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« Radios associatives en danger de mort » (appel et pétition)

Nous publions ci-dessous un appel et une pétition lancés sur le site « Radios associatives en danger » [1] (suivis du communiqué d’"Infonet" n°21 daté du le 6 mars 2006. Infonet lettre électronique qui diffuse des "Informations concernant les radios associatives"). (Acrimed)

RADIOS ASSOCIATIVES EN DANGER DE MORT !
Appel à la création d’un Collectif national

 contre les tentatives de marginalisation des radios associatives par les pouvoirs publics,

 pour la défense de la liberté d’expression

Nos 600 radios associatives sont, depuis de nombreuses années, un acteur essentiel de la démocratie et du dialogue social. Mais, alors que nous allons bientôt célébrer le 100ème anniversaire de l’apparition de la radio en France, ainsi que le 25ème anniversaire de la légalisation des stations locales non commerciales, les pouvoirs publics s’apprêtent, en toute discrétion, à porter un coup qui menace d’être fatal à nombre d’entre elles.

Il y a quinze jours, le ministre de la Culture et de la Communication, par l’entremise de ses services (Direction des médias), proposait la création, tout simplement liberticide, d’une aide financière sélective accordée sur projet éditorial, pour partie en lieu et place de l’actuelle subvention de fonctionnement distribuée chaque année aux radios associatives.

Et, le 1er mars, c’était au tour de la commission des finances du Sénat, sur proposition de Claude Belot (UMP-Charente-Maritime), rapporteur spécial pour les crédits aux médias, de lui prêter son concours, en approuvant le projet ministériel et en suggérant de diriger les stations non commerciales vers davantage de publicité !

Une assignation à résidence

Les radios non commerciales sont financées, pour une large part, et depuis 1986, par un Fonds de soutien à l’expression radiophonique, selon un processus d’attribution essentiellement automatique, à l’instar de ce qui existe pour les aides à la presse écrite. Le projet de décret fixant le fonctionnement du nouveau FSER revenait à conditionner l’octroi d’une partie substantielle de la subvention annuelle à l’acceptation préalable, par les pouvoirs publics, de projets éditoriaux présentés par les radios associatives.

Etant donné le délai très court pour le dépôt des dossiers de demande de subvention 2006, au plus tard le 29 avril prochain, ce nouveau décret devrait être appliqué en 2007.

Ce nouveau mode de subventionnement allait donc ouvrir la porte à l’arbitraire. En effet, nul critère d’attribution n’était défini dans le texte ministériel. En outre, il est probable que beaucoup moins de radios seraient susceptibles de bénéficier du FSER, du fait des divers interdits imposés par le projet de décret. Il y avait là une atteinte manifeste à la liberté éditoriale et, plus largement, à la liberté d’expression, principe inaliénable de toute démocratie digne de ce nom. Drôle de conception du « soutien à l’expression radiophonique »...

De la même façon, le projet de décret entendait diminuer le niveau du subventionnement. En outre, le ministère s’accordait la capacité/le droit d’exercer un contrôle au sein même des radios associatives, par l’envoi d’experts mandatés par ses soins, afin de vérifier la bonne réalisation des projets éditoriaux préalablement validés, avec la possibilité de réclamer le remboursement des sommes allouées ! Enfin, l’administration centrale se voyait accorder un délai maximal de dix mois pour traiter les demandes, son silence, à ce terme, valant refus ! Evolution singulière de la pratique administrative...

En bref, avec un tel texte, le ministère de la Communication donnait à penser qu’il entendait « assigner à résidence » un média libre (depuis la fin des années 70), exerçant une mission d’intérêt général. Il est d’ailleurs significatif que ce projet de décret ne faisait même pas référence à l’article de la loi sur la liberté de communication, qui reconnaît l’accomplissement, par nos radios, d’une « mission de communication sociale de proximité ».

