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Critique des médias sur le web (janvier-février 2011)

par Marie Menaut,

N° 12 de notre sélection bimestrielle d’articles de critique des médias parus sur le Web et disponibles gratuitement [1]. Présentation thématique des articles publiés en janvier et février 2011. : Sous notre projecteur - Turpitudes de la presse imprimée - Réalités de la télé - Du côté du Web - Arrêts sur la propagande - Révolutions arabes - Sur la nature des médias

1. Sous notre projecteur

 Pour 100% des musulmans, les sondages sont plutôt une menace (Les mots sont importants 10/01/11) – « Pour 42% des Français, la « présence musulmane » est « plutôt une menace » : c’est ce que vient de nous apprendre un sondage réalisé par l’IFOP pour le journal Le Monde. On a raison de s’en alarmer, mais pas d’être étonné-e : l’islamophobie progresse, ou plus précisément elle s’épanouit, se lâche, s’exprime en toute bonne conscience. Par voix de sondage pour les 340 personnes (42% des 809 sondés) qui ont accepté de répondre aux questions bêtes et méchantes de l’IFOP et de choisir la plus violente des réponses proposées, mais aussi de mille autres manières, au quotidien : regards hostiles, propos injurieux, discriminations… Sans parler des formes les plus haut-de-gamme, celles qui précèdent, préparent et légitiment toutes les autres : la stigmatisation politique, éditocratique, journalistique… et sondagière. »

 Une révolution sans image (Culture Visuelle 15/01/11) – « Une révolution, l’Afrique : quel meilleur terrain pour mesurer le rôle des nouveaux médias dans la prise en main de leur destin par les peuples ? Pourtant, si l’on a déjà pu lire que Twitter avait fait la révolution tunisienne, si même le journal télévisé de France 2 a tenu à souligner que « les Tunisiens ont filmé eux-mêmes leur révolution », l’impression générale est plutôt que les outils numériques n’ont joué qu’un rôle accessoire et purement instrumental dans une geste qui s’est d’abord jouée physiquement dans les rues, pendant plusieurs semaines, par les slogans et la manifestation bien réelle de la présence du peuple, malheureusement sanctionnée par des morts et des blessés. »

 Révolution à Tunis : les leçons des médias (Culture et Politique Arabe 17/01/11) – « Il faudrait pouvoir se réjouir du fait que les médias français – à quelques exceptions près bien entendu mais si peu – ont enfin redécouvert le vrai visage de la Tunisie, après s’en être tenu à l’écart pendant deux bonnes décennies… Tout de même, après toutes ces années d’oubli et d’indifférence, cette débauche de commentaires où l’on chante désormais la maturité du peuple tunisien tout en lui prodiguant de généreux conseils écœure un peu. »

  La Brique  : « Le journal est l’un des aspects de la lutte - parmi d’autres » (Article XI 22/01/11) – « Cela fait quatre ans qu’ils tiennent bon la barre, sans se laisser démonter par les menaces de procès ou les opérations d’intimidation policière (la dernière, particulièrement violente, a vu l’interpellation de 53 personnes). Ceux de La Brique, journal de contre-information régionale et relais des luttes de la gauche radicale, sortent un excellent canard. Ils en parlent ici. »

2. Turpitudes de la presse imprimée

 L’information "papier" est hors de prix (Media Trend 11/01/11) - « Rendre de nouveau l’information payante sur le web, c’est le rêve de tous les éditeurs. Mais des études récentes, et le résultat d’expérimentations comme celle du Times montrent qu’il y a loin de ce rêve à la réalité. La France, est aussi un terrain d’expérimentation dans ce domaine. L’occasion d’examiner les offres payantes existantes en France - quelles soient papier, papier et web et web seul - et leur attractivité, en adoptant le point de vue d’un simple consommateur d’information. Donc, un post en deux temps : d’abord un état des lieux et ensuite un comparatif des offres payantes existantes en France […], c’est-à-dire pratiquement tous les sites des quotidiens d’information. »

 La solitude, ça n’existe pas… pour les hommes (Les nouvelles news 31/01/11) – « La solitude, grande cause nationale 2011, fait couler beaucoup d’encre, de photos et d’émissions télé. Béatrice Toulon analyse un dossier de « Télé Obs » enrichi de photos et légendes convergeant vers un message subliminal : les solos sont plutôt des « solas ». Et les hommes seuls, eux, sont indépendants. Nuance ! Messages démentis par les faits. »

