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L’avion disparu, l’expert et le journaliste

par Henri Maler,

Lundi 1er juin 2009. On apprend qu’un avion d’Air France de la ligne Rio-Paris a disparu avec plus de 250 passagers à bord. Accident dont on ne saurait contester le caractère tragique, même en le confrontant aux chiffres quotidiens des victimes de la faim ou de la guerre, souvent moins exposées dans les médias.

Les « catastrophes aériennes », en effet, bénéficient généralement d’une large médiatisation, surtout quand il s’agit d’un avion français, d’une compagnie française et/ou de morts français en grand nombre. Mais une médiatisation pour dire quoi et le dire comment ?

I. Un accident tragique

La place accordée à la disparition de l’avion, le contenu et les formes de son traitement médiatique confirment, s’il le fallait, que la télévision privilégie l’information spectaculaire et compassionnelle. Et cette information spectaculaire l’est d’autant plus qu’elle est délivrée en « en temps réel ».

Du lundi 1er juin au mercredi 3 juin inclus, tous les JT de TF1 et de France 2 ont accordé une place écrasante à la médiatisation de l’accident. Les chiffres parlent, partiellement, d’eux-mêmes :

Temps d’antenne


Lundi 1er juin, 13 heures
- TF1 : 14 min 16 s, pour un JT de 34 min 30 s (soit 41,5 % du total)
- France 2 : 11 min 35 s, pour un JT de 47 min 22 s (24,5 %)

Lundi 1er juin, 20 heures
- TF1 : 33 min 30 s, pour un JT de 44 min 56 s (74,5 %)
- France 2 : 33 min 23 s, pour un JT de 37 min 18 s (89 %)

Mardi 2, 13 heures
- TF1 : 21 min 10 s, pour un JT de 42 min 47 s (49,5 %)
- France 2 : 16 min 8 s, pour un JT de 36 min 53 s (43,5 %)

Mardi 2, 20 heures
- TF1 : 28 min 30 s, pour un JT de 40 min 51 s (70 %)
- France 2 : 26 min 12 s, pour un JT de 36 min 53 s (70,5 %)

Mercredi 3, 13 heures
- TF1 : 12 min 38 s, pour un JT de 44 min 18 s (28,5 %)
- France 2 : 16 min 40 s, pour un JT de 36 min 34 s (45,5 %)

Mercredi 3, 20 heures
- TF1 : 10 min, sur un JT de 35 min 25 s (28 %)
- France 2 : 22 min 50 s, pour un JT de 32 min 52 s (68,5 %)

Résultats : entre TF1 et France 2, match à peu près nul (dans les deux sens du terme), avec un léger avantage au compteur pour France 2 – service public oblige : 127 minutes consacrées, en trois jours, à l’accident, contre 120 sur TF1. [1]

Mais les temps d’antenne ne disent rien sur la façon de les occuper, quand on ne sait rien ou si peu. Comment informer longuement sur l’absence d’informations ?

Les responsables des rédactions de TF1 et de France 2 ont, avec les ingrédients du jour, suivi à nouveau une recette qui a déjà servi à maintes reprises : multiplier les directs en tous lieux pour confirmer que l’on ne sait rien ; mettre en scène la compassion pour les victimes et leur famille (notamment en témoignant, depuis Orly, de l’accompagnement psychologique dont celles-ci bénéficient), participer en direct à la recherche des débris depuis le Sénégal (en montrant les avions revenus bredouilles de leurs premières explorations), spéculer sans fin sur les causes en l’absence des faits, recueillir les témoignages de victimes ou de familles de victimes de précédentes catastrophes aériennes, multiplier les « sujets » techniques sur des éventualités, exploiter des documents d’archives (parfois même sans le mentionner), etc.

Bref, tenir l’antenne à tout prix, en créant l’illusion que le temps occupé – fût-il vide ou presque – et la mobilisation des équipes – fût-elle inutile ou presque – sont proportionnés à l’importance et à l’impact de l’événement. Une illusion dont on pourrait multiplier les exemples passés – de la guerre du Golfe de 1991 à l’invasion de l’Irak. Un seul suffira, qui date de 1986 : rien d’absolument nouveau par conséquent.

