Mais BHL ne serait pas BHL-Moi-Je s’il ne s’octroyait pas – comme à son habitude – une prime de lucidité exceptionnelle. Ainsi, des « deux événements apparemment mineurs mais en réalité considérables et que nous n’avons pas d’autre choix que d’essayer de penser ensemble », BHL mentionne d’abord celui-ci : « Le premier fut le fait de Marine Le Pen dont j’annonçais, depuis quelques semaines, qu’elle était plus redoutable encore que son père : je ne croyais pas si bien dire, comme vient de le prouver sa sortie sur les musulmans dont les prières, dans les lieux publics, seraient assimilables à une “Occupation”. »
BHL ne serait pas un éternel moulin à approximations s’il ne tordait pas les faits à sa convenance. Ainsi : « Le second [événement] fut ces Assises internationales sur l’islamisation de l’Europe organisées, quelques jours plus tard, à Paris, par le groupuscule néonazi qui s’était rendu célèbre, le 14 juillet 2002, en tentant d’assassiner Jacques Chirac et qui s’est allié, pour l’occasion, à un quarteron d’anciens trotskistes rassemblés sous la bannière du site Internet Riposte laïque. » Combattre politiquement le Bloc identitaire, auquel il est fait allusion ici, n’imposait pas de lui attribuer une tentative d’assassinat… tant qu’il n’en a pas commis [1]. Quant à Riposte laïque, il ne se limite pas à des transfuges de la gauche et de l’extrême gauche, et encore moins à un « quarteron d’anciens trotskistes » dont l’identité nous est dissimulée. Mais peut-être, comme on va le voir, BHL pense-t-il ici à un dénommé Cassen [2].
Ces approximations polémiques ne mériteraient aucune mise au point, si elles ne servaient pas à accréditer cette « thèse » : il s’agit là d’un « nouveau rapprochement rouge-brun qui voit les crânes rasés du Bloc identitaire fricoter, sur le dos des musulmans de France, avec tel ancien du Monde diplo, Bernard Cassen ». Or Bernard Cassen n’est en rien concerné. Une crapulerie involontaire n’en est pas moins une crapulerie [3].
Pour avoir réduit la philosophie de Kant en poussière en s’appuyant sur l’ouvrage d’un écrivain imaginaire – Jean Baptiste Botul –, BHL était devenu pour quelques temps la risée de quelques esprits chagrins. Pour avoir confondu, dans son hostilité aveugle au Monde diplomatique (et pour les besoins de son propre rapprochement entre rouges et bruns), Bernard Cassen, directeur général de ce mensuel jusqu’en janvier 2008, et Pierre Cassen, animateur de Riposte laïque, Bernard-Henri Lévy devrait, à n’en pas douter, être salué par tous les représentants de la médiacratie. Au Café de Flore, si cela n’a pas déjà été fait.
Henri Maler
– Nos remerciements au correspondant qui nous a signalé cette nouvelle tache sur la chemise blanche du philosophe pour médias.
P.-S. : Quelques heures plus tard...
– La chronique de BHL est désormais suivie de cette mise au point : « ERRATUM : Une erreur s’est glissée dans ce bloc-notes. Lorsque j’évoque les protagonistes du nouvel axe entre Riposte laïque et Bloc identitaire c’est de Pierre Cassen qu’il s’agit et non de Bernard Cassen. Cet erratum sera publié dans le prochain numéro du Point. Et la phrase a été, ici, d’ores et déjà corrigée. BHL. » BHL n’a pas commis une erreur : « une erreur s’est glissée... » tout seule, sans le concours de son auteur qui ne pourfend jamais gratuitement et sans « erreur » Le Monde diplomatique ! Quant à présenter des excuses...
– La revue de presse d’Europe 1 détaille ainsi la bourde de BHL (Michel Grossiord, 24 décembre 2010) :
– Enfin, Michel, une nouvelle méprise pour Bernard-Henri Lévy.
– Oui, erreur de nom, dans sa dernière chronique du Point, où il dénonce les Assises de l’islamisation qui se sont tenues le week-end dernier à Paris, « un rapprochement rouge-brun d’anciens trotskistes et des néo-nazis ». Mais Bernard-Henri Lévy se trompe sur un nom dans sa chronique, citant Bernard Cassen [il prononce Cassin], ancien du Monde diplomatique et d’Attac, au lieu d’un certain Pierre Cassen. Le premier, associé dans la chronique de BHL à un « crachat sur le visage de la République », porte plainte pour diffamation contre le philosophe, qui avait déjà inventé, on s’en souvient, un certain Botul, et puis accusé Frédéric Taddéi d’avoir négocié le prolongement de son contrat sur France 3 jusqu’en 2014. Autre polémique : là aussi, il y avait eu erreur de prénom. Ça n’était pas Frédéric Taddéi mais Rodrigo, joueur à l’AS Roma qui, effectivement, avait vu son contrat prolongé. Tout le monde a besoin de vacances.
Soit. Mais il ne s’agit pas d’une simple erreur de prénom.
– BHL siège désormais au conseil de surveillance du Monde. C’est pourquoi Bernard Cassen a transmis au vice-président dudit conseil de surveillance la lettre qu’il a adressée à Éric Fottorino au sujet des élucubrations de BHL qui « ne contribuent pas au prestige du conseil de surveillance et, partant, à celui du groupe. »
– Lire la réponse du Monde diplomatique : "Une nouvelle ânerie de Bernard-Henri Lévy"