– Le 28 février 2003
« Staline - hier et aujourd’hui »
Monsieur le Médiateur,
Votre quotidien m’a mis en cause dans son édition du 26 février dans le contexte d’un montage destiné à faire croire que je serais antisémite. Vous êtes suffisamment averti des conséquences que peut avoir l’association d’un individu à une publication largement inconnue du public dont, citation tronquée à l’appui, on laisse croire qu’elle serait antisémite, pour qu’il ne soit pas nécessaire que j’en dise davantage sur ce sujet. Vous pouvez ne pas apprécier PLPL, vous n’avez pas le droit de l’assimiler à ce type d’orientation abjecte. La manoeuvre est plus méprisable encore quand elle a pour objet de discréditer par association les auteurs d’un livre qui semble déranger les responsables du Monde, livre auquel, à mon sens, ils n’ont pas répondu à ce jour.
Dans ce même numéro qui - est-ce une forme d’humour involontaire ? - commémore la mort de Staline, Pierre Georges ment en connaissance de cause lorsqu’il évoque un passage du livre de Pierre Péan et de Philippe Cohen pour appuyer les imputations d’antisémitisme (le mot de Vichy est cité dans sa chronique à toutes fins utiles) évoquées par ailleurs.
Vous pourrez comparer utilement le paragraphe du livre évoqué par le directeur adjoint de la rédaction du Monde et le passage précis, page 64, dudit ouvrage. Vous en tirerez, j’en suis certain, d’utiles conclusions sur l’honnêteté intellectuelle des procédés employés par le quotidien dont vous êtes le médiateur. J’imagine que cette constatation vous attristera autant qu’elle m’indigne.
Je vous prie de croire à l’assurance de ma considération.
Serge Halimi
P.S. Habitué à la manière dont votre quotidien manipule les droits de réponse, j’ai choisi de n’en envoyer aucun à votre directeur de la publication comme la loi m’y eût autorisé. Vous comprendrez qu’il ne s’agit pas là, de ma part, d’un signe de confraternité particulier à son égard.
– Une semaine plus tard
« Odieux mais inefficace »
Monsieur le Médiateur,
Je viens d’apprendre que votre précédente chronique aurait été censurée par la direction du Monde. Je suis certain que vous en informerez vos lecteurs dans votre prochain texte. Mais, sans attendre, je tiens à vous faire part de ma solidarité.
Dans l’affaire qui me concerne, je n’ai pas l’intention d’envoyer au directeur de votre publication un droit de réponse, comme vous m’y avez encouragé et comme la loi m’y invite. Si le médiateur du Monde est censuré par Le Monde, il n’est pas difficile d’imaginer le sort qui serait réservé à mon droit de réponse, sans doute inséré fortuitement dans une enquête recensant les techniques de dénégation des antisémites...
Enfin, j’ai entendu, ce matin sur France Inter, Daniel Schneidermann estimer à propos de la réponse d’Edwy Plenel (celle qu’il a signée comme l’autre qu’il a commise, anonyme) qu’elle était faite "d’invectives et d’insinuations antisémites très pénibles contre vous deux (Pierre Péan et de Philippe Cohen, également présents à l’émission). Elle a été non seulement odieuse mais inefficace." [2]
Vous constaterez que ce propos rejoint précisément l’analyse contenue dans le premier courrier que je vous ai adressé, vendredi dernier. Ce courrier était relatif aux imputations d’antisémitisme qui, à l’aide de procédés dont je veux croire qu’ils ne correspondent pas à la marque de fabrique de votre journal, me visaient dans vos colonnes pour régler un compte avec les auteurs de La face cachée du Monde. J’attends que vous réprouviez publiquement ces méthodes.
Je vous prie de croire, Monsieur le médiateur, à l’assurance de mes sentiments les meilleurs.
Serge Halimi