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PRESIDENTIELLE 2007

Brèves de campagne (1) : Intimité, équité, inspiration, sondages

Les hauts faits et les bas-côtés d’un traitement médiatique exemplaire (forcément...). Quelques brèves informations qui en disent plus long qu’il n’y paraît.

Un tout petit monde

Connaissait-il ou non les questions que le panel allait lui poser ? La prestation de Nicolas Sarkozy lors de l’émission « J’ai une question à vous poser », diffusée lundi 5 février sur TF1, a suscité de nombreux commentaires. François Bayrou s’est ainsi déclaré « infiniment choqué » (Le Monde du 11.02.2007). Choqué parce que la production du programme était en partie assurée par Dominique Ambiel, ancien conseiller pour la communication de Jean-Pierre Raffarin à Matignon. Choquant peut-être mais guère surprenant. Comme le notait Le Canard Enchaîné du 24 janvier : « Après tout, le proprio de la chaîne, Martin Bouygues, est déjà un ami de trente ans de Sarko ; l’épouse du patron de l’info Robert Namias, Anne Barrère, est la conseillère de Bernadette Chirac ; quant au fiston du patron de LCI Jean-Claude Dassier, le jeune Arnaud, il est le conseiller Internet de l’UMP. Et pourtant personne n’a jamais douté de l’impartialité de TF1... »

Ceux qui doutent peuvent se rassurer en se rappelant que le CSA veille au pluralisme dans la campagne... CSA, dont le nouveau président, Michel Boyon (nommé le 24 janvier 2007), est, comme M. Ambiel, un ancien du cabinet Raffarin. Il en était le directeur comme il fut « directeur de cabinet de François Léotard au ministère de la Culture et de la Communication, où il fut l’un des principaux concepteurs de la loi Léotard qui aboutit à la privatisation de TF1 [1]. » On ne peut rien conclure a priori de ces liens. Mais on doit s’interroger sur l’indépendance revendiquée en permanence par les journalistes comme par les membres du CSA au sein de ce qui se révèle être un tout petit monde....

Une surreprésentation des petits candidats ?

Impartialité et respect de « l’équité ». Pour le second volet de « J’ai une question à vous poser », la chaîne du groupe Bouygues recevait : « Jean-Marie Le Pen (FN) pour plus d’une heure, Marie-George Buffet (PCF) 30 minutes, Philippe de Villiers (MPF) et Olivier Besancenot (LCR), 20 minutes. Les temps de parole on été répartis selon la règle de " l’équité ", instituée par le Conseil supérieur de l’audiovisuel (CSA), explique la direction de TF1. "Nous avons même été plus loin car les petits candidats on été surreprésentés" précise François Bachy, rédacteur en chef du service politique. » (Le Monde du 14.02.2007) Diantre ! La rédaction de TF1 va-t-elle trop loin ?

Olivier Besancenot a été interviewé le 13 février 2007 sur RTL par Jean-Michel Apathie. Vingt questions, vingt questions politiciennes, pas une question de politique [2]...

Elkabbach cherche l’inspiration

L’expérience ne cesse de bonifier Jean-Pierre Elkabbach... à qui il peut encore arriver de s’emmêler les pinceaux. Exemple lors de sa récente interview de Jean-Louis Bianco (le 28.01.2007, sur Europe 1). Une transcription offerte par Le Plan B qui la publie dans son numéro 6 (février 2007) - Une version sonore offerte par un ingénieur du son d’Acrimed.

- Jean-Louis Bianco - On ne peut pas prendre les mots de Jaurès pour faire la politique de Thatcher !
- Jean-Pierre Elkabbach (JPE)- Oui mais pourquoi ? Il y a une histoire qui appartient aux uns... Même l’histoire, il faut la découper ?
- JLB - Jaurès appartient à tout le monde. Par contre, c’est mensonger de mettre en avant Jaurès quand on veut favoriser les plus riches !
- JPE - Mais par exemple, Mitterrand pouvait parler de Maurras, de Chardonne, etc. De la gauche, de Blum...
- JLB - Tout le monde a droit de parler de tout le monde, mais pas dans le même discours, où on avance une politique. D’ailleurs, Franck Tapiro, vous le savez, le conseiller en communication, l’un des nombreux conseillers en communication de Monsieur Sarkozy, a dévoilé la chose. Dans un blog, il a dit : " il ne faut pas " karchériser " la France, il faut " thatchériser " la France ". Voilà le programme !
- JPE - Oui mais enfin, notre inspirateur, ce n’est pas Monsieur...
- JLB - C’est l’inspirateur...
- JPE - Comment il s’appelle ?
- JLB - Tapiro !
- JPE - Non, ce n’est pas notre inspirateur.
- JLB - Mais pourquoi vous dites " notre inspirateur " ?
- JPE - Ce n’est pas nos... nos... On n’a pas besoin ...
- JLB - Vous n’êtes pas de l’UMP, Jean-Pierre Elkabbach !
- JPE - Non, non, ni à l’UMP, ni...
- JLB - " Notre " inspirateur, je me demande de qui vous parlez, là...
- JPE - Non ... Au nom de qui ? Au nom de tous ceux qui font la presse, etc.

