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Famili, magazine familial, familier des stéréotypes sexistes

par Thibault Roques, Vincent Bollenot,

Magazine du groupe « Marie Claire », Famili se présente – c’est du moins ce qu’indique son nom – comme un magazine à destination des futurs et nouveaux parents en général. On pourrait donc attendre qu’il s’adresse autant ou presque aux hommes/pères qu’aux femmes/mères. Or tant dans la version papier que sur le site internet, ce titre de presse relaie, plus ou moins ouvertement, les visions les plus traditionnelles de la répartition des rôles entre les sexes : une répartition socialement construite et dominante dans la réalité que le magazine, plutôt que de la remettre en cause, contribue, par voie médiatique, à diffuser, voire à renforcer auprès de ses lecteurs.

Contrairement à ce que laisserait penser son titre même, Famili non seulement ne concerne que les couples hétérosexuels et leurs enfants, mais a en réalité tout du « magazine féminin », conçu d’abord et avant tout « pour les femmes » et « pour les mamans ». C’est dire, d’une certaine façon, que la famille, c’est d’abord et avant tout la maman et les enfants, le père étant essentiellement chargé de se substituer provisoirement à la mère quand les circonstances (exceptionnelles) l’exigent. Famili est donc dédié aux mamans d’abord (1) qui sont… mamans d’abord (2) et assignées aux tâches domestiques (3) !

1. Les mamans d’abord…

Les femmes sont en effet l’objet, explicite ou non, de la très grande majorité des sujets, articles et autres rubriques, comme en témoignent les titres des dossiers en unes des numéros de décembre-janvier 2012-2013 ou d’avril-mai 2013 : « Future maman : mon bébé, mon homme, mon job… » (voir plus loin) et « Mission survie après bébé : à la maternité, à la maison avec son mec, secret de supermams »…

… sans savoir au juste qui sont ces « supermams », aucune trace jusqu’ici, en une ou dans les pages intérieures, de « superpaps »…

Autre exemple d’adresse aux mamans, ce passage (numéro d’août-septembre 2012, p.106), à propos de l’enfant qui quitte ses parents pour la première fois : « Il risque de passer de l’excitation à la crainte, d’osciller entre fanfaronnade […] et repli dans vos bras (“Maman, je ne veux pas te quitter”). » Et plus loin (dans le même numéro, p.108), à propos des mères forcément en charge de tout ce qui concerne l’alimentation : « Les glaces j’en donne, ou pas ? […] Tous les étés, c’est la même chose, on s’interroge : je cède ou pas ? Toutes les réponses à vos questions de maman. »

Ces adresses aux mamans qui se posent des questions sont confortées par un usage des pronoms personnels qui en dit long sur le vrai « cœur de cible » de la rédaction. Le papa, lui, par définition, ne se pose pas de question, n’étant pas concerné ou n’ayant pas voix au chapitre. Alors qu’à chaque fois, le je, le on ou le vous pourrait être indéterminé, renvoyant a priori indifféremment au père ou à la mère, il ressort clairement que c’est surtout - voire exclusivement - aux mères que Famili s’adresse. Il y a bien ici ou là des petits encarts « Pour les papas » ou « Allez les papas » pour les inciter à participer ou à prêter main forte. Mais jamais aucune rubrique complémentaire en miroir « Pour les mamans » qui semblerait probablement incongrue tellement il va de soi qu’elles ne peuvent qu’être les seules vraiment concernées, à tous les sens du terme.

Au-delà du stéréotype entretenu dans certains articles consistant à considérer comme allant de soi l’omniprésence féminine (et partant l’invisibilité masculine) dès lors qu’il s’agit du foyer ou des enfants, d’autres clichés ont la vie dure dans Famili. Ici comme ailleurs, la maman (comme toute femme dans la plupart des « féminins »…) est réduite à son apparence, son look et sa beauté : « N’hésitez pas à dire à votre compagne que son rôle de maman lui va bien. C’est bon à entendre quand on est fatiguée, que les seins sont douloureux et que la cicatrice de l’épisio tiraille… Et si, pour lui faire plaisir, vous lui rapportiez ce T-shirt sympa qui vous tend les bras dans la vitrine ? Nouveau vêtement, nouvelle femme ! » (avril-mai 2013, p.77)

C’est bien connu, c’est la tenue et le style qui redonneront le moral à une femme qui vient d’accoucher. Sous des dehors sympas, ces slogans enjoués « Nouveau vêtement, nouvelle femme » ou plus loin « tenues petit mec et maman branchée » en disent long sur la valeur et les valeurs associées aux femmes. Ici comme ailleurs, pour les femmes, le superficiel prime : le bien-être est toujours d’abord un bien-paraître (les innombrables pages de publicité vantant les mérites de telle crème ou de tel article de prêt-à-porter en attestent).

