" Nous avons regretté, comme beaucoup, que certains médias colportent de prétendues informations sur des soirées sado-masochistes auxquelles Dominique Baudis aurait participé. D’emblée, nous n’y avons pas cru et nous avons montré que cela ne tenait pas la route. "
Ainsi commence l’entretien donné par Jean-François Kahn à la revue Médias (n°2, sept. 04) à propos de la crédibilité des journalistes. Sur quatre pages, le patron de Marianne livre une réflexion qui fourmille d’exemples.
Le principal concerne ainsi l’ " affaire Alègre ". Les assertions mettant en cause Dominique Baudis ne tenaient pas debout, assène " JFK ". " Cinq minutes de réflexion auraient dû suffire à écarter ces rumeurs. Qu’un ancien maire [1], un centriste modéré qui a peur de son ombre, qui regarde à droite et à gauche chaque fois qu’il fait un pas, qui ne dit jamais un mot plus haut que l’autre, aille dans un bouge de sa ville, se livre à des horreurs devant des dizaines de personnes qui peuvent le dénoncer dès le lendemain, ça ne tient pas debout. C’est tellement effarant que nous avons - comme d’autres - essayé d’analyser comment les médias pouvaient intoxiquer et être intoxiqués comme cela. "
Kahn livre de multiples détails censés éclairer la mécanique médiatique. Mais il en oublie un : Marianne a été le premier organe de presse à " balancer " Baudis.
Début mai 2003, l’" affaire Alègre " n’est qu’un fait divers parmi d’autres, relégué loin à l’intérieur des journaux parisiens. Patrice Alègre est un tueur condamné en 2002 à vingt-deux ans de réclusion pour plusieurs homicides et viols. Mais, en Haute-Garonne, des gendarmes (la cellule " Homicide 31 "), persuadés que toute la lumière n’a pas été faite sur son parcours criminel, ont rouvert le dossier. Dans son numéro du 12 mai 2003, Marianne [2] présente les résultats de leurs investigations, en particulier de récentes " révélations " faites par une prostituée. Elle met en cause des policiers toulousains, et un magistrat qui " serait au courant de leurs agissements : le système de corruption, mais aussi des parties "fines" organisées en présence d’au moins deux avocats toulousains et autres notables ". Et l’hebdo continue : " dans l’emballement, le nom du maire de Toulouse est même cité ".
On connaît la suite : dimanche 18 mai, Baudis (président du CSA) s’offre rien moins que le " 20 heures " de TF1 pour dénoncer la rumeur, une " saloperie ", une " machination "... et donne du coup à l’affaire un retentissement maximum [3].
Jean-François Kahn est décidément trop modeste...
Trois ans plus tard , Marianne célèbre son amnésie - À l’occasion de la diffusion par France 2 du téléfilm Notable donc coupable, inspiré de l’ « affaire Alègre », Marianne (6 octobre 2007) reproche au Monde de « flagelle[r] l’ensemble des médias » quant à la mise en cause de Dominique Baudis. Le Monde a écrit : « Le journalisme est tombé bien bas cet été-là. Tous les médias sont tombés dans la surenchère. » Non, réplique l’hebdomadaire, « Marianne et le Canard enchaîné ont refusé de participer au lynchage. Notre différence n’était pourtant pas passée, à l’époque, inaperçue. » Ce n’est pas en répétant un mensonge qu’il devient une vérité… (Post-scriptum du 9 octobre 2007)