– Informer sur l’Afrique : " Silence, les consommateurs d’informations ne sont pas intéressés, ou ne sont pas solvables " [*], par François Dupaquier
L’Afrique, sujet considéré comme " non vendeur " par le marché de la presse, est particulièrement mal couverte par les médias occidentaux en général, et français en particulier. L’existence sur ce continent de tragédies humaines gigantesques ne change rien à cet état de fait. Quelles sont les raisons de cette indigence, pour ne pas dire de cette désinformation ?
Depuis 1997, La République démocratique du Congo (RDC, ex-Zaïre) est le théâtre d’une guerre qui oppose d’une part le régime de Kabila (père puis fils) et ses alliés le Zimbabwe et l’Angola, d’autre part le Ruanda, l’Ouganda et accessoirement le Burundi, agissant sous le couvert de divers " mouvements rebelles ". Selon les organisations non gouvernementales (ONG) les plus dignes de foi, cette guerre de type mafieux, dont le but réel est le pillage des richesses minières du Congo-Kinshasa, a provoqué plus de trois millions de morts. Sans doute ne s’agit-il pas de morts spectaculaires et " théâtralisés " comme les victimes du choc frontal des armées éthiopienne et érythréenne parfois qualifié de " Verdun africain", mais d’un conflit d’intensité discrète. Au Congo " démocratique ", l’occupation étrangère et la prédation nationale ont fait disparaître les dernières structures d’État et surtout les réseaux alternatifs de solidarité péniblement mis en place sous l’ère Mobutu par les acteurs de la société civile. On y meurt aujourd’hui surtout de maladie, de malnutrition ou du banditisme autour de dispensaires vides de médicaments, de ports privés de trafic, d’usines en ruines ou de champs pillés et vandalisés. Ceux qui survivent, lorsqu’il s’agit de garçons, tentent d’échapper à l’enrôlement forcé. Et lorsqu’il s’agit de filles, au viol et à la prostitution.
Un désintérêt lent et inexorable
Trois millions de morts environ : face à une telle tragédie, le silence des médias occidentaux surprend. À peine une " brève ", une incidente, si l’on fait exception de la presse belge, toujours attentive au sort des anciennes colonies. En France, les vicissitudes du plus grand pays " francophone " ne font pas recette. Ce n’était pas le cas dans les années soixante, lorsque les soubresauts de l’indépendance avaient mobilisé une foule de grands reporters. À cette époque, des journalistes avaient calculé, non sans cynisme, qu’il fallait entre cent et mille morts au Congo ex-belge pour mériter la couverture médiatique de un à dix morts en Europe. Le silence devant la tragédie qui ensanglante à nouveau ce pays-continent quarante ans plus tard semble montrer que les termes de l’échange, en matière d’éthique journalistique, se sont singulièrement dégradés, parallèlement aux valeurs du commerce mondial. Un massacre d’un millier de Congolais trouvait davantage de relais journalistiques et de retentissement en 1962 que la disparition prématurée d’un million de Congolais en 2002.
Le désintérêt des médias occidentaux - et particulièrement des médias français - pour l’Afrique semble un processus lent et inexorable. Même les conflits qui couvent longtemps en multipliant les signaux d’alerte ne semblent pas capables de secouer l’apparente apathie des services " Étranger " des médias de l’Hexagone. Entre 1990 et le 06 avril 1994, l’intervention de militaires français au Ruanda ne suscite presque aucun article ou reportage télévisé (et pas une seule question écrite de parlementaire). La " surprise " du génocide de 1994 ne provoque pas davantage d’interrogations, ni de remises en cause, pas plus que l’instrumentalisation des envoyés spéciaux dans les fourgons de " l’opération Turquoise ". La raison tient-elle à la méconnaissance du public français d’un micro-État qui n’appartient pas au " pré carré africain " ? Même pas. Les mêmes causes produisent les mêmes effets en terrain connu, et plus tard.