Quant à son fameux « rôle de maman » (qui « lui va bien », cela va sans dire !), il renferme toutes les fonctions les plus traditionnellement « féminines » : ainsi, le souci premier de la mère, ce sont forcément ses enfants.

2. … Qui sont mamans d’abord

En une du numéro de fin d’année, ce titre : « Mon bébé, mon homme, mon job »

Un ordre d’occupation et de préoccupation qui n’a rien d’anodin.

Dans le meilleur des cas, les « mamans d’abord » sont invitées à jongler avec des emplois qui conviennent à leur premier rôle : des emplois que célèbre l’éditorial du numéro de février mars 2013 intitulé « Vive les crises ! » :

« Lorsqu’on devient parent, maman en particulier, on est prêt(e) à tout pour ses enfants. À se réinventer de nouveaux espoirs, à changer de vie. Et, entre autres, à travailler autrement. Même en temps de crise, les mamans ont des idées. Elles font preuve d’une imagination et d’une énergie incroyable, comme ces mampreneurs qui ont quitté le confort du salariat pour créer leur propre entreprise. Et profiter de leurs enfants à 100 %. Une aventure pas toujours de tout repos mais tellement stimulante ! En tout cas, une belle leçon de vie pour chacun(e) d’entre nous. Alors, cette année, promis, on profite des crises pour grandir ! »

L’exploit ultime, pour les femmes, c’est de continuer à faire ce que la plupart d’entre elles font déjà : toujours d’arriver à faire des choses, d’autres choses, sans jamais perdre de vue que leur premier rôle est de s’occuper et profiter des enfants à plein.

3. … et assignées au travail domestique

Du reste, certains encarts publicitaires dans le magazine (avril-mai 2012, p.41-42) renforcent cette vision de la division du travail au sein du couple : la mère est par essence maternante et tournée vers ses enfants tandis que le père est ce chef responsable, parfois héroïsé, qui regarde la route… ou regarde ailleurs. Dans la publicité pour le nouveau Toyota Verso, naturellement, seul le père est évoqué et visible : « mon père est un héros, sa voiture est un Verso », tandis que dans la publicité sur la page suivante pour le siège auto de la marque Bébé Confort, papa est au volant (normal, direz-vous…) alors que c’est évidemment maman qui est retournée pour s’occuper de bébé et de son doudou.

Le stéréotype le plus fréquemment véhiculé reste quand même celui de la mère aux fourneaux (décembre-janvier 2012-2013, p.114) : « il ne mange rien à la cantine, je fais quoi à dîner ? » Question a priori universelle et universellement partagée. Mais qui est je, au juste ? Réponse immédiate de la journaliste pour qui les enfants « doivent apprendre à […] accepter une alimentation différente de celle que maman leur prépare à la maison. » Dans la continuité, et avec la même évidence, « Nombreuses sont les cantines qui font des efforts pour proposer des repas variés et de qualité. Le problème des mères de famille, c’est davantage le soir. » Car oui, les pères de famille, eux, n’ont par définition, qu’à se mettre les pieds sous la table…

Ici encore, la publicité - pour les biberons Dodie - ne peut qu’accentuer ce sentiment d’un ordre du monde immuable : on nous dit que cette marque de biberons est « n° 1 dans le cœur des mamans ». C’est renvoyer la mère à la fois à sa fonction nourricière, une fois de plus, mais aussi souligner sa fibre affective (comme on peut le vérifier sur le site de Famili, brièvement analysé en complément de cet article). Les papas, quant à eux, soit n’ont pas de cœur soit ne s’occupent pas des biberons, c’est entendu.