Le 20 mars 1986, attentat dans le métro parisien. Bruno Masure, dans Journalistes à la niche ? [2], rapporte les quelques réflexions que lui inspire le traitement que cet attentat et de quelques autres :

« La compassion, oui, évidemment, mais l’ « émotion » ne doit pas détruire la portée politique de ces actes mûrement réfléchis. […] là, pour le coup, nous ne répondons à aucune consigne politique. C’est bien plus grave, car c’est la course à l’audience qui nous guide. Fatigué d’interroger à l’antenne des reporters qui n’ont rien à dire car ils n’ont aucune information fiable, je téléphone à la régie, en suggérant que l’on pourrait, peut-être, passer à autre chose ; la réponse fuse de bouche du rédacteur en chef, voire du directeur en régie dans les grandes occasions : “Tu n’y penses pas, ils (les concurrents, le réflexe est – hélas – le même que ce soit sur la Une ou sur la Deux) sont encore sur les attentats, pas question de lâcher avant eux.”[…] [3]  »

Rappelons simplement qu’alors TF1 n’avait pas encore été privatisée…

Certes, les effets d’une médiatisation outrancière, qui informe plus sur la prétention d’informer et sur le désir de cultiver l’émotion que sur les faits et les circonstances eux-mêmes, ne sont pas les mêmes selon qu’il s’agit de la guerre en direct, des conséquences d’un attentat ou d’une catastrophe aérienne, mais ils procèdent de la même fascination et de la même course à l’audience.

Et si la place accordée la disparition de l’A 330 du vol Rio-Paris peut paraître démesurée, elle n’en rencontre pas moins un large public et répond donc à une demande. Dans quelle mesure cette demande est-elle produite, induite ou, plus simplement, entretenue par l’offre ? C’est ce qu’il est difficile de savoir avec exactitude. Mais pas au point de renoncer à soulever la question suivante : le journalisme, et particulièrement le journalisme de service public a-t-il pour vocation de hiérarchiser et de présenter l’information selon les critères de la télévision mercantile ? Surtout quand la mise en scène de l’information tend à remplacer l’information elle-même.

Des ravages de l’information en temps réel, quand on ne sait rien ou presque, voici un exemple qui est loin d’être le pire.

II. Un entretien symptomatique

Mercredi 3 juin, sur France 2, le journal de 20 heures consacre 26 minutes et 12 secondes (soit 71 % d’un JT de 36 minutes et 53 secondes au total) à la disparition de l’avion. David Pujadas dispose d’un invité présent sur le plateau : Paul-Louis Arslanian, directeur du BEA (Bureau enquêtes eccident), chargé de l’enquête sur la catastrophe de l’A 330. Comme on va le voir, l’information en temps réel, surtout si elle est totalement lacunaire, ne saurait se passer, semble-t-il, de l’explication en temps réel… des faits que l’on ne connaît pas encore.

(1) Des informations à la spéculation

L’entretien commence par quelques tentatives d’obtenir non des explications, mais des informations. Et d’abord sur l’origine des débris. Première manifestation [4] de la prudence de l’expert.

Les débris ?
- David Pujadas : « [….] Dans votre esprit il n’y a aucun doute, ce sont bien les débris de l’avion, de l’Airbus d’Air France ? »
- Paul-Louis Arslanian : «  Tant que nous n’aurons pas touché ces débris, il restera toujours un doute. Ceci étant, il me paraît difficile de mettre en cause, en doute la parole des militaires brésiliens. Ce sont des professionnels. Quelque chose a été aperçu et on voit mal ce que ce serait d’autre que des restes de l’avion. »

Deuxième question sur les boîtes noires et sur les autres sources d’information nécessaires à l’explication. Deuxième manifestation de légitime prudence de l’expert.

Les boîtes noires ?
- David Pujadas : « Alors, on l’entendait, il sera difficile, vous le disiez vous-même, difficile, peut-être très difficile, peut-être impossible, de récupérer ces boîtes noires. Est-ce qu’elles sont indispensables pour établir la vérité ? Autrement dit, est-ce que vous disposez, si on ne les retrouve pas, d’autres éléments qui vous permettront d’aboutir à la vérité ? »
- Paul-Louis Arslanian : « Une précision d’abord : même si elles étaient retrouvées, je n’ai pas la certitude qu’elles contiendront les informations utiles à l’enquête. Une enquête est quelque chose de très difficile. […] Cette enquête nous allons la faire. »

« A partir de quels éléments ?  », demande alors David Pujadas. Réponse de Paul-Louis Arslanian : « Nous allons la faire à partir des éléments disponibles, c’est-à-dire des messages qui ont été émis par l’avion. »

Les messages ?
Après quelques précisions sur l’objet de ces messages – « émis automatiquement par l’avion pour des raisons d’entretien et qui indiquent au sol que tel ou tel système s’est déclaré en panne », signale Paul-Louis Arslanian – David Pujadas souhaite connaître d’ores et déjà ce qu’ils enseignent, notamment s’ils indiquent une panne totale de pressurisation. « A ma connaissance non », répond Paul-Louis Arslanian.