 La une d’aujourd’hui est celle d’hier… et celle de demain ! (Culture visuelle 24/02/11) – « Comme chaque matin, j’ai ouvert ma boîte aux lettres en partant travailler ; comme chaque matin, j’ai déplié l’exemplaire de Libération qui s’y trouvait depuis quelques heures ; et comme quasiment chaque matin je ne fus pas surpris par la Une du quotidien traitant ce matin des événements en Libye. Ou plutôt j’attendais inconsciemment cette Une et j’éprouvais donc à sa vue une impression de familiarité extrême voire de déjà vu. »

 Publicité : combien « vaut » une journaliste beauté ? (Rue 89 25/02/11) – « Il y a celles qu’on gâte, celles qu’on boycotte. Pour les marques, le travail des rédactrices de féminins se monnaye. Il est temps d’apprendre à lire entre les lignes et découvrir comment naissent les articles consacrés à votre éternelle jeunesse. Pas dans le bureau d’une rédactrice en chef qui se demanderait comment répondre aux préoccupations de ses lectrices. Un article beauté est l’aboutissement d’une politique de marketing qui utilise des outils de "valorisation" des journalistes et de leur travail. »

3. Réalités de la télé

 15 secondes pour France 5 (Culture visuelle 09/01/11) – « Lorsqu’Andy Warhol énonce en 1968 l’aphorisme fameux selon lequel chacun aura droit à ses 15 minutes de célébrité (“In the future everyone will be famous for 15 minutes“), la mention d’une durée si brève a pour fonction de ridiculiser cette gloire factice. Quelque quarante ans plus tard, “Médias, le magazine” (France 5) réduit à 15 secondes la durée moyenne d’expression de ses invités. On n’a pas intérêt à bafouiller. »

 Les sondages dans C dans l’air (Observatoire des sondages 18/02/11) – « Le Sénat a adopté à l’unanimité une proposition de loi sur les sondages visant la transparence. Le représentant du gouvernement a opposé son veto. L’affaire devenait médiatique. L’émission C dans l’air devait donc en faire un de ses thèmes. On connaît le dispositif, un débat de plateau entrecoupé de petits reportages. J’ai été contacté comme spécialiste critique des sondages […] Devant son insistance, je lui expliquai que cette émission n’offrait pas les conditions d’un débat loyal. Quand on met en cause l’honnêteté d’une émission, la moindre des choses est de s’assurer qu’on ne s’est pas trompé. Au moins dans ce cas. Et d’observer comment les sondeurs, après avoir agi en coulisses, sortent du bois. Je me suis donc imposé de regarder l’édition du 17 février de C dans l’air sur France 5. »

4. Du côté du Web

 La mort de Bernard Montiel, le journalisme à la remorque du LOL (Culture visuelle 02/01/11) – « La « nouvelle » de la mort de Bernard Montiel, postée par un compte réputé pour sa malice, suscite immédiatement l’hilarité dans la communauté Twitter française. Le tweet de @lapin_blanc devient un « même », c’est à dire une blague virale qui comprend en elle-même sa propre règle du jeu, compréhensible par les initiés : faire semblant de croire à cette fausse mort et pirater les médias qui, par l’effet de masse de ces tweets hommage, doivent finir par mordre à l’hameçon. »

 La droite investit le Web (Nonfiction 02/02/11) – « Fin février, un nouveau site d’information généraliste, Atlantico, devrait s’immiscer dans le paysage du journalisme Web français. Clairement marqué à droite, ce nouveau site d’information souhaite, selon L’Express reconquérir le secteur de l’information sur Internet, jusqu’ici occupé par des médias "de gauche" tels que Mediapart ou Rue89. »

5. Arrêts sur la propagande

 Le Nostradamus des urnes (Les mots sont importants 02/01/11) – « Éditorialiste multicartes né en 1950, Alexandre Adler officie depuis 2002 dans les pages (privées) du Figaro et à l’antenne (publique) de France Culture, après être notamment passé depuis les années 1980 par Libération, Courrier International, Le Monde et Le Point, et il est partout présenté comme « un des plus grands spécialistes de géopolitique internationale contemporaine » – ou, plus sobrement, comme un « spécialiste des relations internationales ». Et, de fait, l’intéressé donne régulièrement son avis sur les affaires du monde sous la forme, notamment, de hardis pronostics où se devine l’influence déterminante de Michel de Nostre Dame, alias Nostradamus. Malheureusement, il est fort souvent démenti par la réalité. »

 Les choses en main (Les mots sont importants 14/01/11)« Journaliste au Figaro, chroniqueur sur RTL et France 2 et invité permanent des autres grands médias, Éric Zemmour a tout pour déplaire : teigneux, réactionnaire, raciste et sexiste, il aboie plus qu’il ne parle, et il n’est même pas beau ! Son seul côté touchant est la sincérité, la conviction intacte avec laquelle il assène les clichés les plus éculés et les plus rétrogrades. Cela ne suffit toutefois pas à forcer le respect : d’où cette lettre ouverte, écrite quelque temps avant les célèbres surenchères anti-noires et anti-arabes du petit Zemmour – à l’occasion d’un précédent sermon, moins remarqué, mais non moins édifiant. »