C’est encore plus agréable à entendre.

Un lapsus ? Le président d’Europe 1 et de Public Sénat est coutumier des aveux plus ou moins volontaires. Le 8 février 2005, lors de la campagne référendaire, il lâcha ainsi « Moi, je suis pour le "oui", je ne devrais pas le dire, mais je suis pour le "oui". Mais je suis objectif [3] ! »

« C’est pas la peine de se creuser les méninges » !

Le 18 janvier 2007, certains auditeurs de France Inter ont pu penser que l’imitateur Gérald Dahan s’était amusé à imiter Jean-Marc Sylvestre. A force de clichés et de caricatures, la chronique de ce dernier faisait penser à un pastiche. S’appropriant les conclusions des récents travaux du Cercle des économistes (« des universitaires de droite comme de gauche »), de l’Institut de l’entreprise (« un groupe de réflexion patronal ») et celles de « beaucoup d’autres contributions », il se réjouissait : « Ce qui est intéressant c’est que toutes ces contributions vont finalement dans le même sens et disent en gros la même chose. (...) Ces contributions décrivent une France bloquée (...) d’où les élites ont tendance à s’en aller. C’est un diagnostic partagé par tout le monde et ça on le connaît depuis des mois, j’allais dire des années. (...) Toutes ces contributions rappellent qu’il y a des contraintes incontournables et elles disent que c’est complètement inutile de débattre sur ces contraintes, on n’y échappe pas. C’est pas la peine de se creuser les méninges, de dépenser de l’énergie pour ça, il vaut mieux s’y adapter. » S’adapter à la mondialisation, au vieillissement démographique et à « des contraintes institutionnelles sur lesquelles il n’est pas utile d’essayer de revenir. Exemple (...) : c’est la Banque Centrale Européenne indépendante, elle est installée pour presque 50 ans ! (...) C’est un sujet de débat mais c’est un débat stérile. (...)Toutes ces contributions débouchent sur des réformes à faire qui elles sont possibles : réforme du droit du travail, de la fiscalité, de l’université. (...) Y a des nuances à droite, y a des nuances à gauche mais grosso modo tout le monde est d’accord sur la nécessité de les faire. (...) Si la France ne les engage pas et bien elle va se vider. Et si elle se vide et bien dans dix ans ou dans vingt ans, elle se transformera en un camp de vacances réservé aux étrangers riches. » Comme un condensé du journalisme économique visant à encadrer le « débat » politique depuis le début de la campagne présidentielle [4].

Et les sondages...

« La banlieue vote Sarko » pour 20 minutes. Le 4 février 2007, sous ce titre, on pouvait lire un article se fondant sur les résultats d’un sondage BVA... qui semblent contredire 20 minutes puisque : « 27% [des sondés] assurent que le patron de l’UMP, Nicolas Sarkozy, est celui " qui prend en compte le mieux les problèmes des banlieues " contre 23% pour Ségolène Royal. Mais, quand on leur demande s’ils voteront à droite ou à gauche, alors à 45% ils répondent à gauche, contre 19% pour la droite. [5]  »

Le « sondage » Internet le plus ballot de la semaine :

Le Monde.fr vous demande « Votre avis » et présente cela comme un sondage.
Et ça donne par exemple :
« Du programme présidentiel de Ségolène Royal ou Nicolas Sarkozy, lequel aujourd’hui vous paraît le plus coûteux. Celui de
- Ségolène Royal
- Nicolas Sarkozy
- Autant l’un que l’autre
- Sans opinion »

 
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Notes

[1L’Humanité, le 25 novembre 1995.

[2L’interview est disponible sur le site de RTL.

[3Serge Halimi, Les Nouveaux chiens de garde, nouvelle édition actualisée et augmentée, éditions Raisons d’agir, pp. 45-46.

[5C’est nous qui soulignons.

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