Ce qui nous vaut l’échange suivant, entre le journaliste qui veut savoir avant de savoir et l’expert qui réserve ses conclusions aux résultats d’une enquête effective :

- David Pujadas : « Ça c’est un élément important, parce que cela signifie qu’effectivement, donc, l’appareil était encore en état de voler s’il y avait la pressurisation à bord ? »
- Paul-Louis Arslanian : « Je crois qu’il faut être très prudent sur les interprétations que l’on peut faire aujourd’hui de ces indications. Nous sommes devant la pointe émergée d’un iceberg, et c’est vraiment une toute petite pointe. Nous avons quelques messages qui nous indiquent que des équipements sont tombés en panne. […] Le but est de comprendre ce que signifient exactement ces messages. »

A la prudence revendiquée par son interlocuteur, David Pujadas oppose des questions sur les résultats d’une enquête qui vient à peine de commencer. De l’invitation à préciser l’information à l’incitation à spéculer :

- David Pujadas : « C’est une vingtaine de messages, une dizaine de messages ? »
- Paul-Louis Arslanian : « Il y en a vraiment plusieurs pages. Mais ce sont des indications extrêmement courtes, du genre : tel équipement panne. »
- Pujadas : « Mais pas d’indication de routine, des indications qui montrent que l’avion traversait une grave crise, un vrai problème ? »
- Paul-Louis Arslanian : « On ne peut pas parler de routine, effectivement. Nous sommes devant un avion qui avait des problèmes. Mais pour autant ça n’explique pas l’accident. Il s’agit d’interpréter, de comprendre, d’expliquer et à partir de ce que l’on connaît par ailleurs sur l’avion, et on va regarder tous les événements que l’on connaît de par le passé … »
- David Pujadas : « Un avion qui a priori n’avait pas de problème ? »
- Paul-Louis Arslanian : « Tout avion a des problèmes. Mais un avion est un être vivant. Il est conçu, certifié, et puis après, tout au court de sa vie, tout événement qui se produit est analysé et des corrections sont apportées. »

David Pujadas tente de préciser sa question :
- David Pujadas : « Est-ce que vous savez aujourd’hui si cet avion avait un problème particulier ? »
- Paul-Louis Arslanian : « Un problème qui amène à dire : "c’est un avion dangereux" ; par exemple : "c’est un avion…", non sûrement pas. Mais c’est un avion qui, comme tous les avions, je le répète, avait des problèmes qui étaient traités et, pour l’instant, une des sources d’information, c’est justement l’examen de tous ces petits problèmes. »

Mais David Pujadas n’en a pas fini avec la volonté de savoir… avant de savoir :

(2) Surenchères spéculatives

- David Pujadas : « Dernière chose avant d’aller plus loin, est-ce que la façon dont les débris sont très dispersés en mer montre qu’il y aurait sans doute eu une désintégration en vol, peut-être une explosion en vol ? »
- Paul-Louis Arslanian : «  Encore une fois, il faut être très prudent sur l’interprétation de ce que l’on entend ou de ce que l’on voit. On nous dit qu’il y a des débris très dispersés, nous avons demandé que il y ait un véritable positionnement de chacun des débris repérés, le débris soit identifié, l’heure où on le repère et l’endroit où on le repère et on le repêche. »

Et M. Arslanian de préciser que cette dispersion éventuelle peut avoir plusieurs causes.

