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Les médias et la mort de Pierre Bourdieu

Les éructations d’Alain-Gérard Slama

Sur France Culture et dans Le Figaro : ça se passe (presque) de commentaires...

 Sur France Culture :

Première édition. Le billet d’humeur d’Alain-Gérard Slama, vendredi 25 janvier : « Le monde désespéré de Pierre Bourdieu ». Il suffit de lire la première phrase du « billet » d’Alain-Gérard Slama pour comprendre la haine qui habite son auteur. Tout le reste est caricature venimeuse et ne mérite pas le moindre commentaire. Sinon celui-ci : on a entendu ça ... sur France Culture.

« A soixante-et-onze ans, Pierre Bourdieu est mort, dans un lit d’hôpital, comme il a vécu : en serrant les dents et en observant jusqu’au bout le silence devant les critiques d’une violence inouïe suscitées par sa pensée. Il est permis d’imaginer qu’au soir d’une existence qu’il savait condamnée, cet ancien assistant de Raymond Aron, parti fonder sa propre école avec une volonté de puissance redoutée, s’est demandé ce qu’il resterait d’une œuvre de combat tournée vers la destruction de l’ordre existant plutôt que vers la représentation précise d’un ordre à construire.

Alain Touraine, Edgar Morin, ont fortement marqué en France l’action de la gauche sociale-démocrate. Pierre Bourdieu ne faisait pas de différence entre la sociale-démocratie et le libéralisme, qu’il couvrait d’un même opprobre et identifiait à la révolution conservatrice qui fut une des sources du nazisme dans l’Allemagne des années trente. La figure même de l’intellectuel, à laquelle tant de ses collègues aimaient s’identifier devait se dissoudre dans l’anonymat d’une création collective. La démocratie représentative était à ses yeux un système de confiscation du pouvoir, un artifice maintenu dans l’intérêt des dynasties bourgeoises. Le syndicalisme représentait tout autant pour lui une force de conservation, que devaient supplanter des mouvements sociaux spontanés et autogestionnaires.

Parmi les élites de la société on n’en connaît guère qui aient trouvé grâce à ses yeux. Depuis Les Héritiers, écrit avec Jean-Claude Passeron, livre qui avait fait de lui un des maîtres à penser des futurs soixante-huitards, il les considérait comme des privilégiés, coupables d’un véritable délit d’initié et comme les reproducteurs d’un modèle de distinction académique et figé. La création artistique elle-même n’échappait pas à une critique qui enfermait celle-ci dans l’espace de champs sociaux, de réseaux porteurs de canons esthétiques déterminés par des stratégies de pouvoir.

Ainsi résumée, au risque de la caricature, la méthode Bourdieu baigne dans l’atmosphère d’une lumière noire traversée par des éclairs de soupçon. Démythifier, dévoiler, démasquer, procédait chez lui d’une démarche intellectuelle si naturelle qu’il y apportait une espèce de bonhomie tranquille, toujours grave, mais sans la moindre posture de provocation. On n’est pas près d’oublier le ton d’évidence sur lequel, s’adressant à de jeunes journalistes qui buvaient ses paroles, il avait décrit Raymond Aron comme un petit bourgeois fascistoïde - Aron qui, quand Bourdieu était encore à l’état de promesse l’avait considéré comme son disciple le plus cher et le plus doué.

On aurait tort pourtant d’en conclure qu’il ne restera de Bourdieu que l’image abstraite d’un démolisseur sans projet. Il faut se méfier des trous noirs. L’ancien professeur au Collège de France, fondateur d’école et éditeur s’est entouré d’une pléiade de disciples qui, dans le vaste champ des sciences humaines, et tout particulièrement en Histoire ont reproduit et banalisé sa méthode. Dans cette méthode, les notions de champ et d’habitus, plus habiles que les concepts marxistes de classe et de superstructure, ont séduit un grand nombre de sociologues en quête de vérité scientifique parce qu’elles laissaient une place beaucoup plus grande au hasard et à la liberté.

Enfin, depuis 1995, et son gros livre sur La misère du monde, Pierre Bourdieu a eu le génie de se faire le prophète des nouveaux mouvements sociaux suscités par le désordre mondial. Avec les syndicats Sud, Droit au logement, les mouvements de chômeurs, etc., il a identifié et fédéré derrière lui les nouvelles forces de contestation des sociétés démocratiques, et lancé leur nouveau manifeste : " exclus de tous les pays, unissez-vous ! " Bourdieu disparu, d’autres à coups sûr reprendront le flambeau - plus proches, on veut l’espérer, de l’abbé Pierre que de Ben Laden. »

 Dans Le Figaro

Alain-Gérard Slama, « Bourdieu, la gauche et l’idéologie de l’exclusion. La Révolution des rentiers », Le Figaro (lundi 28 janvier 2002). De cet article destiné à nous apprendre que la situation est révolutionnaire, il suffit de citer quelques extraits.

« Les staliniens, maoïstes et trotskystes d’hier, reconvertis dans les droits de l’homme excellent dans les techniques de l’amalgame et du procès d’intention (...) La France traverse une situation que l’on peut qualifier de révolutionnaire. Pierre Bourdieu, qui vient de mourir, a eu au moins le mérite et de lui donner, sur le modèle marxiste-léniniste, une doctrine d’action lors des grands mouvements sociaux de 1995 (...)Amalgamées dans La misère du monde, publié par Bourdieu en 1993, les différentes formes d’exclusion créent, en termes marxistes, les conditions d’une alliance objective contre l’ordre établi. (...)De là la stratégie que le sociologue et ses disciples ont répandu dans l’Université, les médias, les mouvements écologistes, l’extrême-gauche et même dans l’appareil du PS, voire dans des formations situées plus à droite : utiliser le pouvoir d’incantation et d’intimidation contenu dans l’idéologie de l’exclusion pour retourner le système contre lui-même. (...) »

Tout le reste est de la même encre.

 
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