Amalgames et mensonges
Sans l’ombre d’une hésitation, Joffrin compare une phrase de Siné aux œuvres complètes de Drumont, Maurras ou Brasillach. Amalgame qui ne déshonore que son auteur, pâle imitateur de Val et de BHL.
Après avoir prononcé la sentence, le juge Joffrin donne la parole au procureur Joffrin qui reproche alors au dessinateur de ne pas avoir levé le « malentendu ». Ce qui est bien la preuve qu’il n’y en avait pas...
Joffrin écrit : « S’agit-il d’un malentendu ? Dans ce cas, Siné pouvait le lever dès l’origine en corrigeant ses propos. S’il ne l’a pas fait, c’est qu’il n’y a pas de malentendu. Siné pense ce qu’il écrit, il le maintient. C’est son refus de tout correctif qui a créé l’affaire. »
Joffrin ment... Joffrin ment effrontément. Car il sait que le procès en antisémitisme a été instruit publiquement par Claude Askolovitch (qui fut son subordonné au Nouvel Observateur...) et ne peut ignorer que Siné était prêt à signer un texte élaboré par un fauxconfrère à la demande de Val et qui disait ceci, d’après Marianne, qui a eu accès au document :
« Ma « Zone » d’il y a deux semaines sur Jean Sarkozy a suscité beaucoup de réactions. Je me suis fait traiter d’antisémite sur RTL, et on m’a même rapproché de ce salaud de Konk. Mes amis de Charlie se sont émus. J’ai relu… Bon, c’est vrai que ça pouvait être mal interprété… Je voulais dénoncer l’imbécillité de se convertir à une religion quelle qu’elle soit et, par ailleurs, la fascination de la famille Sarkozy pour le fric. J’ai synthétisé mon propos, et, au final, il en est resté ce qui peut être analysé comme un raccourci ambigu et condamnable. Je présente mes excuses auprès de ceux qui l’ont compris comme tel ».
S’il ne l’a finalement pas signée, c’est parce que Val, dans le même temps, faisait le tour de la rédaction pour recueillir des signatures désavouant Siné. Cette pétition devant être publiée dans Charlie, on peut comprendre que le vieil anar, en s’apercevant de cette traîtrise, se soit exclamé : « plutôt me couper les couilles que de faire des excuses ». Dans sa dernière chronique, que Val a censurée (alors que Siné n’a pas été licencié officiellement) et qui a été publiée par le nouvelobs.com, Siné revient sur cet épisode en désavouant l’attitude de « son neveu » Charb.
Joffrin ment... Joffrin ment effrontément..., lorsqu’il accuse Siné de ne pas avoir dissipé le malentendu « dès l’origine ». Pour le vérifier, il n’y a pas à aller loin. Dans son propre journal, le 17 juillet, dès le début de l’affaire donc, la journaliste de Libération Catherine Coroller remarque que :
« Siné se défend de tout antisémitisme, affirmant que si la fiancée de Jean Sarkozy "avait été la fille d’un émir", le jeune homme "se serait converti à la religion musulmane" ».
Peut-on être plus clair pour dire qu’il s’agissait bien, dans l’esprit de Siné, de pointer l’opportunisme (réel ou supposé, c’est un autre débat...) du fils Sarkozy ?
Race et racisme
Ce n’est pas tout... Le fougueux Laurent Joffrin - qui ne rate jamais une occasion de ridiculiser ceux qu’il est supposé soutenir - s’est laissé emporter par son élan et s’est sérieusement emmêlé les crayons dans sa traque du Brasillach des temps modernes en évoquant la « race » juive :
« Réprouver l’intégrisme musulman et dénoncer le pouvoir supposé des juifs ce n’est pas la même chose. On est anti-intégriste dans le premier cas, raciste dans le second. On choisit sa religion, on ne choisit pas sa race. »
Devant le tollé de nombreux lecteurs, Laurent Joffrin a alors entrepris de modifier son texte en ligne (pour la version papier, c’est trop tard). La version corrigée sur le net devient donc : « (...) attaquer une religion n’est pas attaquer une communauté. Réprouver l’intégrisme musulman et dénoncer le pouvoir supposé des juifs ce n’est pas la même chose. On est anti-intégriste dans le premier cas, raciste dans le second. ».
Avec cette explication de Laurent Joffrin :
« Note de la rédaction : br>
Plusieurs lecteurs ont été choqués par l’emploi du mot « race » dans le texte. Ce mot est mal choisi. Communauté ou origine sont plus justes. Ces termes sont utilisés dans la version du texte en ligne sur notre site. LJ »
« Race » serait donc « moins » juste ?
Ainsi donc, Joffrin peut se permettre de tenter d’effacer les traces de son dérapage par une « note » qu’il rédige lui-même au nom de la rédaction et dont on appréciera les délicats euphémismes, mais dénie le droit à Siné de préciser ce qu’il a voulu écrire. Il refuse même de voir que les explications de Siné ont déjà été données et rapportées dans son propre journal.
Mais il y a plus grave. Laurent Joffrin, dont l’ignorance est étincelante, ne sait même pas que le racisme commence avec la croyance dans l’existence même de races, au sens où ce mot est communément employé. Ce n’est donc pas un mot « mal choisi », mais le vocabulaire même des racistes.
Sur la question scientifique, on lira par exemple avec profit, sur le site Futura-sciences ce qu’en dit le généticien moléculaire Bertrand Jordan, pour qui, même si les groupes de populations humains ont une certaine réalité, il n’y a qu’une seule espèce humaine. Pour lui, « l’ancienne notion de « races » fondamentalement distinctes n’a pas de sens biologique » [1].
Quant au vocabulaire courant, force est de constater ceci : si elle est encore utilisée dans les pays anglo-saxons « la notion (de race) a pratiquement disparu du discours politique en France, à l’exception de ceux professant des théories racistes » peut-on lire dans un article de Wikipédia très documenté sur la question.
Nous n’en conclurons pas pour autant que Joffrin est raciste ou tient des propos racistes dignes de ceux de Gobineau [2]...
... Et qu’il faut d’urgence le virer de Libération.
Michel Davesnes