Réponse des déconnomistes hétérodoxes au Cercle des économistes
À leur grande surprise, les Déconnomiques ont été contactées par Olivier Pastré, porteur, pour le Cercle des économistes, d’une proposition de « débat contradictoire » avec quelques-uns de nos économistes à nous ! Passé le moment de rigolade, il a bien fallu s’interroger : quelle mouche les avait donc piqués ? Depuis une décennie, le Cercle des économistes, réunion notoire, à quelques différences secondes près, d’amis du système, a méthodiquement ignoré les économistes hétérodoxes pour mieux s’adonner à la célébration de la mondialisation et de l’Europe orthodoxe. Mais après tout, à chacun ses tocades… Ce qui nous embête davantage, c’est que ces messieurs (et quelques dames) se sont imposés dans l’espace public, avec il est vrai l’actif concours de médias tous plus dévoués les uns que les autres, jusqu’à y conquérir une position de quasi monopole – eux qui vantent tant par ailleurs les vertus de la concurrence, n’est-ce pas là un délicieux paradoxe ?
Depuis dix ans, on ne voit qu’eux, on ne lit qu’eux, on n’entend qu’eux. Et pour nous raconter toujours les mêmes navrantes salades – dont la crise ouverte depuis 2008, compliquée depuis 2010, rend enfin évidentes les édifiantes conséquences. C’est leur monde qui est en train de partir en lambeaux, celui qu’ils auront concouru à faire advenir, dont ils auront été les inlassables promoteurs. Une infortune n’arrivant jamais seule, voilà que l’on découvre combien nombre de ces jolis messieurs (et dames) étaient amis, vraiment très amis des institutions financières privées les plus variées – se peut-il qu’il y ait un quelconque lien entre ces positions avantageuses et les discours qu’ils n’ont cessé de tenir, d’ailleurs en se parant des vertus objectives de l’expertise, parfois même de la science ?
L’un dans l’autre, le Cercle des économistes, à l’évidence, passe un sale quart d’heure. Ça ne l’empêche pas, une fois de plus, de banqueter luxueusement avec ses habituels invités de prestige. Mais ça le démange suffisamment pour, chose extraordinaire, venir proposer aux pelés, aux galeux, aux économistes hétérodoxes, un « débat contradictoire ». Cette proposition sortie de nulle part signifierait-elle que ça commence à sentir le roussi ? Faut-il le dire, nous avons répondu non – le roussi est une odeur qui nous plaît bien…
Comme nous connaissons ces messieurs-dames – ils sont très prévisibles –, nous préférons prendre les devants. Car nous les voyons d’ici plastronner en expliquant que, ayant refusé leur gentille offre de « débat », nous avons fui, nous n’avons pas voulu nous soumettre aux rudes disciplines de la confrontation argumentée, et patati, et patatère. Nous leur répondons donc par anticipation ceci :
1) alors qu’ils ont ignoré somptueusement tout ce qu’il y avait de pensée économique critique en France, nous ne nous sentons pas tenus d’accourir à leur premier claquement de doigts ;
2) leur demande étant suspecte à proportion de ce qu’elle est soudaine, nous sommes portés à supposer que leur position a été fragilisée, notamment par quelques révélations récentes, au point d’éprouver désormais quelque nécessité de se montrer « pluralistes », « ouverts » et d’une parfaite bonne volonté dialectique. Cette heureuse disposition nous paraît d’acquisition trop récente pour être vraiment sincère – et ne pas être visiblement intéressée. Or nous ne sommes pas décidés à leur rendre le moindre service. En d’autres termes, ils se découvrent dans la mouise : qu’ils ne comptent pas sur nous pour les en sortir ! ;
3) eux qui ont eu accès à tous les lieux médiatiques en prenant soin d’en écarter tous leurs possibles contradicteurs, eux qui ont régné exclusivement sur un débat public ayant foulé aux pieds le pluralisme le plus élémentaire, eux qui ont eu toutes les tribunes, en voudraient une de plus, et qu’au surplus ce soit nous qui la leur offrions, pour faire leur petite démonstration d’« ouverture » : ils peuvent se fouiller ! ;
4) nous ne débattrons contradictoirement avec ces messieurs-dames que lorsque les conditions générales du débat contradictoire auront été rétablies, plutôt établies, dans l’espace médiatique qu’ils contrôlent de bout en bout, c’est-à-dire quand ils nous offriront non pas du « débat » mais des vacances, et qu’on ne les verra plus à tout bout de champ dans Le Monde, Libération, L’Obs, France Inter, France « Culture », etc., etc. En attendant, qu’ils aillent se faire voir chez Plumeau !