Plus généralement, dans Famili, il est rappelé, plus ou moins indirectement, que le domestique ne peut être le domaine privilégié que de la femme, comme le souligne parfaitement le passage qui suit (avril-mai 2013, p.77) : « Rappelez-lui qu’il faut qu’elle se repose. Ce qu’elle a de mieux à faire, c’est se caler sur le rythme du bébé et de laisser les autres – mari, famille – s’agiter autour d’elle. Agissez ! Par exemple, interdisez-lui l’aspirateur et peu importe si le ménage laisse à désirer. Prenez les courses en main et la préparation des repas si possible… Ou invitez (belle-)maman à venir passer quelques jours… »

Interdire l’aspirateur à sa femme : quelle audace ! Ne pas se formaliser si elle n’a pas pu astiquer la maison : l’homme est décidément trop bon ! Ou, solution ultime, inviter les membres de la famille – féminins de préférence - à la suppléer. Tout ceci serait simplement cocasse si ça ne mettait pas au jour un impensé récurrent dans ce type de magazines : il va de soi que femme et (entretien du) foyer sont intimement liés et que cet ordre des choses ne peut être bouleversé que dans quelques rares situations exceptionnelles, nécessairement vouées à ne pas (trop) durer.

De la même façon, dans la rubrique « À la mater, j’en profite un max » (avril-mai 2013, p.70), les femmes sont invitées à « Profite[r] de [leur] séjour à la maternité pour faire connaissance avec [leur] enfant […] puisqu’[elles sont] temporairement débarrassées des contingences matérielles de la maison. » En d’autres termes, qui dit retour à la maison dit de facto retour de la femme au foyer, en tous les sens du terme.

Et quand les journalistes osent promouvoir telle position plus progressiste (« le partage des tâches, tu reverras »), voilà leur conseil adressé aux femmes : « Faites preuve de diplomatie. Il y a façon et façon de faire vos demandes “Qu’est-ce que tu aimerais le mieux prendre en charge, mon chéri ?”, ça marche mieux que : “À partir de maintenant, je ne m’occupe plus des courses. Si tu veux manger, tu remplis le frigo !” » (numéro d’avril-mai 2013, p.79). Il suffit d’imaginer un instant la situation inverse dans laquelle c’est l’homme qui viendrait s’enquérir en ces termes très diplomatiques des désirs de sa compagne concernant le partage des tâches pour se rendre compte à quel point la domination masculine a été intériorisée.

Et si relais il y a, c’est à une femme que l’on songe en priorité. Ainsi Malinka Dauverné, psychothérapeute pour Famili, propose-t-elle une solution dans son article « Être parent : pas facile, mais exaltant ! » (décembre-janvier 2012-2013, p.77) : « “Que dois-je faire si je n’y arrive pas ? Chercher de l’aide tout simplement !”. C’est ainsi qu’elle se décidera à appeler sa mère, une amie ou une baby-sitter. »

C’est le tiercé gagnant : mère, amie ou une baby-sitter. Les hommes, de leur côté, sont une fois de plus aux abonnés absents. Quant à la rubrique intitulée « Le meilleur conseil de ma (belle-)mère », elle n’a pas, à ce jour, d’équivalent du côté des (beaux-)pères. Or à force d’envisager les femmes de la famille ou de l’entourage comme seules alternatives possibles, elles finissent par devenir les seules alternatives pensables.

Alors même que Famili espère que « l’Éducation nationale s’attaquera aussi au “dépoussiérage” des manuels scolaires, qui véhiculent encore trop de stéréotypes du type “papa lit le journal, maman est aux fourneaux”  » et que la formation dispensée aux enseignants les aidera à prendre conscience des « petites discriminations qu’ils pratiquent malgré eux » (février-mars 2013), le magazine n’est pas le dernier, dans certains de ses articles, à reproduire tout ou partie de ces mêmes stéréotypes.

Il serait sans doute déraisonnable d’attendre de Famili qu’il soit systématiquement à l’avant-garde du combat pour une vraie égalité hommes/femmes tant les inégalités subsistent, ne serait-ce que dans la vie domestique réelle. On pourrait néanmoins attendre de ses journalistes un peu plus de vigilance, par exemple quand ils évoquent « le bavardage incessant des copines pipelettes ravies de se retrouver à votre chevet ». Vivement le Famili nouvelle formule dans lequel on nous promet « + de chroniques un brin déjantées » ; et un brin moins caricaturales ?

