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Un banal exercice de sarkojournalisme sur France3 Alsace

par Stanislas,

Vendredi 24 novembre 2006, Nicolas Sarkozy est en visite dans le Haut-Rhin, à Mulhouse et Colmar plus précisément. Évidemment, France 3 Alsace a couvert cette visite ministérielle ... à sa façon.

En ouverture, ce titre à l’écran : « Sarkozy en campagne », avec ce commentaire en voix off : « Nicolas Sarkozy était dans le Haut-Rhin aujourd’hui ; nos équipes ont suivi le ministre de l’Intérieur à Mulhouse et Colmar. ».

Le présentateur relaie aussitôt et lance un premier reportage qui commence par des images de quelques représentants des forces de l’ordre, vigilants comme il se doit, et cette annonce : « Placée sous haute sécurité, la visite de Nicolas Sarkozy n’aura pas failli à la règle qu’il s’est lui-même fixée : d’abord, aller au contact de la population, puis répondre aux attentes et aux inquiétudes des Français. » Éloge implicite qui laisse entendre qu’une tentative (ou un simulacre) de réponse équivaut à une réponse effective.

Résumé du «  contact avec la population  »  : « Ce midi, durant une heure dans le quartier Drouot [Mulhouse], il a écouté des jeunes, des acteurs sociaux et des mères de famille, avant de signer quatre conventions sur l’insertion des jeunes, la protection des femmes, l’éducation, répondant au passage à Ségolène Royal. » Quelle réponse ? On voit et entend Sarkozy soutenir l’idée d’études encadrées à organiser au Collège en fin de journée. En quoi est-ce une réponse à Ségolène Royal (qui propose une mesure semblable) ? Mystère...

Suit alors une mise en mots d’un consensus régional autour de Sarkozy : le ministre s’est rendu à « l’invitation de son ami Jean-Marie Bockel [sénateur-maire PS de Mulhouse], avec lequel il partage certaines idées mais pas la même carte de parti », pour signer un partenariat intercommunal de prévention et de sécurité. Et, précise le commentaire, « presque tous les élus du Département étaient présents ».

À nouveau, extrait de l’allocution du ministre : « on parle beaucoup des droits, moi j’aimerais qu’on parle des devoirs [...] ». Sans attendre, rendons-nous immédiatement à Colmar, pour la deuxième partie de la visite, Colmar où le « chef de l’UMP  » a pu entre autres aller à l’ouverture avancée spécialement pour l’occasion du marché de Noël, « un cadeau de Gilbert Meyer [maire UMP de la ville], en attendant un plus beau ... » Comme c’est touchant ! On précise au passage qu’unanimement, ou presque, on est « séduit par le personnage, même si quelques opposants ont soigneusement été tenus à l’écart ».

Après plus de deux minutes de reportage, retour studio, le présentateur officie à nouveau : « Et avant de profiter des faveurs des commerçants du marché de Noël, Nicolas a inauguré le nouveau commissariat de Colmar [...] ». Nicolas, tout simplement...

On peut se perdre en conjectures : enthousiasme mal contenu, lapsus provoqué par l’émotion de couvrir un tel événement, ou au contraire un brin d’ironie mal refoulé inspirée par le personnage du « petit Nicolas » créé par Sempé ? Toujours est-il que l’impression demeure d’une connivence poussée entre le ministre-candidat et les journalistes chargés de le suivre ce jour-là ...

Après ce haut fait d’armes journalistique, le présentateur résume l’annonce d’une décision de hausse d’effectifs de policiers (à Mulhouse et Colmar).

Enfin un dernier « plateau » en direct de Colmar permet de diffuser la réaction (enregistrée dans la journée) du ministre suite aux événements violents et tragiques consécutifs à un match de football au Parc des Princes et au journaliste présent sur place de s’appesantir quelque peu sur le sens de cette escapade ministérielle : visiblement autant (si ce n’est plus) celle d’un candidat qui « bat la campagne » que celle du Ministre de l’Intérieur.

Bilan : presque 5 minutes consacrées à cette visite, présentée sans recul ni nuance digne de ce nom (les opposants colmariens n’ayant été évoqués que tout à fait incidemment), pour un JT régional que le site Internet de France 3 chronomètre officiellement à 11 minutes et 31 secondes (générique compris). Le ministre a été bien servi.

Stanislas

PS. Merci à Régis P. qui nous alertés sur l’existence de ce bijou.

 
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