Personne ne conteste aujourd’hui l’impérieuse nécessité pour le secteur des médias d’adresser à l’opinion publique un signal fort de sa volonté d’améliorer la qualité de l’information et, par là même, de reconquérir une confiance qui s’est fortement érodée.
Ce signal doit être la reconnaissance par l’ensemble de la profession d’une charte de déontologie, garante notamment d’une plus grande rigueur dans les pratiques professionnelles, le refus de la compromission, la recherche de la vérité et la vérification de l’information.
La question a été traitée lors des Etats généraux de la presse écrite, qui ont conclu à la nécessité d’annexer un code de déontologie à la convention nationale de travail des journalistes, ainsi que le SNJ le préconise depuis longtemps. Lors de la première Conférence annuelle sur les métiers du journaliste, le ministre de la Culture et de la Communication vient de souligner à son tour l’importance d’un « code de déontologie, outil indispensable à la profession ».
Pour le SNJ, syndicat majoritaire chez les journalistes et rédacteur de la première charte de déontologie dès sa création en mars 1918, cette démarche est effectivement essentielle. Comme il est essentiel que ce soit la profession elle-même qui la conduise, et fasse en sorte d’aboutir à un consensus lui permettant de retrouver la crédibilité perdue.
A de nombreuses reprises, en son nom propre ou au nom de l’intersyndicale des journalistes, le SNJ a interpellé les organisations patronales pour que s’engage une discussion sur la question de la déontologie. Dans la majorité des cas, il n’a obtenu en réponse que des fins de non-recevoir.
La dernière tentative en date, au printemps 2010, a fait suite à la publication d’un projet de code de déontologie rédigé par un « groupe de sages » réuni autour de Bruno Frappat, qui avait animé le pôle « avenir des métiers du journalisme » aux Etats généraux. Sur l’ensemble des partenaires sociaux et responsables de l’audiovisuel public [1] contactés par le SNJ au nom de l’intersyndicale, moins de la moitié ont répondu.
Le SNJ exprime sa plus vive inquiétude face à ce constat. Il réaffirme sa propre volonté de voir aboutir ce dossier et appelle l’ensemble des acteurs concernés à se ressaisir et à se réunir dans les meilleurs délais.
Concernant le projet de code rédigé par le « groupe Frappat », le Comité national du SNJ, tout en lui reconnaissant le mérite d’exister, a estimé qu’il ne pouvait être adopté en l’état.
En premier lieu, il n’y est pas suffisamment explicite que les devoirs énoncés s’appliquent à l’ensemble des acteurs de la chaîne éditoriale, notamment aux journalistes qui, de par leur titre ou leur fonction, ont autorité sur d’autres journalistes.
Il ne prône pas que la responsabilité du journaliste vis-à-vis du public prime sur toute autre responsabilité.
Ce projet apparaît également très déséquilibré, entre les devoirs liés à la mission d’informer et les droits qui permettent d’exercer cette mission en toute indépendance, notamment à l’égard des pressions politiques et économiques. Il ne prend pas en compte la situation dans les rédactions (manque d’effectifs, formations insuffisantes,…) qui place souvent les journalistes dans de telles conditions d’exercice de leur métier qu’ils risquent de se retrouver dans l’impossibilité de le respecter.
Enfin, le SNJ a rappelé à cette occasion que la question de la déontologie ne saurait être dissociée de celle de la reconnaissance juridique de l’équipe rédactionnelle, et du droit reconnu à cette dernière de s’opposer collectivement à tout ce qui pourrait contrevenir aux principes déontologiques et à la conscience professionnelle des journalistes.
Paris, le 4 octobre 2010