- David Pujadas : « Donc, pas d’indications, pas de conclusions au vu des éléments dont vous disposez pour l’instant ? »
- Paul-Louis Arslanian : « Des indications, des données, nous ne sommes pas totalement démunis, mais pour l’instant il me paraît prématuré d’en tirer des explications ou des conclusions. Il nous faut encore quelques jours pour commencer à déjà produire des premières certitudes. Et une longue enquête après. »

David Pujadas a bien entendu et même compris. Mais il a un reportage à caser…
- David Pujadas : « Alors, vous nous direz encore un mot tout à l’heure. Je sais que vous n’aimez pas évoquer des pistes, mais il est possible au moins de livrer des éléments d’appréciation. Hier, la question du givre a été évoquée, et on sait que les ingénieurs d’Air France travaillent sur cette hypothèse, mais sur d’autres aussi bien sûr. Alors en quoi le givre peut-il être une menace pour un avion ? […] »

Suit alors un reportage sur les effets du givre. Puis l’entretien reprend. David Pujadas, qui a affirmé « savoir » que son interlocuteur « n’aime pas évoquer des pistes » – comme s’il s’agissait d’une simple question de préférence personnelle –, lui demande… de le faire.

Le givre ?

- David Pujadas : « Paul-Louis Arslanian, parmi les nombreuses hypothèses que vous évoquez [sic], est-ce que celle-ci est exclue, celle d’un problème de givre ? »
- Paul-Louis Arslanian : «  Je préfère ne pas parler hypothèse, ne pas évoquer d’hypothèse. Nous partons de faits, il s’agit d’expliquer ces faits, de les rassembler et de voir à partir de là quelles constructions cohérentes on peut établir. Nous avons… »

David Pujadas préfère ne rien entendre…

- David Pujadas : « Mais est-ce qu’il est possible pour un avion, sur ce parcours-là, sur ce trajet-là, d’avoir rencontré à ce point, dans cette région-là, un problème de givre ? »
- Paul-Louis Arslanian : « Comme l’a dit l’ingénieur de Météo France, il y avait une zone, il y a une zone de mauvais temps, d’orage avec des nuages très froids à cette altitude, et on peut parfaitement avoir de la glace, on peut avoir donc du givre, on peut avoir tout ce qu’on veut. Mais pour l’instant, il me semble que ce que l’on peut avoir est une chose, ce que l’on a eu en est une autre. Et établir un lien entre les deux, il faut être très prudent. »

Mais, qu’importe à Pujadas, il a une autre idée, qu’il tient absolument à mentionner…

Un bloc de glace ?

- David Pujadas : « Dans la rubrique, pardon, ce qu’on peut avoir, est-ce que l’idée d’un grêlon — et lorsqu’on parle de grêlon en très haute altitude, on parle parfois de bloc de glace de plusieurs dizaines de kilos, parfois plus, qui briserait le cockpit — est aussi une hypothèse sur laquelle vous travaillez ? »
- Paul-Louis Arslanian : «  Nous ne travaillons pas sur des hypothèses, nous travaillons sur des faits. Je suis désolé, mais c’est la seule façon d’arriver à un résultat correct. Nous ne pouvons pas partir d’hypothèses en essayant de dire, au hasard : ça pourrait être ça ou ça pourrait être ça. Parce que si on fait ça on va s’enfermer dans la logique du point de départ. Nous, actuellement, notre démarche, avec Air France et Airbus, actuellement il y a une enquête. Cette enquête consiste à regarder les faits disponibles et à essayer de regarder d’une façon totalement objective tout ce qu’ils peuvent signifier. A partir de là, mais ça sera dans un deuxième temps, on verra ce que l’on pourra leur faire dire. Aujourd’hui je recommande vraiment la plus grande prudence. Nous ne savons pas ce qui s’est passé aujourd’hui. »

Et, comme on ne sait pas, Pujadas tente malgré tout de savoir…

Un attentat ?

- David Pujadas : « Et, une toute dernière chose, ça veut dire que vous ne pouvez pas écarter non plus formellement l’idée d’une action criminelle ou terroriste. »
- Paul-Louis Arslanian : « Alors, effectivement, à ce stade, nous ne pouvons absolument rien écarter[…], mais effectivement l’enquête ne fait que commencer, nous avons très peu d’informations. Monsieur Pujadas vous aurez à m’inviter une nouvelle fois, je le crains. »

Et comme rien ne saurait concilier les deux démarches, Pujadas ne retient de la prudence de l’expert que la patience dont il fera sans doute preuve désormais…

Prudence ou patience ?

