Au nom de l’opinion publique
Qu’on se le dise : la CGT « peut difficilement continuer à ignorer une opinion publique assez peu réceptive à son message, perçu le plus souvent comme un repli catégoriel et immobiliste ».
On admirera cet oracle qui parvient à faire parler l’opinion publique, surtout quand elle est muette, afin de pouvoir parler en son nom.
Haro sur les syndicalistes
Sans doute est-ce cette opinion publique dont notre bon éditorialiste se fait l’interprète dans les couplets habituels qu’il entonne pour couvrir la voix des salariés.
Premier couplet : le mépris englobant contre toute forme de contestation qui n’a pas reçu l’aval du donneur de leçons du grand ouest : « Les contestataires radicaux d’EDF [...] semblent avoir pris des cours chez les intermittents » [2].
Deuxième couplet : l’imputation habituelle aux syndicalistes de motifs étrangers à ceux qu’ils invoquent. Des motifs, on s’en doute, revanchards, corporatistes et boutiquiers : la CGT ne serait pas « mécontente de prendre sa revanche après l’échec de la contestation contre les réformes des retraites et de l’assurance maladie. Et de continuer à capitaliser de nouveaux militants, notamment au détriment d’une CFDT jugée trop molle, trop complaisante » [3].
Troisième couplet : c’est la faute à la base (les « jambes »), privée de la raison qui gagne les cerveaux dirigeants (la « tête ») : « Il importe (sic) aussi de rappeler (re-sic) que chez les électriciens cégétistes, il y a souvent un problème de court-circuit entre la tête dirigeante - teintée de réformisme sans le dire - et les jambes, la forte fraction militante immobiliste, arc-boutée au statu quo sans le revendiquer. »
... Que l’on distinguera (voir plus loin) de tout « gréviste normalement constitué (sic) du privé. »
Vive Sarkozy !
« La CGT peut d’autant moins faire la fine bouche que Nicolas Sarkozy s’est montré généreux » ... Sarkosy dont Burel nous apprend quelques lignes plus loin, après avoir dressé le « catalogue de ses concessions [qui] ferait rêver tout gréviste normalement constitué du privé » qu’il s’agit d’un « ministre prodigue ».
Ce qui est moderne, c’est l’inévitable (et réciproquement) !
D’un bout à l’autre, l’argumentaire néo-libéral bat son plein. Mais la conclusion vaut son pesant de fatalité très moderne : « Quoi qu’il en soit aucune politique de l’autruche ne saurait aujourd’hui se justifier. Dans le contexte de la libéralisation massive et inévitable du marché de l’énergie, le statu quo serait suicidaire. Face à des concurrents agressifs et sans entraves, EDF n’a que le choix de se moderniser pour lutter à armes égales. A chances égales. Tous combat corporatiste d’arrière-garde ne pourrait qu’affaiblir un fleuron que beaucoup de pays nous envient » [4].
C’était un éditorial, donc un libre commentaire. Question : qui dispose dans le Grand Ouest des moyens équivalents de faire entendre une autre voix ?