" Ce qui s’est passé au Congo-Brazzaville entre décembre 1998 et l’automne 1999 est abominable ", rappelle François-Xavier Verschave. En l’espace de quelques mois, la guerre civile qui oppose militaires et miliciens de Pascal Lissouba et ceux de Denis-Sassou Nguesso, les uns et les autres financés par Elf, provoque la mort de quatre-vingt mille à trois cent mille Congolais. Comme au Ruanda, des violences prétendues " ethniques ", instrumentalisées par les élites, conduisent à la saignée d’un dixième de la population totale. Comme au Ruanda, l’État français ne peut dissimuler sa responsabilité dans la tragédie, ici à travers la première société privée contrôlée par l’État. À la différence du Ruanda, le Congo-Brazzaville, ancienne colonie française, " bénéficie " d’un capital d’intérêt historique et culturel de la part de l’ancienne métropole. Or, là aussi, malgré le précédent du génocide au Ruanda, des débats et des critiques qu’il a fait naître, la " couverture " médiatique de la guerre civile par les médias français apparaît d’une rare vacuité.
Au Tchad, non seulement les dérives sanglantes d’un régime " ami de la France " suscitent bien peu d’intérêt des médias français, mais les enquêtes menées par la Fédération internationale des droits de l’homme (FIDH) ou par Amnesty international trouvent difficilement un relais vers l’opinion publique. Il serait facile de multiplier les exemples. " L’industrie du divertissement, avec des best-sellers comme Loft story, captent mille fois plus d’attention que les victimes des dictatures françafricaines ", observe encore François-Xavier Verschave. Il ne faut évidemment pas généraliser et caricaturer la couverture de l’Afrique noire par les médias. Le déficit d’informations sur telle ou telle crise, telle dictature, n’empêche pas la presse écrite, la plus apte à aller au-delà d’un traitement émotionnel, " people " ou ludique de l’information, de suivre avec sérieux les développements de la crise politique à Madagascar entre le président sortant, Didier Ratsiraka, et le président autoproclamé, Marc Ravalomanana. Ou les difficultés de la Côte-d’Ivoire à asseoir un régime véritablement démocratique. Mais en règle générale, ce traitement reste trop souvent biaisé par un clin d’œil aux préjugés les moins glorieux et les mieux établis dans l’opinion publique. Aussi noble et emblématique qu’ait été la dénonciation de la menace de lapidation par un tribunal islamique de la jeune nigériane Safiya Husaini, jugée coupable d’adultère, on peut se demander si le faux suspense orchestré par les médias français ne constituait pas, par son caractère lancinant et manifestement disproportionné, une exploitation des préjugés sur la " sauvagerie africaine " et la " sauvagerie musulmane " réunies.
Une déontologie journalistique vacillante
Comme dans la littérature du xixe siècle légitimant l’aventure coloniale, cette " sauvagerie africaine " demeure un thème récurrent qui, tout à coup, mobilise les services " Étranger " des médias français, et permet enfin à des informations d’Afrique noire de trouver une place de choix dans le traitement de l’actualité. Au Zimbabwe, l’assassinat de quelques fermiers blanc et la confiscation de leurs terres provoque un afflux d’envoyés spéciaux que sans doute la seule compétition pour la présidence entre Robert Mugabe et Morgan Tsvangirai aurait difficilement provoqué. L’idée que Blancs et Noirs ne peuvent cohabiter normalement dans un pays dominé par les Noirs est plus ou moins explicitement avancée par les journalistes européens envoyés au Zimbabwe pour suivre les péripéties de l’élection présidentielle. Elle est exprimée notamment par l’envoyée du Figaro : " À Harare, une Zimbabwéenne blanche avouait hier avoir l’estomac noué. Depuis trois ans, elle attendait avec sa famille de pouvoir voter. "Je crois que je vais finalement partir", a-t-elle confié, en ajoutant, un peu honteuse : "tout bien réfléchi, je me sens plus proche des Européens que des Africains". "
" Pourquoi m’a-t-on envoyé au Ruanda ?... C’était très clair de la part de la direction : on allait là-bas pour suivre l’évacuation des ressortissants étrangers, pour être plus précis, des ressortissants français. Le but, c’était les Français, plus que les Ruandais, ce que je peux personnellement déplorer... Un des membres de la direction de l’information m’a dit avec son franc-parler habituel : "Tu fais l’évacuation des Français et puis tu rentres, on n’est pas là-bas pour faire des sujets sur les Noirs qui s’entretuent, de toute façon ça n’intéresse personne... Tu y vas, tu ne fais que ça et tu ne prends pas de risques." Voilà quel était le cadre de ma mission. " Philippe Boisserie, journaliste à la chaîne de télévision française France 2, a accepté de décrypter et de dénoncer le fonctionnement de son média face à une immense tragédie africaine. Il ne sera pas le seul. Patrick Robert, de l’agence Sygma, qui se trouvait également à Kigali, le 09 avril 1994, rapporte les consignes entendues par ses confrères américains à qui leur rédaction ordonne de rentrer : " Too dangerous, not enough interest... deep Africa, you know, middle of nowhere " [" trop dangereux, pas assez intéressant... l’Afrique profonde, tu vois... le milieu de nulle part "].
