Emmanuel Poncet, auteur de ce portrait, souligne par exemple, que ce « meuble médiatique obligatoire », « a longtemps fait peur aux enfants, lorsqu’il présentait avec son regard buté de psycho-killer les Mercredis de l’histoire sur Arte ». Et précise que « malgré des approximations et des erreurs fréquentes, ses tours du monde analytiques en 80 secondes ont fait longtemps fureur ». Mais selon Poncet, après le 11 septembre 2001, Alexandre Adler « a donné l’impression de péter un câble » et « a largué ses derniers lests de neutralité universitaire ». Il se considère « en guerre », « défend comme plus personne Bush et les Etats-Unis » et « soutient inconditionnellement Israël, et Sharon ». « Rien ni personne ne l’arrête. Surtout pas lui-même », précise le journaliste de Libération, en une formule que l’on croirait empruntée à Audiard...
En résumé, Adler « vomit tout ce qui ressemble de près ou de loin à la gauche morale. Attac, les 35 heures, le « bobotisme culturel », les Drac, la « complaisance égalitaire »... » et « surjoue avec une certaine sophistication le « néocon » de droite décomplexé à qui on ne la fera plus ».
Et Emmanuel Poncet de préciser encore qu’Alexandre Adler (mari de Blandine Kriegel, « très proche de l’Elysée »), a été formé à l’Ecole Normale Supérieure, qu’il est un ancien adhérent du parti communiste (!) et qu’il est aujourd’hui « Conseiller éditorial à 60 000 francs mensuels au Figaro [...], chroniqueur matinal à France Culture pour 25 000 francs, essayiste à succès et conférencier worldwide », mais aussi « conseiller occasionnel de Jacques Chirac » et « confesse à l’américaine un impressionnant total brut mensuel de 120000 francs (18 300 euros) ».
Ce portrait au vitriol se conclut sur une citation de Philippe Thureau d’Angin, « son ex-collègue, directeur de Courrier international », qui selon Emmanuel Poncet, « résume bien » le personnage : « Il ne voit l’histoire que du côté du manche [...] Du côté des pouvoirs, jamais du côté des peuples. C’est drôle pour un ancien marxiste, non ? »
Voilà un portrait empreint d’un ton exceptionnellement critique, qui tranche avec la tiédeur habituelle. C’est le moins que l’on puisse dire.
Une remarque, cependant. « Du côté des pouvoirs, jamais du côté des peuples » : ce qui vaut pour Alexandre Adler, sur le mode outrancier, ne vaut-il pas, sur un mode mineur, pour nombre de « nos » éditorialistes ? Et le journalisme multicarte d’Alexandre Adler est-il une exception ? Un exemple : on ne sait toujours pas combien Jean-Marie Colombani est payé pour ses prestations sur France Culture ou ... Serge July, de Libération, pour sa contribution à l’émission de la vertueuse Christine Ockrent sur France 3. Et pendant ce temps là, les pigistes et précaires...
Arnaud Rindel
Post-scriptum. Plagiat ou clin d’oeil ?
L’article d’Emmanuel Poncet commence ainsi :
« Au bar de l’hôtel qui jouxte les éditions Grasset, Alexandre Adler commande sans hésiter un « grand crème ». [...] Or cette commande incongrue par 33 degrés centigrades répond magiquement à l’un de ses surnoms : Triple Crème. Allusion sûrement déplacée à son obésité. Mais rigoureusement inévitable tant elle traduit le profil boulimique, truculent et pour certains, agaçant, du personnage. Outre son amour des plats en sauce et des oeufs à la coque, ce sobriquet de Triple Crème désigne surtout sa voracité encyclopédique sans limites, ses tables ouvertes médiatiques et son gargantuesque appétit d’imposer ses visions du monde. »
Emmanuel Poncet ne peut ignorer que cet (affectueux ?) sobriquet a été attribué à Alexandre Adler par Le journal Pour Lire Pas Lu qui affuble de surnoms, qui n’ont pas l’heur de leur plaire, « les outres vaniteuses du PPA - Parti de la Presse et de l’Argent ». Emmanuel Poncet ne peut ignorer non plus que ces surnoms valent à PLPL d’être accusé d’être calqué « sur le modèle des feuilles d’extrême droite des années trente » (Philippe Val, Charlie Hebdo, 24 décembre 2003). Emmanuel Poncet va-t-il être lui aussi accusé d’une tendance inavouée à l’antisémitisme ? [2]