Femme de radio depuis vingt-cinq ans, restée fidèle à France Culture, Pascale Casanova animait depuis plusieurs années une émission littéraire sans équivalent. Elle vient d’être licenciée par sa chaîne à la suite d’un désaccord.
Intitulée « les Jeudis littéraires », puis « les Mardis littéraires », enfin, depuis la rentrée 2009, « l’Atelier littéraire », l’émission de Pascale Casanova réussissait à mêler interviews d’auteurs et développements critiques, et s’employait à défricher des pans des littératures française et étrangère qui, sans elle, seraient restés dans l’ombre.
L’approche formelle de Pascale Casanova, qui est par ailleurs chercheuse et a un livre sur Kafka en préparation, ne négligeait aucune des dimensions, politique notamment, que peut receler un texte, qu’il s’agisse d’un roman, d’un récit, d’un poème ou relève d’un genre non identifié. Car c’était aussi cela cette émission : un goût pour l’expérimentation, l’inconnu, le risqué, le minoritaire, dans un esprit d’exigence qui ne renonçait pas à la clarté. Ce sont beaucoup d’écrivains, de poètes, de traducteurs et de critiques qui se retrouvent ainsi privés d’un espace où ils savaient qu’ils seraient bien traités car la littérature y primait, et de très nombreux auditeurs à qui cette émission va cruellement manquer.
Le départ de Pascale Casanova de France Culture est malheureusement cohérent avec la progressive dépréciation de cette chaîne, et plus généralement de Radio France.
Précisions d’Acrimed. Pascale Casanova a été licenciée à la suite d’un désaccord à propos de son contrat de travail…
En guise de politique culturelle, sur France Culture, le néo-management ; en guise d’élaboration des programmes, les choix discrétionnaires d’une direction incontrôlée.
À Radio France, les directions changent (de Jean-Paul Cluzel à Jean-Luc Hees, de Frédéric Schlesinger à Philippe Val, de Laure Adler à Bruno Patino en passant par David Kessler…), l’accaparement du service public par des responsables irresponsables, mais omnipotents, demeure…
Sur le site de l’émission, on peut encore voir et lire la présentation suivante :
« Table ronde de critiques sur un thème ou un auteur de l’ actualité littéraire, sous-tendue par la recherche de l’inventivité, le goût du risque et de la forme inédite et un intérêt marqué pour les « petites » littératures, les auteurs méconnus, les petits éditeurs et autres acteurs littéraires d’ordinaires invisibles.
Des lecteurs, et surtout des auteurs, des traducteurs, des critiques, viennent autour de la table parler (souvent) de poésie, de formes littéraires, d’histoire, de romans (quelquefois) méconnus, d’œuvres (souvent) oubliées, d’écrivains (plutôt) absents des listes de prix littéraires (ou de meilleures ventes).
Parti-pris, comme disait Francis Ponge, de donner la parole plutôt à ceux qui restent d’ordinaire muets ou invisibles, mais aussi, sans exclusive, aux autres… »
Mais qu’importe à la direction de France Culture !