6. Révolutions arabes

 Ceci n’est ni une wikileaks-révolution ni une twitter-révolution (ReadWriteWeb 16/01/11) – « Avant de se ruer sur les analyses d’un phénomène que beaucoup viennent de découvrir, ou pire de ressortir les vieux papiers sur la révolution verte iranienne – et d’en tenter une réecriture rapide – pour être les premiers sur Google News, il conviendrait d’entendre ceux qui sont au front et qui m’ont poussé à écrire ce billet. »

 Le Sfeir à repasser de Ben Ali (Bakchich 22/01/11) – « Depuis la "révolte tunisienne", les experts se bousculent dans les médias. Comme Antoine Sfeir, directeur des Cahiers de l’Orient qui ne tarissait pas d’éloges sur le régime de Ben Ali. Combien de temps va-t-on laisser Sfeir ?! »

 Al-Jazeera : La voix de l’Émirat ? (Owni 30/01/11) – « La chaîne qatarie vient d’être interdite en Égypte. Pourtant, depuis le début des manifestations, la plupart des médias internationaux utilisent les contenus d’Al-Jazeera pour couvrir le pays. Or, Al-Jazeera est une chaîne financée en grande partie par un gouvernement, celui du Qatar. Dans l’un des télégrammes diplomatiques révélés par Wikileaks, un diplomate américain affirme que l’émir se réserve le droit d’utiliser la chaîne comme une monnaie d’échange dans ses négociations diplomatiques. Le Qatar aurait même négocié directement avec Hosni Moubarak, proposant d’interrompre ses émissions en Égypte pendant un an en échange d’un changement de sa politique palestinienne. Une offre à laquelle Moubarak n’aurait pas répondu. Ces affirmations ont été démenties par la chaîne, mais le doute subsiste. Comment une rédaction financée en majeure partie par un pouvoir politique peut-elle rester neutre ? »

 Égypte : les télés françaises complices (Minorités 15/02/11) – « Le peu d’intérêt manifesté par la classe politique française face à la révolution égyptienne n’est pas une surprise : les chaînes télé d’information (iTélé, LCI, BFM, même France 24 français) sont passées à côté de la plaque. Contrairement aux vraies chaînes d’info internationales (Al-Jazeera, BBC World, France 24 anglais, CNN, et même Sky News), les télés françaises n’ont pas suivi les évènements au plus près et n’ont même pas préparé à l’avance des docus dans l’éventualité d’une victoire de la révolution. »

 La révolution arabe, fille de l’internet ? (Blog du diplo Information 2.0 15/02/11) – « Quel rôle ont joué les nouveaux médias dans la chute des régimes autocratiques de Tunisie et Égypte ? Faut-il prêter à Facebook, et aux réseaux sociaux en général, la capacité de mobiliser des foules et de susciter des mouvements d’opposition ? Enseignements politico-médiatiques de révoltes puis de révolutions "en ligne". »

7. Médiatisations

 Des histoires de médias (Culture visuelle 09/02/11) – « Ce chapitre de réflexion sur la médiatisation des connaissances scientifiques par les mass-médias prend place dans un ouvrage de réflexion plus générale sur le travail de l’universitaire en sciences sociales (ici, deux sociologues). À sa lecture, il m’avait semblé extrêmement important en effet de s’en remettre à la responsabilité du chercheur pour transmettre les connaissances en tenant compte des règles délicates imposées par le système médiatique. Elle repose cependant sur une conviction – largement partagée – de médias qui feraient appel à la connaissance scientifique pour en restituer les récits et se mettre à son service. Ce qu’André Gunthert relate de sa très récente expérience montre que le trajet est inverse : le récit médiatique puise dans les récits scientifiques pour son propre compte. » Les médias au service de la connaissance scientifique ou la science, instrument des médias ?

 Gilles Balbastre : médias et mouvement social (Passerellesud 05/02/11) – Enregistrement d’un débat animé par Acrimed - « Il n’est pas inutile tout d’abord de rappeler et de ne jamais oublier qu’une grande partie des médias est détenue par de grands groupes industriels et financiers. Il faut le répéter toujours ! […] tous ces patrons adhérent à l’ensemble des doxas économiques libérales dont une des plus en vue actuellement, et qui fait que nous avons eu la réforme des retraites, concerne la diminution drastique des dépenses de l’État qui gouverne les politiques actuelles, vis-à-vis des retraites, les coupes sombres sur la sécurité sociale, la diminution du nombre de fonctionnaires… »

 
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Notes

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