Vincent Bollenot et Thibault Roques


Complément : Sur Internet, aussi

La version internet du magazine est censée être plus interactive. En principe, n’importe quel inscrit sur le site peut rédiger un article en plus de l’équipe de journalistes. Mais une équipe de modérateurs veille au grain et les articles restent largement déterminés par les contenus de la version papier puisque le même type de présupposés s’y colporte.

L’article de la journaliste Katrin Acou-Bouaziz intitulé « Le langage de bébé à éviter au boulot » commence par un incipit annonçant la couleur des 332 mots à suivre : « À force de parler avec des enfants, il arrive que le niveau de langage des mères dégringole de quelques étages. Short-list des expressions qui dénotent au bureau. »

Ainsi la femme (puisque c’est elle qui parle « le langage de bébé », et non son compagnon) parait incapable de raison et de mise à distance. Toute entière prise dans ses préoccupations privées et dans son lien uniquement affectif avec le bébé, elle ne pourrait penser à autre chose qu’à son enfant et certainement pas parler d’un autre sujet. Mais, bien plus, elle ne pourrait parler autrement que comme un enfant. Par conséquent, la femme, et plus particulièrement la jeune mère, se trouve radicalement infantilisée. Or Famili se présente comme un magazine non seulement à destination de la « future maman », mais aussi du « futur papa », des « jeunes parents ».

À quand, par conséquent, un article sur les gazouillis du jeune papa retournant à son métier après un congé paternité ? Et s’il dispose d’une rubrique consacrée à « être mère et travailler », le site de Famili n’en propose pas d’équivalente pour les jeunes pères. Une telle inégalité de traitement médiatique, si elle reflète des représentations largement diffusées, contribue aussi à les entretenir.

Par ailleurs, on apprend dans le court corps de l’article que « les pires ennemis des mamans qui reprennent le chemin du travail » sont les onomatopées : « "Oups" ("j’ai perdu un dossier"), "zut" ("il n’y a plus d’encre dans l’imprimante"), "hop hop hop" ("faut que j’y aille moi"), "zou" ("c’est bouclé"), "t-t-t" (pour dire non), viiiii (pour dire oui), boum (quand l’agrafeuse tombe par terre). Très pro. »

Là encore, ces quelques mots entretiennent sans aucun recul une certaine vision de la femme dans son milieu professionnel. Selon ce cliché, celle-ci travaille bien sûr dans un bureau, et il semble qu’il s’agisse d’un emploi répétitif et peu stimulant, qui ne requiert pas trop de dextérité intellectuelle mais plutôt des gestes incorporés, du moins est-ce cet aspect qui est exclusivement évoqué dans l’article de Famili : on « boucle [un] dossier » visiblement envisagé comme une corvée, on change la cartouche d’ « encre [de] l’imprimante », on agrafe des pages. Pourquoi ne pas prendre l’exemple d’un dialogue de haute volée entre une avocate et un(e) client(e) ? Car cela ne correspond pas à la représentation la plus diffusée, en tous cas apparemment à la rédaction du magazine.

Dans un autre article typique, rédigé cette foi par Famili, c’est-à-dire de façon participative et/ou par l’équipe du magazine, et intitulé « Dur dur de reprendre le travail après bébé… », il est question du malaise que non pas certains parents mais seulement certaines femmes pourraient ressentir en reprenant le travail après la naissance d’un bébé. Certes les hommes ne connaissent pas de congé dû à la grossesse, mais eux aussi pourraient éventuellement être traversés d’affects dans ces périodes…

On lit dans cet article que « C’est normal, au retour d’un congé de maternité, d’être submergée d’émotions ». Plus loin, « Le malaise persiste ? […] Est-ce le besoin irrépressible de sentir votre bébé contre vous ? L’angoisse que la personne qui le garde ne s’occupe pas de lui aussi bien que vous ? La culpabilité de ne pas remplir votre mission de mère ? »