Le génocide de 1994 et les autres tragédies de la région des Grands Lacs constituent un bon révélateur de la gestion de l’information des médias français confrontés à une actualité africaine qui semble n’exister à leurs yeux que dans le registre de la guerre, de l’horreur, de l’hécatombe. Et surtout lorsque la vie de Blancs est menacée. La guerre civile et la famine en Somalie un an plus tôt avait déjà révélé le fossé d’égoïsme et d’incompréhension : " Aux membre de Médecins sans frontières venus lui dire la gravité de événements en cours dans ce pays, un responsable de l’information d’une grande chaîne de télévision répondit en substance que les téléspectateurs étaient las de ces drames africains, désespérément semblables en eux-mêmes au fil des années ", raconte Rony Brauman, fondateur de MSF.
On peut discerner dans la structure même des médias français bien des raisons aux carences ou aux insuffisances, y compris déontologiques, de la " couverture " des pays d’Afrique noire. Les " spécialistes-Afrique " y sont peu nombreux, généralement bien installés dans des réseaux qui confortent leur position, peu exposés à la critique des lecteurs-auditeurs-télespectateurs, parfois liés à des services de renseignement, quelquefois aussi franchement corrompus ou incompétents. Le mauritanien Abdallah Ahmedou Ould, représentant spécial du secrétaire général des Nations unies au Burundi de novembre 1993 à octobre 1995, a été l’un des spectateurs privilégiés de l’attitude et du raisonnement des journalistes occidentaux dans un pays qui focalisait l’attention : " On arrive toujours quelque part avec des préjugés. En Afrique, surtout lorsqu’il y a crise, les journalistes néophytes ont la conviction de débarquer dans des pays arriérés, violents, peuplés d’incompétents et de sauvages ".
Une autocensure commerciale
Cependant, ce ne sont pas les insuffisances déontologiques, le conformisme ou les préjugés des journalistes qui suffisent à expliquer la marginalisation de l’information sur l’Afrique noire dans les médias " grand public ". Pour comprendre cette situation, il faut identifier la nature même de l’information : loin de constituer une pure " valeur éthique ", comme le laisse entendre le mythe fondateur du journalisme, l’information est une " valeur marchande ", un produit à la fois intellectuel et industriel. Et comme tout produit, l’information est à la recherche d’un marché solvable qui lui permette de trouver preneur. En Afrique noire, l’absence d’un nombre suffisant de consommateurs d’informations prêts à en payer le prix condamne le produit grand public " information française sur l’Afrique noire " soit à s’installer aux franges de l’État (Radio France internationale), soit à survaloriser le sensationnalisme et en général tout ce qui peut attirer l’attention de consommateurs d’information français par ailleurs sevrés de nouvelles domestiques politiques, culturelles, pratiques, économiques etc. Cette remarque choquera sans doute nombre de journalistes français ou étrangers qui refusent généralement de se reconnaître comme les agents d’un marché. " Dans leurs grande majorité, les journalistes se refusent à être assimilés à ces catégories diverses de communicateurs auxquels ils reprochent essentiellement de s’être mis "au service du diable", c’est-à-dire d’entreprises recherchant explicitement le profit économique (et/ou le pouvoir politique) ", observent des analystes universitaires.
