Accueil > Critiques > (...) > « Indépendance » ? Sanctions et licenciements

Face à Philippe Val, Charlie Hebdo et BHL, Acrimed soutient Siné

par Grégory Rzepski,

Acrimed est solidaire du dessinateur Siné dont le congédiement de Charlie Hebdo constitue une atteinte évidente à la liberté d’expression [1] Nous reviendrons plus longuement sur cette « affaire » dans de prochaines publications. En attendant, quelques remarques incidentes [2]...

De Philippe Val, il n’y a rien à dire. Rien à dire de ses pratiques de journalistes ou de patron de presse, de ses passions éradicatrices, de sa fausse impertinence, de son goût pour le débat contradictoire ; rien à dire du moins qui n’ait déjà été écrit depuis de nombreuses années par Acrimed, PLPL, Le Plan B, CQFD ou, plus récemment, par Bakchich, Télérama ou même le site Nouvelobs.com.

Sur Bernard-Henri Lévy, il n’y a rien à ajouter. Rien à ajouter depuis trente ans que dure et perdure l’imposture. Constant dans la calomnie et l’exhibitionnisme, BHL a apporté son soutien à Philippe Val dans une tribune publiée par Le Monde daté du 22 juillet 2008. Ce n’est guère surprenant, tant leur connivence le dispute à une mutuelle aversion pour la gauche de gauche et une commune affection pour l’humanitarisme de guerre.

Il y a dire, en revanche, du Monde et de Charlie Hebdo.

Relever notamment que l’un des principaux quotidien français (après Le Parisien-Aujourd’hui et Le Figaro), sinon le plus « prestigieux », ne publie rien sur l’« affaire » pendant plusieurs jours puis accorde à BHL une tribune avec un appel de « une » évoquant sans précaution ni distance « le texte antisémite de Siné ». Une tribune truffée de procès d’intention. Un seul exemple : l’ex-nouveau philosophe écrit que Siné aurait donné « à son journal une chronique où il dit, en substance, que la conversion au judaïsme est, dans la France de Sarkozy, un moyen de réussite sociale  » quand Siné moquait l’arrivisme d’un jeune homme envisageant une conversion religieuse pour épouser une héritière.

Le « quotidien de référence » ne s’embarrasse pas non plus d’un texte aux raccourcis historiques cousus de fil blanc. Ainsi, quand l’emphase « béachélienne » s’emporte contre les « ambiguïtés d’une tradition [celle dont se revendiquerait Siné] dont une des spécialités a toujours été, justement, de passer de la rage tous azimuts à sa concentration antisémite : les anarcho-syndicalistes du début du XXe siècle ; les partisans de l’action directe proposant, soixante-dix ans plus tard, de "jeter" les Juifs sur "le fumier de l’Europe" (Ulrike Meinhoff, dirigeante de la Bande à Baader)... » Il y a vingt-sept ans, un homme de droite (Raymond Aron) diagnostiquait avec justesse le problème « BHL » : « la boursouflure du style, la prétention à trancher des mérites et des démérites des vivants et des morts, l’ambition de rappeler à un peuple amnésique la part engloutie de son passé, les citations détachées de leur contexte et interprétées arbitrairement [3].  »

La direction du Monde, pour sa part, s’accomode de la boursouflure. Tout comme celle de Charlie Hebdo. Mais son patron ne peut être tenu pour seul responsable de la capilotade dans laquelle s’est mis l’hebdomadaire. Depuis des années, le silence que se sont imposés les dessinateurs autorise Val à capter l’héritage du journal satirique pour le normaliser. Aujourd’hui, un pas est franchi. Le directeur a obtenu des principaux dignitaires du titre (Bernard Maris, directeur adjoint de la rédaction ; Gérard Biard, rédacteur en chef ; et Charb, rédacteur en chef adjoint [4]) qu’ils co-signent une « note aux lecteurs » déplorant que Siné ait porté « atteinte » aux « valeurs essentielles » de Charlie Hebdo. La même note ajoute : « Il était prévu que la rédaction [le] réprouve sobrement et qu’[il] s’en explique et s’en excuse » mais « finalement il a refusé ». Et les trois commissaires politiques de conclure : « Nous regrettons la décision de Siné. Nous regretterons aussi Siné ».

Regretterons nous Charlie Hebdo ?

Grégory Rzepski.


Annexe : d’autres articles sur Philippe Val et Charlie Hebdo.

 Philippe Val, journaliste, éditorialiste et philosophe.

- Philippe Val sur France Inter : un récital de mensonges et de calomnies contre Chomsky ;
- Philippe Val, propagateur de calomnies et docteur ès déontologies ;
- Journalisme et philosophie : un marathon médiatique de Philippe Val ;

- Un « complot » fomenté par Philippe Val et Alexandre Adler ? ;
- Philippe Val et Thierry Ardisson : « je t’aime, moi non plus » ;
- Philippe Val, défenseur des éditorialistes contre les « poujadistes » ;
- Quand Philippe Val, analyste « complexe », prétend soutenir Ingrid Betancourt ;
- Quand Charlie Hebdo et Le Monde rivalisent d’esprit libertaire.

 Philippe Val et la critique des médias

- Philippe Val : « la critique radicale des médias alliée du grand capital »
- Philippe Val, critique, stratège et ... psychiatre ;
- Tentative de suicide : Philippe Val dans l’arène de Thierry Ardisson ;
- Philippe Val recycle son éditorial purificateur sur France Inter ;
- Philippe Val, épurateur chronique ;
- Droit de réponse à Philippe Val, psychiatre, historien et patron de presse ;
- Philippe Val se charge de l’épuration de l’Observatoire français des médias

** On mentionnera aussi notre rubrique « En direct de Charlie Hebdo ».

 
Acrimed est une association qui tient à son indépendance. Nous ne recourons ni à la publicité ni aux subventions. Vous pouvez nous soutenir en faisant un don ou en adhérant à l’association.

Notes

[1Le titre de cert article - "Quand Philippe Val, Charlie Hebdo et BHL maltraitent la liberté d’expression... Acrimed soutient Siné" - a été modifié le 10 février 2009, pour le raccourcir.

[2Le site de soutien à Siné est ici.

[3Raymond Aron, « Provocation », L’Express, Paris, 7 février 1981. Cité par Serge Halimi, Le Monde diplomatique, « Deux précédents », novembre 2007.

[4Michel Polac a fait connaître son désaccord avec Philippe Val.

A la une

Médias français : qui possède quoi ?

Vous avez dit « concentrations » ? Nouvelle version de notre infographie.

Louis Sarkozy : le capital médiatique s’hérite aussi

Le journalisme politique dans sa bulle.