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Licenciements à Encyclopædia Universalis menacé de disparition (CGT-FO-Sud-Culture)

Nous publions ci-dessous un tract de l’intersyndicale d’Encyclopédia Universalis daté du 31 mai 2005 contre les licenciements décidés par l’administrateur provisoire. Nous avons modifié le titre de cet article en conséquence.

En effet, nous avions précédemment publié ici-même (et sous un autre titre provisoire) deux documents qui permettent de comprendre l’histoire du conflit et que,l’on trouvera ci-dessous :
- Un communiqué daté de septembre 2004 et publié précédemment, où l’on pouvait lire : « Il est malheureusement devenu habituel que des actionnaires privilégient leurs bénéfices et sacrifient l’emploi. Il est plus rare que des actionnaires irresponsables préfèrent risquer de tuer leur entreprise plutôt que de tenter de résoudre leurs divergences. ».
- Un tract diffusé à la presse et au salon du Livre en mars 2005 : L’Encyclopædia Universalis en voie de disparition ? suivi d’Un effet de la financiarisation à outrance de l’édition (Acrimed)

« Non aux licenciements à Encyclopædia Universalis » (31 mai 2005)

La dernière encyclopédie francophone imprimée, encore commercialisée et mise à jour, voit son existence menacée.

Depuis plus d’un an, le Club français du livre et Encyclopædia Britannica, les deux actionnaires à 50-50 d’Encyclopædia Universalis - qui sont aussi ses distributeurs exclusifs historiques - sont en conflit. Le conseil d’administration n’ayant pas été renouvelé, le tribunal de commerce a prononcé la mise sous administration provisoire en juin 2004.

Le 29 avril 2005, l’administrateur provisoire, M. Valliot, a engagé une procédure de licenciement collectif.

Il s’agit de 15 suppressions de postes sur 50.

Sur les 14 postes spécifiquement éditoriaux, 7 seraient supprimés.

L’assemblée générale annuelle des actionnaires s’est tenue le 31 mars. L’administrateur provisoire a demandé un mandat pour mettre en œuvre un « plan de restructuration ». Ce mandat lui a été refusé. Il a décidé de passer outre.

Alors que l’imbroglio judiciaire continue entre les actionnaires, la seule décision prise est une suppression d’emplois ! Les salariés sont, comme toujours, les premières victimes désignées.

L’exploitation de la seule image de marque, sacrifiant les exigences professionnelles qui font la notoriété d’Encyclopædia Universalis, transformera la collection (versions papier et numérique) en un pur produit commercial dont la mise à jour ne sera plus assurée valablement.

Il est faux de prétendre que le support électronique permet l’économie des tâches éditoriales et il est aberrant de supposer que l’édition sur support numérique implique la disparition du livre.

Nous sommes d’autant plus scandalisés par ces licenciements qu’ils sont mis en œuvre par un administrateur provisoire étranger aux métiers de l’édition. Nous contestons la pertinence et la viabilité du projet de « restructuration » qu’il a présenté.

Les salariés n’acceptent pas les arguments fallacieux avancés par la direction pour justifier ce plan de licenciements. Ils sont déterminés à se battre par tous les moyens pour empêcher la destruction des emplois salariés. Le comité d’entreprise a décidé d’agir en justice. Représenté par Me Koskas, du Cabinet Grumbach & Associés, il a assigné en référé la direction au TGI, demandant l’annulation de la procédure. L’audience est fixée au 30 juin.

Intersyndicale CGT, Cgt-FO, Sud-Culture


« Non à la destruction d’Encyclopædia Universalis » (septembre 2004)

Depuis plusieurs mois, le Club français du livre (CFL) et Encyclopædia Britannica (EB), les deux actionnaires à 50-50 d’Encyclopædia Universalis (EU), se déchirent.

Pendant plus de trente ans, la collection encyclopédique, son supplément annuel Universalia, augmentés dès 1995 de l’édition annuelle du CD-ROM, ont fait vivre les deux actionnaires-distributeurs exclusifs grâce à un système de prix de transfert conçu à leur avantage, réduisant l’entreprise au rôle de « vache à lait », et lui interdisant tout développement autonome. Lorsque les affaires ont moins bien marché pour leur activité de distribution, les querelles ont commencé, paralysant les décisions, limitant la politique éditoriale à leurs seuls intérêts de distributeurs.

Fin 2003, la direction faisait passer en force un plan de diversification, rapatriait la trésorerie de EU gérée jusque-là par les deux actionnaires et imposait une modification des prix de transfert.

EB a aussitôt demandé la mise sous administration provisoire d’Encyclopædia Universalis et a fini par l’obtenir le 16 juin 2004.

Le 28 mai 2004, le CFL avait répliqué en demandant... la dissolution de la société EU ! La deuxième chambre du tribunal de commerce de Paris doit examiner cette assignation en dissolution le 28 septembre 2004, à 14 h.