Sans doute les journalistes sont-ils, parmi les " acteurs engagés dans l’action " définis par Durkheim, les derniers à appliquer le principe que leur suggère le père de la sociologie : " Apercevoir les causes qui les font agir ". Mais leur libre arbitre, le libre choix des sujets, qui constituent les postulats de base de la profession, sont battus en brèche dans l’exercice professionnel quotidien. Un média est une entreprise commerciale soumise aux lois du marché. Le choix du sujet et surtout son acceptation par la hiérarchie du média, qui conditionnent le temps et l’argent alloués au journaliste, s’inscrivent dans un projet commercial global de réponse au marché. " Les journalistes choisissent les sujets qui selon eux, intéressent le public. Il y a ici une dimension commerciale ", reconnaît Thomas Ferenzi.
Pour avoir lui-même proposé à de nombreuses reprises des sujets sur l’Afrique dans différents médias, notamment Le Quotidien de Paris puis L’Événement du jeudi, l’auteur s’est vu répondre : br>
- ça n’intéresse pas le public français ; br>
- le reportage coûte trop cher ; br>
- il faudrait profiter d’un voyage de presse pour aller là-bas ; br>
- il faut trouver un angle qui intéresse les Français, par exemple ce que ça leur coûte en impôts ; br>
- il faut qu’on puisse mettre le mot " France " dans le titre, etc.
La frilosité des rédactions dès lors qu’il s’agit d’évoquer un sujet concernant l’Afrique noire s’inscrit sans doute dans le phénomène de mimétisme et de " politiquement correct " qui marque les médias français, par ailleurs décrit et analysé par bien des auteurs. Mais elle trouve surtout son origine dans la volonté d’adéquation du " produit-média " au marché. Au risque une nouvelle fois de choquer nos confrères en s’attaquant aux mythes fondateurs de la profession, observons que l’éthique, considérée par les journalistes comme une valeur sacrée, apparaît de plus en plus souvent comme la réponse à une exigence du marché (l’adéquation à l’éthique des consommateurs). Les mêmes journalistes qui ont intériorisé l’exigence américaine de ne pas montrer les restes humains des victimes du 11 septembre et qui se font gloire " de ne pas avoir zoomé sur les gens qui se jetaient des fenêtres du World trade center " n’ont jamais hésité à montrer des gros plans de cadavres produits par des tragédies africaines. Après le génocide du Ruanda, un marché européen de l’édition peu préoccupé de la pudeur des Noirs a ainsi multiplié les albums présentant des cadavres dans tous les états de la putréfaction. Seul l’aveuglement peut empêcher des journalistes de reconnaître la vacuité des mythes professionnels sur l’autonomie de la déontologie et le libre choix des sujets. " Je n’ai plus la même vision de l’information. Avant, je voyais ça comme un travail créatif, et puis... et maintenant je le vis plus comme une prestation qui a un caractère quelque peu commercial ", reconnaît honnêtement une jeune journaliste interrogée par des universitaires.
L’adéquation du " produit-médias " au marché a été considérablement renforcée au cours des dix dernière années par la mondialisation, qui impose une norme standard destinée aux seuls consommateurs solvables, et qui offre aussi aux producteurs de masse des instruments d’analyse de plus en plus précis. Il y a trente ou quarante ans, le gestionnaire d’un grand média devait très largement se fier à son instinct pour deviner les attentes de son public et y répondre. Dans le jeu du pouvoir au sein d’une rédaction, il était plus facile d’avancer des " arguments éthiques " pour obtenir des sujets sur l’Afrique. Aujourd’hui, les instruments de mesure des attentes des lecteurs-auditeurs-téléspectateurs français ont largement démontré qu’une " couverture " sur l’Afrique noire était généralement contre-productive en terme d’audience. " Les médias de grande diffusion ne sont pas nécessairement des producteurs d’informations accomplissant une mission de service public consistant à informer honnêtement les citoyens. Ce sont aussi des entreprises économiques [...] et qui, du même coup, sont tentées en permanence de sacrifier un hypothétique "devoir d’information impartial" aux passions politiques et, surtout aujourd’hui, à l’appât du gain en fabriquant sur mesure, à partir d’études de marché, l’information que le public demande ".
