Les photographes de l’agence ont découvert que l’AFP propose à ses clients des photos, truquées, provenant d’une agence de photo publicitaire, l’agence ZOOM. Il s’agit de photos concernant la coupe de monde de ski prises par des photographes de l’agence ZOOM, retouchées - le fond de neige et de sapins étant effacé par un grand aplat noir, jugé plus « esthétique » -, directement saisies par les commerciaux du service photo de l’AFP sur le site GETTY, et proposées aux clients sans aucun contrôle rédactionnel. Il faut signaler qu’un photographe de l’agence couvrait cet évènement sportif.
ZOOM est une agence de photographes -non journalistes- travaillant pour la fédération française de ski et des fabricants, comme Rossignol ou Salomon, et qui se fait diffuser par GETTY images. L’AFP ayant elle aussi un accord avec GETTY, il semble que la direction Photo en déduise que l’AFP peut diffuser impunément des photos de ZOOM, ce qu’ignorent les photographes de cette agence.
Cela fait suite à plusieurs autres dérives : la vente de photo à Marine Le Pen en ignorant superbement le droit moral des photographes [1], la demande, par la direction, de photos de candidats aux régionales où le candidat choisit lui-même le lieu et le thème de la photo (journalisme ou communication ?), à un reportage publicitaire pour EDF... Sans oublier la première grave dérive qu’a constitué l’achat à un trafiquant de drogue de photos de Sid Ahmed Rezala, dans sa cellule, et dont la publication avait gravement nuit à l’image professionnelle de l’AFP à l’époque.
Mais la direction photo ne s’embarrasse pas de considérants professionnels quand il s’agit de faire du fric à tout prix. Mise en demeure de s’expliquer par les photographes sur la vente des photos de l’agence ZOOM, la direction photo persiste et signe : « l’AFP a besoin de gagner de l’argent... les clients aiment ce genre d’images... l’agence ne doit pas rater une vente... la couverture ski coûte cher sans l’EPA... il faut rentabiliser... voire pour l’avenir faire sous traiter la couverture du ski par un partenaire ».
C’est une nouvelle dérive de l’accord GETTY, qui s’ajoute aux disfonctionnements nombreux déjà constatés par les photographes de l’AFP.
C’est une preuve supplémentaire des dérives professionnelles qu’impliquent la logique de partenariats et autres délégations de couverture contenus dans le COM. Dérives auxquelles vient s’ajouter la politique des arbitrages de couverture, entre ce qui est rentable et non rentable, annoncée lors du CE du 23 décembre.
C’est la crédibilité même de l’AFP qui est de nouveau en jeu au mépris du métier de base de l’agence, la collecte et la diffusion d’informations -texte, photo, son, vidéo-. Cette logique purement mercantile contient une grave remise en cause de la mission fondamentale de l’AFP.
C’est suicidaire pour l’avenir de l’agence et, une fois de plus, il appartiendra au personnel de se mobiliser dans les plus brefs délais pour s’opposer au bradage de l’AFP en tant qu’agence mondiale d’information.
Intersyndicale CFDT, SNJ-CGT, SNJ, FO journalistes, SUD,
24 décembre 2003