D’un contre-pouvoir, Le Monde est devenu un pouvoir, avancent Pierre Péan et Philippe Cohen [1]. Tandis que pour Bernard Poulet [2], " s’est affirmée la volonté du quotidien d’être l’acteur central de la scène politique (...) Ainsi, de contre-pouvoir, Le Monde est-il devenu un "anti-pouvoir". Comme l’antimatière qui absorbe tout, cet antipouvoir veut avaler tous les pouvoirs, les renvoyer au néant. "
C’est donc Le Monde, " le " Pouvoir, qui, le 31 mars 2004 (dans son édition du... 1er avril !), proclame la composition du nouveau gouvernement, avant l’annonce " officielle " (des pouvoirs résiduels...).
Sarkozy à l’Economie, Villepin à l’Intérieur (avec Copé), Barnier aux Affaires étrangères, Borloo au social, Fillon à l’Education... Le gouvernement du Monde recoupe en gros celui présenté en fin de journée par l’Elysée.
Mais le quotidien titre (sur quatre colonnes, p. 10) :
" Renaud Dutreil, un proche d’Alain Juppé nommé à la justice ".
Manque de pot, Perben reste Garde des sceaux... Dutreil se retrouve en fait à la Fonction publique.
Le Monde voit Darcos à l’Agriculture, c’est Gaymard qui y reste...
Le Monde s’épanche longuement sur les tractations avec l’UDF, pour suggèrer finalement qu’il n’y aura pas de ministre issu de cette formation. Or, Gilles de Robien reste ministre de l’Equipement et des Transports.
Le " journalisme border line " : c’est ce que diagnostique Bernard Poulet dans Le Pouvoir du Monde. " C’est une manière de faire de l’information "en prenant des risques" ", c’est-à-dire publier des "révélations" sans disposer de preuves : parfois ça passe, parfois ça casse. " Ce genre de procédé est le résultat inévitable de la volonté d’ "être les premiers", du désir de "créer son information", de parier qu’on fera le bon choix et que les événements finiront par vous donner raison. "
(Complément du 1er avril)
Prudence "en ligne"...
Puis vint le moment de la prudence dont nous avons découvert les effets, grâce à une correspondante, sur le site du Monde, agréablement décoré, le 1er avril.
Mieux vaut faire confiance au Bon Dieu qu’à ses Saints ! [3]