En Afrique, des consommateurs peu solvables attirent des produits d’importation de masse ou des services peu performants, voire gravement défectueux : cigarettes chargées en nicotine et en goudrons, véhicules d’occasion rejetés par les contrôles techniques des pays développés, médicaments ou aliments périmés, etc. Il en va de même de l’information importée sur l’Afrique noire, où l’influence des consommateurs ne permet pas d’assainir le marché. Le continent noir y est plus souvent objet que sujet de la " couverture " journalistique européenne, et le marché local de l’information, pourtant en pleine effervescence depuis l’instauration un peu partout du multipartisme, reste souvent traité avec arrogance par les médias français.
Du missionnaire à l’humanitaire
Un autre avatar du manque de solvabilité du marché africain de l’information importée est l’émergence du " journalisme humanitaire ". De même que " l’action humanitaire " est trop souvent devenue en Afrique le masque du renoncement politique et diplomatique des États riches, le " journalisme humanitaire " traduit à sa façon la déqualification des règles du marché global de l’information qui vise en principe à expliquer et à rendre lisible la réalité (au sens propre, à " donner une forme " à l’actualité), pour en faire un simple marché de la sensiblerie et de l’émotion. Rony Brauman a ainsi pu décrire " la véritable dramaturgie télévisée de l’humanitaire qui commence à apparaître, avec ses personnages emblématiques, ses conventions scéniques, ses règles de langage. [...] Si cette nouvelle forme d’action humanitaire, faite de coups d’éclat et de coups de gueule, de médecine d’urgence et d’engagement physique, semble faite pour le journal télévisé, c’est que l’une et l’autre fonctionnent avant tout sur le registre de l’émotion et de l’immédiateté. Le spectacle offert par un convoi de vivres en route vers des affamés, par un médecin penché sur son blessé, toutes causes politiques étant égales par ailleurs, est comme taillé sur mesure pour le petit écran qu’elles emplissent d’une " signification pure, pleine et ronde, à la façon d’une nature " (Roland Barthes). Rapide, simple, concrète, du moins en comparaison avec le traitement politique de problèmes exotiques, l’action humanitaire excelle à se présenter sous une forme aisément accessible et immédiatement valorisante : le tandem victime-secouriste est ainsi devenue, sous l’objectif des caméras, l’un des emblèmes de cette fin de siècle. "
La mise en scène médiatique des crises en Afrique noire s’inscrit dans l’intérêt à courte vue des journalistes mais, surtout dans le cadre d’un marché défaillant et sous le label désormais ressassé des " catastrophes humanitaires ". À mesure que s’éloigne l’épisode colonial, la sensibilité impérialiste et romantique des nations européennes s’émousse, et leur intérêt pour les nations africaines tend à se banaliser. Un égoïsme latent ne demande qu’à resurgir, après l’abus du recours aux " sanglots de l’homme blanc ". Il est facile de présenter à un public européen relativement crédule des pays africains comme autant de sociétés en crise où règne l’impunité, où la justice est facilement mise en échec par la corruption et l’omnipotence de l’État et où " l’homme Blanc " hier missionnaire, aujourd’hui humanitaire, peut revêtir de nouveau un uniforme de sauveur. Mais cette vision surannée devrait inquiéter les médias qui s’y complaisent. Sans qu’ils s’en aperçoivent, ceux-ci s’aliènent progressivement des opinions publiques en formation et en voie de solvabilisation. Les règles du marché finissent par s’imposer à tous