I. Crise de sérénité
- ou : Le PDG de l’AFP, ses communicants et la mobilisation
Sous le titre « Un ancien de l’Elysée dépêché à l’AFP », le Canard écrivait : « Pour promouvoir ladite réforme, Hoog a appelé à la rescousse un jeune cabinet de conseil en communication, Media9. En plein dans le mille : cette société a été créée, voilà deux ans, par le dénommé Pierre-Jérôme Henin. Lequel officiait tout bonnement entre juin 2007 et mars 2009 comme conseiller de Sarko à l’Elysée. » Et de préciser : « Le 1er juillet, Pierre-Jérôme Henin a remis au pédégé de l’agence un premier document. En dix-sept pages, il lui propose ses ’stratégies d’action’ et de ’lobbying’. Objectif : appuyer, dès la rentrée, la proposition de loi du Sénateur... UMP Jacques Legendre, qui modifie en profondeur le statut de 1957 de l’AFP. »
Ces révélations furent très vite confirmées par la divulgation du projet de Media9 et par les informations complémentaires [1]
Aussitôt les syndicats et la société des journalistes ont réagi. Et les médias aussi. L’ensemble de ces réactions (ainsi qu’un revue de presse) sont disponibles sur le site « SOS-AFP ».
Le PDG répondit le 22 août à ces révélations par un démenti (adressé « à tous les collaborateurs ») qui affirmait qu’« aucune mission n’a été confiée par l’AFP à la Société Média9 » et qu’ « aucun contrat n’a été signé avec elle et par conséquent, aucun euro n’a été versé. » Or, dès le 10 juillet, dans un courrier adressé à Emmanuel Hoog – et divulgué par le Syndicat autonome des journalistes (Saj-Unsa) – Média9, résumait sa mission et son coût, remerciait le PDG de l’AFP de la confiance accordée à Medai9 et demandait simplement que la lettre lui soit retournée signée avec la mention « Lu et approuvé ».
De quoi compromettre un peu plus la crédibilité du PDG. D’autant que le lendemain 23 août, la Fédération européenne des journalistes (Fej) s’inquiétait dans un communiqué : « l’AFP bientôt à la botte de l’Elysée ?
Le 6 septembre, l’intersyndicale décidait des soumettre aux salariés une « motion de défiance », reproduite ici même. Fin du vote et dépouillement : le jeudi 8 septembre. Le vote de cette motion a donné les résultats suivants : Inscrits : 1 380 - Votants : 797 (57,75 %) - Pour : 704 (88,33 %) - Contre : 45 (5,65 %) - Abstentions : 48 (6,02 %).
Or c’est cette absence de « sérénité » que Media9 envisageait notamment soigner !
II. Gouvernance de la sérénité
- Ou : Comment tenter de gruger les salariés
Le document de Media9 – publié intégralement par Mediapart (lien payant) – nous a été transmis. Comme notre site ne supporterait pas sa reproduction intégrale, nous en avons choisi quelques extraits, notamment sur la « stratégie » destinée à contourner l’opposition – rétrograde, bien sûr – des salariés de l’agence. Premier « élément de langage » : renommer la « paix sociale » devenue « sérénité intérieure ». La zen-attitude, quoi…
Après quelque paragraphes de « bla-bla » sur les merveilles attendues du nouveau statut, cet obstacle à vaincre :
Or l’enjeu est de taille :
L’objectif général est donc :
Trois objectifs doivent permettre d’atteindre cet objectif général : 1. Rajeunir 2. Créer de la valeur et…
A cette fin le document de Média9 propose :
Vous ne comprenez pas bien ? Extraits :
Munie notamment de sa cartographie et de ses « éléments de langage », un groupe – joliment nommé – prépare sa mobilisation :
Evidemment – c’est l’ « Action 3 » – la GPBP est chargé du lobbying, c’est-à-dire « porter la bonne parole », auprès des politiques de France et de Navarre.
Suit alors l’Action 4 :
Un travail titanesque pour quelques euros par mois !
Un PDG qui envisage de confier une telle mission à une telle officine révèle clairement de quelle agence il voudrait être le PDG.
Refuser le projet qu’il tente d’imposer n’est pas seulement l’affaire des salariés de l’AFP. Leur résistance devrait s’élargir à tous celles et tous ceux qui voudraient que le journalisme de l’AFP s’améliore, et non régresse vers les pires formes de soumission au marché ou à l’Etat.
H. M.
A suivre sur sur le site « SOS-AFP » et ici même.