Largement syndiqués et unitaires, la soixantaine de salariés d’Encyclopaedia Universalis ne comprennent pas ce gâchis. Le comité d’entreprise a engagé une procédure d’alerte le 22 juillet dernier. L’intersyndicale CGT-FO-SUD-Culture et l’ensemble des salariés sont déterminés à s’opposer à la destruction absurde d’une entreprise disposant des moyens économiques de fonctionner hors des groupes qui standardisent la diffusion de la culture.

Il est malheureusement devenu habituel que des actionnaires privilégient leurs bénéfices et sacrifient l’emploi. Il est plus rare que des actionnaires irresponsables préfèrent risquer de tuer leur entreprise plutôt que de tenter de résoudre leurs divergences.

22 septembre 2004


L’Encyclopædia Universalis en voie de disparition ? (mars 2005)

Depuis plus d’un an, le Club français du livre et Encyclopædia Britannica, les deux actionnaires à 50-50 d’Encyclopædia Universalis - qui sont aussi ses distributeurs exclusifs historiques - se déchirent.

La collection encyclopédique en 28 volumes, ses suppléments annuels, le CD/DVD font vivre depuis 1968 les deux actionnaires-distributeurs. Lorsque les affaires ont moins bien marché pour leur activité de distribution/vente, les querelles ont commencé. Elles ont paralysé les décisions et limité la politique éditoriale aux seuls intérêts de distributeur des actionnaires. À la fin de 2003, le P-DG, Giuseppe Annoscia, parvient néanmoins à faire voter par le conseil d’administration un plan de diversification étalé sur plusieurs années. Il s’agit de créer de nouvelles collections de livres diffusés en librairie pour faire d’Encyclopædia Universalis une entreprise d’édition plus indépendante.

Cependant, le conflit d’intérêt entre les actionnaires devient public. Le conseil d’administration n’est pas renouvelé. L’un des actionnaires obtient du tribunal de commerce la mise sous administration provisoire en juin 2004. L’autre réplique en demandant la dissolution de la société. Cette demande a été rejetée le 11 janvier 2005 par le tribunal de commerce qui a suivi notamment les arguments de l’avocat du comité d’entreprise, Me Bruno Marcus. Les juges ont également prolongé l’administration provisoire jusqu’au 31 mai 2005, délai supplémentaire pour trouver une solution.

L’administrateur provisoire, Me Régis Valliot, décidait dès son entrée en fonctions, en juin 2004, de renvoyer le PDG, Giuseppe Annoscia. M. Valliot assurait néanmoins au comité d’entreprise qu’il poursuivrait la stratégie éditoriale en cours et qu’il n’y avait aucun problème de trésorerie pour l’entreprise - la seule raison d’être de l’administration provisoire était la mésentente entre les actionnaires. Reconnaissant que le métier d’éditeur lui était étranger, M. Valliot déclarait qu’il s’appuierait sur les cadres de direction en place. Mais depuis le départ du PDG, l’équipe de direction recomposée met en péril l’intérêt collectif.

Aujourd’hui, le même administrateur provisoire envisage fermement un plan de restructuration dont les salariés (50 personnes en CDI actuellement) seront les premières victimes. Pourtant, l’un des deux actionnaires a déclaré en audience au tribunal de commerce qu’il était prêt à financer une augmentation de capital de 2 millions d’euros, ce qui a été acté dans le jugement du 11 janvier 2005.

La stratégie éditoriale, elle, n’est plus évoquée que par le sésame du « numérique », même si les projets éditoriaux n’ont pas été remis en cause officiellement. L’apologie du Web et du tout-numérique risque de servir de prétexte à un calcul justifiant la suppression des emplois salariés et des compétences qui ont permis à l’entreprise de devenir un éditeur d’ouvrages de référence renommé. Les récents modèles de publication sur Internet facilitent l’externalisation, la sous-traitance et le télétravail (déjà trop pratiqués dans l’édition, forte consommatrice de travailleurs précaires souvent surdiplômés, non salariés), qui ne garantissent plus l’édition cohérente de textes fiables et faisant autorité.

Si cette option l’emportait à Encyclopædia Universalis, elle entraînerait aussi la disparition de la dernière encyclopédie de langue française imprimée. Parce que pour nous le livre demeure une valeur essentielle, nous refusons d’envisager que les bibliothèques ne disposent plus de collection encyclopédique contemporaine. Là où d’autres maisons d’édition ont renoncé, Encyclopædia Universalis doit maintenir son projet de transmission des connaissances. Il est choquant que de tels enjeux dépendent aujourd’hui de la seule décision d’un administrateur provisoire.

Intersyndicale Encyclopædia Universalis / CGT - FO - Sud-Culture

intersyndicale.EU@free.fr

17 mars 2005

 
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