Le sens constamment sous-jacent est l’ultra émotivité de la mère. Certes, celle-ci est habitée de sentiments et a sa sensibilité propre, mais pourquoi toutes les préoccupations ici évoquées le sont sur le plan de l’affectif ? La jeune mère est ainsi constamment « submergée d’émotions » et traversée de sentiments « irrépressibles ». La femme n’est donc pas capable d’un minimum de mise à distance de ses préoccupations, elle envisage la garde de son enfant seulement comme une séparation. De plus, il existerait la « mission de mère » consistant à garder soi-même le bébé et par conséquent, « culpabiliser » de reprendre le travail serait légitime. Que le père se rassure, sa mission de patriarche ne consiste qu’à nourrir un foyer qui l’accueille les soirs et les fins de semaine.

Conclusion de ce bref article : « Enfin, si vous avez perdu tout intérêt pour votre travail, il est temps de songer à une évolution de carrière. Il y a fort à parier que l’attrait de la nouveauté vous redynamisera ! » CQFD, assujettie par ses émotions, la mère manquerait de motivation et d’ambition professionnelle, donc d’investissement et de dynamisme dans l’entreprise.

Enfin, « Comment réussir à travailler en opens space ? », article rédigé à nouveau par Famili, complète l’analyse puisque sont évoquées les femmes en général et plus uniquement les mères. Le début de l’article a pourtant une sonorité plus « sociale » et reconnait même la capacité des femmes de réfléchir ! « Travailler sur un plateau n’est pas une mince affaire. Surtout si votre job demande de la réflexion ».

Mais quelles solutions face à des conditions de travail difficiles ? Se syndiquer pour gagner un poids dans l’organisation du travail ? Négocier avec la direction ? Mobiliser le collectif par une campagne de tract ? Que nenni !

« Au lieu de subir votre environnement, obligez-vous à réfléchir à l’usage que vous voulez faire de votre bureau. S’agit-il d’un lieu purement utilitaire que vous occupez en pro ? Ou bien d’un endroit dans lequel vous passez une partie de votre vie et que vous aimeriez retrouver avec plaisir ? Dans ce cas, il va falloir faire un effort pour l’investir. Délimitez votre espace et personnalisez-le. Orientez votre table de travail de façon à ne pas avoir votre voisin sous le nez, servez-vous de votre ordinateur et de vos dossiers pour créer une zone d’intimité, ajoutez une lampe, des fleurs, des photos, des coupures de presse… bref, tout ce qui apporte une petite touche personnelle. »

C’est donc essentiellement une solution émotionnelle qui est à nouveau proposée : quelques photos de famille, et les dures conditions de travail seront vite oubliées !

Ce n’est pourtant pas l’unique solution avancée par Famili :
« Dites-vous bien aussi que la vie en groupe, ça s’organise. Édictez ensemble des règles de bonne conduite : par exemple, mettre les téléphones portables sur vibreur. Sortir de la pièce quand on a des conversations personnelles. Communiquer par mail plutôt que par téléphone. Cela limitera la gêne… mais ne l’évitera pas.

Vous ne parvenez pas à vous concentrer tellement vos collègues font du bruit ? N’hésitez pas à réclamer le silence. Mais sans agressivité. N’oubliez pas qu’il y a deux heures, la "chieuse" qui racontait son week-end, c’était vous ! Vous pouvez aussi vous isoler en mettant un casque ou des boules Quies. Le tout étant de prévenir que vous le faites par souci d’efficacité et non par rejet du groupe. »

Ainsi le groupe est vu comme le problème. Ce n’est plus l’open space qui est considéré comme la cause de mauvaises conditions de travail mais les « collègues » qui « font du bruit », le « groupe ». Pour Famili, il ne faut donc pas changer les choses mais changer les gens. L’open space est une mauvaise condition pour travailler ? Le travailleur doit néanmoins s’y soumettre, s’y accoutumer et le supporter grâce à des bricolages, et certainement pas remettre en cause le système et y proposer des alternatives. Et les « copines pipelettes » qui jacassaient tout à l’heure n’ont d’égal que « la chieuse qui racont[e] son week-end » que vous êtes. Ou l’art de présenter la femme sous son meilleur jour, avec finesse et subtilité.

 
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