- David Pujadas : « Merci monsieur Arslanian d’avoir répondu à nos questions. On a compris qu’il fallait être patient. Bon courage pour votre travail et rappelons que l’enquête sur le Concorde de Gonesse a duré, je crois, dix-huit mois. »
- Paul-Louis Arslanian : « Oui, c’est exact. »
- David Pujadas : « Merci d’avoir été avec nous. »

Peut-être la réserve de Paul-Louis Arslanian n’est-elle pas inspirée uniquement, compte-tenu des enjeux économiques notamment, par une prudence toute scientifique. Mais que dire de la frénésie de David Pujadas, qui cherche à satisfaire sa curiosité et celle de ses publics par tous les moyens, fussent-ils contradictoires avec une saine méthode de recherche de la vérité.

Cet exemple de fabrication en direct d’une pseudo-investigation éclaire d’un jour particulier la valeur des informations diffusées par la presse écrite. Ainsi, Le Figaro du 3 juin, par exemple, titre : « AF 447 : la piste d’une désintégration en vol ». Et écrit : « “On peut observer des fragments sur une distance de plus de 300 km, confie ainsi une source proche de l’enquête technique. Sous réserve de plus amples informations, ce premier élément plaide en faveur d’une explosion qui aurait touché l’aéronef en plein vol.” Si elle devait être confirmée, une telle désintégration à une altitude d’environ 10 000 mètres pourrait s’expliquer aussi bien par l’action d’un phénomène météorologique exceptionnellement violent, plausible dans la zone de convergence intertropicale empruntée par le vol, que par une brusque dépressurisation ou par un attentat terroriste. » Le Monde, de son côté, sur son site internet, cite à son tour des sources proches de l’enquête, selon lesquelles l’avion aurait volé à une vitesse « erronée ». Qu’est ce qui distingue ces hypothèses de simples « rumeurs » ? L’attestation selon laquelle elles proviennent de « sources proches de l’enquête » !

Ce journalisme de révélation conditionnelle, aussi fiable que l’astrologie (dont il arrive qu’elle « tombe juste » par un miracle qu’elle seule sans doute parviendrait à expliquer…) élève les discussions de café du commerce à la dignité d’une confrontation d’experts : il n’est que le dernier avatar d’informer sur tout même quand on ne sait rien, quitte à informer a minima, voire pas du tout, sur « le reste de l’actualité », comme disent les présentateurs de journaux télévisés.

Henri Maler, avec Alex Favier et Olivier Poche

NB. Daniel Schneidermann, dans un article paru sur le site d’Arrêt sur images et titré « Dans les rêves de Pujadas » (article dont nous prenons connaissance au moment d’achever le nôtre), résume et analyse fort bien l’entretien entre David Pujadas et Paul-Louis Arslanian. Dans cet article daté du 4 juin 2009 (et malheureusement payant), Daniel Schneidermann, parlant de Pujadas, écrit :

« Il ne sait rien mais envisage tout. Son interview, mercredi soir, du président du Bureau Enquêtes Accident Paul-Louis Arslanian restera comme un modèle de confrontation de deux logiques. Bombardé d’hypothèses pujadiennes (foudre ? grêle ? attentat ?) Arslanian a passé dix méritoires minutes à les esquiver en direct. En expliquant les raisons de ses esquives : envisager une "hypothèse", ce serait courir le risque de s’y enfermer, et de négliger toutes les autres. La méthode du BEA est à l’opposé : partir des éléments disponibles (essentiellement, pour l’instant, les fameux messages d’alerte automatisés) mêmes s’ils sont encore rares et épars, pour commencer de rassembler l’immense puzzle. Mais sans modèle préalable. Pujadas, journaliste de temps réel jusqu’au bout des ongles, est hermétique à cette logique. Il faut des réponses, là, maintenant, tout de suite. Ou tout au moins, des débuts de réponse. "Je sais bien que vous n’aimez pas faire d’hypothèses, mais..." Inlassablement, il repart à l’assaut. N’importe quoi, pourvu que ce soit tangible. Et puisse faire de la reprise. […]  »

 
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Notes

[1En pourcentage, France 2 consacre en moyenne 55,7 % de ses deux JT à l’Airbus contre 49,4 % pour TF1.

[2Bruno Masure, Journalistes à la niche ? De Pompidou à Sarkozy. Chronique des liaisons dangereuses entre médias et politiques, éditions Hugo et Cie, janvier 2009.

[3op.cit., p. 187-188.

[4Insuffisante, puisque – on sait désormais – les débris évoqués ici n’étaient pas ceux de l’avions.

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