La loi Hadopi dont l’adoption par le parlement puis l’invalidation partielle par le conseil constitutionnel n’en finit pas de faire l’objet de rebondissements, ce qui témoigne, une fois de plus, de cette peur qu’inspirent à l’ordre établi certaines pratiques, qualifiées, pour mieux les stigmatiser, de pirates.
Le nouveau texte présenté sous la houlette des ministères de la justice et de la culture est aussi « pire » que le précédent, voire vraiment pire selon certains, et n’a d’autre objectif que de contourner maladroitement la censure du Conseil constitutionnel.
Censée protéger les artistes et les créateurs, elle ne résout en rien la question de leur rémunération mais, en revanche, continuera, dans sa nouvelle mouture, de légaliser un contrôle de tous les instants de nos activités numériques par les fournisseurs d’accès (FAI), c’est-à-dire, les majors. Ce seront en effet « les flics » travaillant pour les fournisseurs d’accès qui continueront à surveiller chaque internaute et fourniront leur rapport sur les « infractions » constatées à la Haute Autorité pour la diffusion des œuvres et la protection des droits sur Internet (Hadopi), laquelle saisira alors l’autorité judiciaire, seule habilitée à disposer du pouvoir de sanctionner les présumés coupables, notamment en suspendant l’accès à Internet.
En clair, par rapport à la loi retoquée par le Conseil constitutionnel, c’est un rafistolage du plus mauvais goût qui nous est servi par le gouvernement : ce qui ne change pas, c’est l’ensemble du dispositif dit de la « riposte graduée », qui reste géré par l’Hadopi ; ce qui change, c’est que, si ses avertissements à l’encontre des « pirates présumés » ne sont pas suivi d’effet, l’Hadopi saisira le juge avec « ses » preuves à l’appui. Il est également prévu que les ayants droits puissent de leur côté saisir directement la justice.
Le nouveau projet de loi prévoit également la possibilité d’un recours à la procédure du juge unique et aux ordonnances pénales. Il s’agit d’une procédure simplifiée et accélérée permettant au juge de statuer sans débat préalable.
Ce sera donc le point de vue du pot de fer contre celui du pot de terre. Ce n’est plus la justice égale pour tous, c’est le droit du plus fort qui est ainsi entériné !
Des artistes, des créateurs et, pour certains tout aussi prestigieux que certaines de nos « gloires nationales » ne se sont pas laissés berner par le discours de justification de la répression au nom de la défense légitime du droit des créateurs à être rémunérés pour leur « job ».
SUD Culture Solidaires soutient leurs initiatives et continue de plaider pour un véritable débat démocratique sur la société numérique que nous voulons. Des solutions existent. Certaines sont expérimentées dans d’autres pays. En France, les longues discussions autour du droit de prêt en bibliothèque ont permis de trouver un compromis acceptable par l’ensemble des protagonistes. Ce fut la loi sur le prêt « payé ».
Il serait bon que le gouvernement, plutôt que de faire voter à la hussarde, en cette période estivale, une loi mort-née, inique, inefficace et coûteuse, s’inspirât de toutes ces pistes. Malheureusement le nouveau ministre de la culture en déclarant qu’il défendait « très nettement » la loi qui vient d’être adoptée par le Sénat, avant de repasser à l’Assemblée nationale avant la fin juillet, tourne le dos à une telle ouverture….
SUD Culture Solidaires, le 10 juillet 2009