Deux heures après l’annonce erronée de la mort de Martin Bouygues samedi, Emmanuel Hoog s’est empressé de twitter pour s’excuser auprès du magnat de TF1, parlant de « faute inacceptable ». Craignant sans doute que cet incident entache sa campagne pour France Télévisions, notre PDG, avec une grande élégance, se défaussait donc de toute responsabilité dans ce que nous préférerons qualifier d’erreurs humaines induites par la désorganisation de la rédaction mise en place par la direction depuis plusieurs années.
Mais à qui la « faute » en effet, M. Hoog ? Qui désorganise la rédaction de l’agence par sa gestion lamentable depuis des années ? Qui a éclaté la rédaction compliquant les échanges entre les services ? Qui a dit il y a quelques semaines « ne soyez pas prisonniers de vos sources » dans une critique à peine voilée du temps pris pour donner de source sûre le nombre de morts à Charlie Hebdo ? Qui a amené l’agence à une situation financière catastrophique et taillé dans les moyens humains et techniques de l’AFP ? Qui a écarté des postes de responsabilité des journalistes chevronnés parce qu’ils osaient ne pas adhérer totalement aux projets contestables de la direction ? Qui est responsable de la dégradation accélérée des conditions de travail, de l’augmentation intenable de la charge de travail et du stress des équipes sur le terrain ?
Cela fait longtemps que le SNJ-CGT dénonce les dérives qui écartent l’AFP de ses règles rédactionnelles. L’affaire Bouygues soulève une question que nous avons posée maintes fois : l’AFP doit-elle céder toujours davantage au mirage de l’instantanéité des réseaux sociaux, ou bien ne lui revient-il pas, plus que jamais, le rôle d’être un repère pour une information sérieuse ? Comme l’a rappelé avec raison Michèle Léridon, la fiabilité doit toujours primer sur la rapidité. Encore faudrait-il que les consignes de la hiérarchie soient toujours cohérentes avec ce principe.
La direction a annoncé qu’il y aura des « suites à cette erreur ». Nous espérons que ces suites relèvent d’une meilleure organisation rédactionnelle et d’une clarification des règles et non pas de sanctions contre des journalistes pour permettre à la direction de se dédouaner de ses responsabilités.
SNJ-CGT, Paris, le 2 mars 2015