Face aux premières protestations des représentants des radios non commerciales, ce projet de décret vient d’être remis en chantier. Mais les représentants des stations concernées ne sont toujours pas associés, de manière officielle et effective, à l’élaboration d’une nouvelle mouture. De plus, il apparaît essentiel que le CSA puisse, dans un avis circonstancié, se prononcer publiquement sur ce nouveau texte.

L’arme fatale de la publicité

La menace vient de ressurgir du côté de la commission du Sénat, qui demande :

 que « les subventions devraient être orientées vers des aides à projets » : c’est la stricte reprise du premier texte ministériel concernant le projet de décret ;

 qu’« il conviendrait de mieux mesurer l’audience des radios locales associatives, conformément à l’esprit de la Loi organique sur les lois de finances » : nos parlementaires semblent ignorer que nos radios s’adressent, en bonne partie, à des auditeurs engagés dans la vie civile, sur les plans social, culturel, éducatif, et/ou économique ; le critère d’audience pure n’a donc pas de véritable sens. En tout état de cause, quels que soient nos projets éditoriaux, nous n’entendons pas vendre à quiconque des parts de cerveaux disponibles... ;

 que « le plafond de 20 % de ressources publicitaires pour bénéficier des aides pourrait être rehaussé, afin d’encourager la diversification des ressources des radios locales » : ce sont les médias commerciaux, qui alimentent le FSER par le versement d’une taxe (nous ne prenons rien dans la poche de l’Etat et, donc, des contribuables), qui vont être contents !!!

Appel à un front uni

C’est la première fois que l’Etat tente ainsi de s’immiscer dans le contenu éditorial des radios libres. Il s’agit là d’une intolérable dérive qui, si nous la laissions passer, ferait partie de toute une série de mesures liberticides, tant vis-à-vis des radios associatives que de la presse en général, ainsi que des associations et du secteur culturel dans son ensemble.

Ces tentatives interviennent, en outre, dans un contexte de forte morosité. De lourdes incertitudes pèsent, depuis 2004, sur le financement des radios associatives (retards jusqu’à plus de six mois dans le versement de la subvention nationale de fonctionnement ; disparition de plusieurs aides à l’emploi). Elles affectent leur vie quotidienne et menacent leur avenir. Certaines stations révisent leurs projets à la baisse et réduisent leur personnel, au détriment de la « défense et illustration » des initiatives locales des acteurs sociaux, culturels et économiques. Et au grand désarroi des collectivités locales, pleinement convaincues de l’immense apport de ces opérateurs associatifs.

C’est donc à la mobilisation générale et à la constitution d’un vaste front uni que nous appelons aujourd’hui.

Ce Collectif national se doit de regrouper l’ensemble des organisations radiophoniques associatives, nationales et régionales, ainsi que toutes les forces vives : élus, médias, associations, syndicats, partis politiques, artistes, acteurs culturels, sociaux et auditeurs de nos stations,

Pour que vivent nos radios libres, sans lesquelles l’expression citoyenne serait, en bonne part, muette !

 Signer la pétition sur le site « Radios associatives en danger »[lien périmé, mars 2010]

Premiers Signataires :

FRAdIF/Fédération des radios associatives d’Ile-de-France (Aligre FM, Vivre FM, RGB, Radio Campus Paris, Fréquence Paris Plurielle, Radio Triangle, Radio Trousseau, Alternatives FM, RDC, IDFM, Radio Soleil, EvryOne, Handi FM, RVE, Marmite FM, Vallée FM, Radio Libertaire, Radio Mamgembo, Radio Latitude, Radio Air libre, Fréquences libres, Radio CBE, Radio Pulsar, Plato Radio,Association Inno (lien périmé), Holy Curse (lien périmé - novembre 2013, Tv Bruits Toulouse, The Out Burst

Acrimed a évidemment signé.


Fonds de soutien à l’expression radiophonique Danger !
(Infonet" n°21 daté du le 6 mars 2006)

Le 1er mars dernier, le Sénat publiait un communiqué présentant une enquête de la Cour des comptes demandée par la commission des finances du Sénat, présidée par Jean Arthuis (UC-UDF, Mayenne), qui a donné lieu à une audition, ouverte aux membres de la commission des affaires culturelles.

