreprise, Wolters Kluwer France.
Parce que nous avons vécu de plein fouet les causes de la crise et ses conséquences, nous n’avons d’autre choix que de poser cette question simple : tout cela était-il bien légal, et si oui, faut-il acter dans la loi que l’avidité des actionnaires prévaut sur le bien-être des salariés et des finances publiques ou modifier la loi pour empêcher cet état de fait ?
Rueil-Malmaison, octobre 2012