« Afin de sonder l’état d’esprit des troupes devant l’évolution du quotidien », nous explique Stéphane Bou, la Société des Rédacteurs du Monde (SRM) aurait « commandé et financé » une étude à la firme privée Ipsos. Le dessin qui accompagne l’article, réalisé par Cabu, met en scène Jean-Marie Colombani et Edwy Plenel lisant les résultats de l’étude, qui porte la mention « extrait de la note de synthèse de mai 2004 ». Le journaliste de Charlie Hebdo, sans indiquer comment il a eu connaissance de cette étude, annnonce : « les résultats [...] viennent de tomber ».
Une note précise : « 320 questionnaires ont été envoyés aux membres de la SRM ». Et Stéphane Bou poursuit : « Dans un contexte où une partie de la hiérarchie du journal aurait indiqué qu’elle boycotterait le sondage, le taux de retour est de 56 %. »
Autrement dit environ 180 questionnaires ont pu être récupérés et analysés. Il semble que la Société des Rédacteurs comporte, en tout 405 membres [1]. Il ne nous est pas précisé pourquoi seulement 320 questionnaires ont été distribués, ni sur la base de quels critères les 85 membres restants ont été exclus. Toujours est-il qu’à l’arrivée, cette étude porte donc, il faut en tenir compte, sur les opinions exprimées par 180 membres, soit seulement 44% de l’ensemble de la Société des Rédacteurs du Monde.
Les résultats n’en sont pas pour autant sans intérêt.
Selon Stéphane Bou, « 56 % des membres de la SRM ayant répondu au questionnaire estiment par exemple que la direction du Monde « n’explique pas clairement sa stratégie de développement », et 54 % d’entre eux pensent que les « relations avec la hiérarchie » (« proximité, affinités, fidélités... ») sont un des « principaux critères qui sont pris en compte lors des promotions ou des augmentations salariales ». »
En outre, note le journaliste de Charlie Hebdo, « ils expriment également des doutes, ou des critiques qui jusque-là provenaient de l’extérieur du journal. »
Ainsi, à la question ouverte « quels sont selon vous, les principaux facteurs qui peuvent expliquer la baisse de la diffusion du Monde en 2003 ? », les membres de la SRM ont livré des réponses qui ont été regroupées, toujours selon Stéphane Bou, en trois grands axes :
- « dégradation du contenu » : 37% (« baisse de la qualité, manque de sérieux, absence de suivi, contenu répétitif, fade, manque de réactivité, manque de motivation des journalistes ») ;
- le livre de Péan et Cohen : 37 % (« le contenu du livre, les réactions de la directions face aux critiques ») ;
- « choix dans le traitement de l’info » : 37 % (« manchettes “racoleuses“, choix éditoriaux, manchette sur N. Sarkozy, pensée unique »).
S’il ne faut pas oublier que des pourcentages inférieurs à 50 % sur l’échantillon recueilli correspondent à moins d’un quart de l’effectif total des membres de la SRM (50 % de 44 %), il semble, en tous les cas, que les critiques formulées à l’encontre du contenu et des choix éditoriaux du Monde, ne proviennent pas toutes de quelques aigris ou de ces critiques désobligeants qui sont - cela est fâcheux ! - "extérieurs" au sanctuaire.
Arnaud Rindel