Lors de cette séance, les sénateurs se sont félicités du bilan positif du Fonds de soutien à l’expression radiophonique (Fser), qui a aidé près de 600 radios en 2005. On y a appris que la direction générale des impôts du ministère de l’économie, des finances et de l’industrie n’avait pas noté de phénomène d’évasion fiscale à la taxe alimentant le Fser, due par les régies publicitaires des télévisions et des radios.

A la veille du vingt-cinquième anniversaire de la libération des ondes, la commission des finances du Sénat propose une réforme du Fser qui pourrait avoir des conséquences dramatiques pour le tiers secteur radiophonique et, plus généralement, pour l’ensemble des radios associatives.

Les sénateurs ont bien compris que ces radios ne pouvaient pas vivre et remplir sérieusement leurs missions avec l’actuel montant distribué par le Fonds de soutien. D’ailleurs, voilà longtemps que les radios en réclament une augmentation significative. La réponse des sénateurs est toute autre. Ils proposent les trois mesures suivantes.

Les propositions des sénateurs

1 - « Alors que les aides du Fser sont actuellement versées de manière quasi automatique, les subventions devraient être orientées vers des aides à projets. »

S’il s’agissait de créer une nouvelle subvention pour financer des aides à projets, cette mesure serait discutable. Mais dans la mesure où elle viendrait en déduction des dotations actuelles, elle apporterait une difficulté supplémentaire (augmentation des missions et de la charge de travail) en diminuant ou en déstabilisant les moyens (il faudrait que chaque année elles aient de nouveaux projets, l’essentiel de la subvention ne serait plus automatique). De plus, l’analyse des projets est une démarche beaucoup plus subjective, qui pourrait provoquer une élimination de certaines radios pour délit d’opinion. Ce serait la commission, dans laquelle l’Etat est majoritaire, et in fine le ministre de la Culture et de la Communication, qui décideraient quels seraient les bons projets à soutenir. Cette mesure accroîtrait donc de manière insupportable le contrôle idéologique et politique sur les programmes.
Notons que, dans le système actuel, la subvention principale peut-être augmentée de 60%, selon des critères de bonification qui renvoient au contenu des programmes et au mode de gestion de la radio. En outre, le Gip Epra achète des émissions aux radios sur les thématiques du Fasild. On possède déjà un certain nombre d’outils pour agir sur la qualité des programmes ; il vaut mieux les renforcer et enrichir ce qui existe, plutôt que de risquer de tout détruire, en introduisant une réforme qui affaiblirait l’ensemble du système, sans l’améliorer.

2- « Il conviendrait de mieux mesurer l’audience des radios locales, conformément à l’esprit de la loi organique du 1er août 2001 relative aux lois de finances (LOLF). »

Une vaste enquête sur l’audience des radios associatives, à condition que ce soit en qualité et en quantité, ne peut que rencontrer l’approbation générale. Les questions qui se posent sont : dans quel but, qui va la réaliser et comment ? Actuellement, les sondages d’opinion concernant les radios ont pour but de mesurer l’impact des messages publicitaires sur leurs auditeurs. C’est la raison pour laquelle celles qui ne font pas de pub sont systématiquement ignorées ou minorées. Une telle enquête devrait donc porter prioritairement sur l’étude de l’utilité sociale des radios associatives de proximité et, pour cela, il faudrait mettre au point un protocole qui se fixe cet objectif. Mais, apparemment, ce n’est pas dans ce but que les sénateurs énoncent leur proposition.

