La Voix du Nord, en locale [1]
" En passant par la Belgique, le groupe Hersant s’est installé dans la place. Ce journal était indépendant, il ne l’est plus. Pas grave, puisqu’il ne se servait pas de sa liberté. "
" Il faut être en bons termes avec monsieur le maire, monsieur le député, monsieur le conseiller général, monsieur le sous-préfet, monsieur le procureur de la République, les avocats, les huissiers, les commissaires, bref tous les messieurs des annuaires des Lion’s Clubs et Rotary Clubs. "
" Les lois de décentralisation auront été une véritable bénédiction. Nos-chers-présidents de région et de conseils généraux sont désormais dotés de moyens énormes. Les services de presse sont équipés pour pourvoir aux menus plaisirs des " amis " utiles. Mais là-dessus, on n’a jamais rien lu. Déjeuners, petits cadeaux, voyages d’études, les hommes politiques ont appris de Paris qu’il fallait toujours savoir prendre les " amis journalistes " par les sentiments et les agréments. De ce point de vue, nul ne niera que la décentralisation ait été un beau succès... " Faut bien bouffer ", c’est toujours l’excuse fournie dans toutes les rédactions de France et de Navarre. En vingt ans de métier, je n’ai entendu que ce " faut bien bouffer ! " Je pensais que le journaliste devait avoir de l’estomac. Je ne pensais pas qu’il pouvait passer son existence à le remplir ! "
A Paris
" On m’avait appris le contraire, mais j’ai vite saisi qu’à Paris, l’habit fait le moine. Et que, pour entrer dans leurs ordres, il fallait se fringuer comme eux, tenir fourchette et cuillère comme eux, voir les mêmes films qu’eux, fréquenter les mêmes gargottes qu’eux, parler comme eux, se coller dans leur monde et ne plus bouger d’un poil, passer inaperçu dans cet univers d’apparences. On savait que je venais de ma province, mais on imaginait que j’étais un bourgeois de province. Même petit, mais d’abord bourgeois. Et pour commencer ça a suffi. J’étais bon pour le service. "
Campagne présidentielle de 1981
" Stupeur, je ne découvre autour de moi que confrères résignés et déjà couchés sur leurs infaillibles pronostics. Inutile, à les entendre, de se prendre la tête : le Giscard n’aura qu’à se baisser pour récupérer un second septennat. C’est fait. C’est sûr. C’est inscrit. L’affaire des diamants, les déconnades du couple Coluche-Le Luron ne sont que du folklore. La politique, mon petit ami, c’est autre chose [...] Ils en ont été encore plus sûrs quand, en janvier 1981, les socialistes ont désigné Mitterrand pour affronter le souverain Giscard. Mitterrand plutôt que Rocard, il fallait voir leurs tronches [...]
Rocard est leur pote. Ils le tutoient, lui tapent dans le dos, ils peuvent rigoler avec lui, alors que " l’autre " les refroidit. Les journalistes n’en peuvent plus de ses retards, de son dédain et de son entêtement à ne pas vouloir débarrasser le plancher [...]
Rocard face à Giscard, voilà une affiche qui aurait pu faire vendre du papier. Mitterrand face à Giscard, c’était un remake de 1974. Mitterrand n’avait aucune chance. C’était du suicide. "
" Quatre mois plus tard, Mitterrand s’installerait à l’Elysée. Ce serait parti pour quatorze ans. Dès lors, changement de musique : Mitterrand était grand. Nouveau Jaurès. Nouveau Blum [...] Les mêmes qui copinaient avec Rocard, les mêmes qui s’étaient déguisés en petits marquis du giscardisme se firent, en ce printemps rose, valets de pied du nouveau monarque socialiste qui en éprouva quelques jubilations et se chargea en personne de la distribution des hochets. Je les vois encore. L’un des premiers déjeuners qu’il offrit dans ses nouveaux murs fut pour les journalistes qui avaient suivi sa campagne. Il fit changer le plan de table pour mettre à sa droite Christine Clerc, madame Figaro magazine, preuve de la magnanimité calculée et jouissive du nouveau Président étouffant sous les fleurs. "
" Je les ai regardés faire les confrères, pendant cette drôle de campagne présidentielle. Coriaces avec ce qu’ils appellent les " petits candidats ", les bousculant, les mettant face à leurs contradictions. Bonnasses avec ceux qu’ils appellent les " grands candidats ". Deux poids de traitement et deux mesures de conscience. Avec les " petits ", on se défoule. Avec les " grands ", on roucoule. En 2002, rien n’a changé. "
Campagne présidentielle de 2002
" La cour a d’abord pensé que le citoyen Chirac allait passer à la guillotine des affaires. Alors les plus audacieux ont commencé de livrer à la plèbe les potions des sorcelleries mitonnées à l’Elysée. Par exemple, l’histoire du prompteur dont le petit cirque chiraquien ne se sépare jamais. La pratique durait depuis sept ans mais on n’a bien voulu nous en parler qu’au tout début de cette campagne. Même les télés ont commencé à lâcher quelques plans plus larges pour montrer les carrés magiques de l’orateur Chirac. Quel courage ! Mais les sondages repartant à la hausse, l’armoire des petits secrets est vite refermée. Courage, taisons ! "
" La cour n’est courageuse que devant ceux qui sont à terre. "
Le Nouvel Observateur
" Un journal qui n’en finit pas de se fondre en dévotions devant le maître de cérémonies, dont chaque conférence de rédaction ressemble à une audience papale. L’univers de Jean Daniel, c’est celui des palaces marocains. Avec d’autres invités de marque, son portrait honore le hall des établissements les plus renommés. Imaginez Jean Daniel en résidence à La Mamounia, éditorialiser, comme en 1995, lorsque Juppé avait mis la France dans les rues, sur les préoccupations des travailleurs en colère... et vous comprendrez que chez lui le journalisme mène à tout à condition de n’en pas sortir. "
" Un ami du journal [2] souhaite la publication d’une interview, je refuse ; qu’importe, un " confrère " s’exécute. "
" Un écho est publié, par miracle, sur les émoluments de l’épouse de Jack Lang, ce dernier obtient la semaine suivante un écho de compensation vantant ses inestimables bonnes actions auprès de Jospin. "