3 - « Le plafond de 20% de ressources publicitaires pour bénéficier des aides pourrait être rehaussé, afin d’encourager la diversification des ressources des radios locales. »

Cette proposition éclaire parfaitement la démarche de nos sénateurs : on diminue le flux des aides publiques, en le fragilisant, et on augmente la pression commerciale. Le tiers secteur audiovisuel ne veut pas être livré aux commerçants et aux financiers. Le refus de la publicité n’est pas une lubie d’opérateurs marginaux, c’est un véritable choix éthique. Si on veut améliorer la pluralité de l’offre dans l’univers médiatique, il faut renforcer le tiers secteur et donc renforcer sa capacité à échapper à l’étreinte commerciale. Dans le domaine des annonces payantes, il existe pourtant déjà une possibilité qui n’a jamais été explorée par les pouvoirs publics, malgré les demandes répétées des organisations de radios. L’article 80 de la loi du 30 septembre 1986 dit la chose suivante :

« Les services de radio par voie hertzienne mentionnés au quatorzième alinéa de l’article 29, lorsque leurs ressources commerciales provenant de messages diffusés à l’antenne et présentant le caractère de publicité de marque ou de parrainage sont inférieures à 20 p. 100 de leur chiffre d’affaires total bénéficient d’une aide selon des modalités fixées par décret en Conseil d’Etat.

Le financement de cette aide est assuré par un prélèvement sur les ressources provenant de la publicité diffusée par voie de radio et de télévision.

La rémunération perçue par les services de radio par voie hertzienne lors de la diffusion de messages destinés à soutenir des actions collectives ou d’intérêt général n’est pas prise en compte pour la détermination du seuil visé à l’alinéa premier du présent article.

Ce dernier alinéa autorise indiscutablement les radios associatives, bénéficiant du fonds de soutien, à diffuser sans limite les messages d’intérêt collectif ou général. Or, l’Etat n’a jamais mis en place les dispositifs leur permettant d’y avoir accès. Ces messages ou campagnes (contre le tabagisme, contre le sida, pour la parité, contre les accidents de la route, etc.) sont systématiquement attribués à des régies publicitaires, qui ne font jamais appel à des radios non commerciales pour leur diffusion. Si les sénateurs voulaient faire œuvre utile en faveur du secteur non commercial, ils proposeraient d’imposer à toute campagne d’intérêt public de réserver une partie de leur diffusion au tiers secteur audiovisuel.

Le Fser aujourd’hui

Enfin, la Direction du développement des médias (Ddm) prépare actuellement un décret en vue d’une réforme du Fser, sur la base des observations formulées par la Cour des comptes, tendant notamment à instituer des aides à projets. Les radios doivent s’emparer de cette question, pour ne pas laisser à des gens, nommés par le ministre de la Culture et de la communication, et non pas choisis par elles, le soin de négocier les termes du nouveau décret, et donc de décider en leur nom de leur avenir. En ce sens, l’idée de la Fédération des radios associatives d’Ile-de-France (Fradif) de créer une coordination de tous les organismes de radios associatives pour la défense et l’amélioration du Fser va dans le bon sens. Cette fédération a lancé une pétition qu’on peut signer en ligne [lien périmé, mars 2010].

Ce fameux nouveau décret ne sera pas effectif avant 2007. Les textes fixant les modalités de constitution du dossier 2006 seront conformes à ceux de 2005. Ajoutons qu’actuellement les radios attendent toujours leurs bonifications 2005. Pourtant l’argent est là, il manque simplement le personnel suffisant pour distribuer ces subventions dans un délai raisonnable, et au moins dans l’année correspondant au dépôt du dossier.

La mobilisation

Le tiers secteur médiatique se réunira à Marseille les 5, 6, 7 et 8 mai prochains, dans le cadre des « Etats généraux pour une information et des médias pluralistes ». Ce sera l’occasion de réfléchir ensemble et de faire des propositions pour garantir un financement suffisant et pérenne de nos médias.

Jacques Soncin
Président de l’Association pour la Coopération des radios libres (Corali)
Responsable de publication de Fréquences libres et de l’Infonet
Président de Fréquence Paris Plurielle (Fpp)

 
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Notes

[1Qui n’existe plus (note du 12 mars 2010).

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